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Le 13 février 2025 marque une date historique pour l’industrie du jeu vidéo en France : le premier appel à une grève nationale lancé par le Syndicat des travailleurs du jeu vidéo (STJV). Créé en 2017, ce jeune syndicat a su se structurer rapidement pour devenir le principal représentant des salariés du secteur.
Un mouvement inédit et des revendications claires
Le choix de cette date n’est pas anodin : il célèbre l’anniversaire des grèves de février 2024 chez Ubisoft, qui avaient mobilisé 700 salariés. Mais au-delà de cet hommage, le mouvement vise à adresser quatre revendications majeures : la sauvegarde des emplois, l’amélioration des conditions de travail, une meilleure transparence sur l’utilisation des subventions publiques, et la participation directe des travailleurs aux décisions des entreprises.
Pour Luc* (entretien mené pour le média « Rapport de force »), syndicaliste au STJV, cette grève nationale est aussi un message de solidarité envoyé aux salariés du jeu vidéo à travers le monde, notamment à ceux qui ne bénéficient pas des mêmes droits syndicaux.
Une organisation en réseau et une dynamique solidaire
Depuis sa création, le STJV fonctionne principalement à distance, sans locaux syndicaux nationaux. La préparation de cette grève a mobilisé des moyens de communication en ligne et une organisation en commissions internes. La solidarité a également joué un rôle clé, notamment avec l’initiative de développeurs indépendants ayant organisé une « Game Jam » (compétition de création de jeu en un temps limité) pour soutenir la caisse de grève.
Une indépendance revendiquée
Le STJV n’est affilié à aucune confédération syndicale. Ce choix s’explique par une volonté de se détacher de l’image traditionnelle du syndicalisme, perçue comme un frein à l’engagement dans un secteur historiquement peu politisé. Toutefois, le syndicat n’hésite pas à collaborer avec d’autres organisations, notamment Solidaires Informatique Ubisoft, qui a rejoint l’appel à la grève.
Un défi face à des interlocuteurs distants
L’industrie du jeu vidéo en France est marquée par une diversité de structures, allant des petits studios aux grandes entreprises multinationales. En face du STJV, les syndicats patronaux, le SNJV et le SELL, refusent pour l’instant tout dialogue. Pour le syndicat, l’objectif de cette grève n’est donc pas nécessairement d’obtenir des négociations immédiates, mais de renforcer son influence et de montrer que l’industrie devra désormais compter avec lui.
À l’heure où les grèves salariales se multiplient face aux délocalisations et licenciements à tout va permis par l’Union européenne, où la colère paysanne continue de gronder contre Macron-UE et le traité Mercosur, et où les contestations démocratiques contre la macronie ne cessent de se faire entendre, ce 13 février 2025 pourrait bien marquer un tournant dans l’histoire sociale d’un secteur qu’on attendait pas, celui du jeu vidéo en France, témoignant de sa pleine mutation, où les travailleurs entendent désormais faire entendre leur voix.
(*) Prénom modifié.