Pendant que l’on se bat pour le retrait de la Loi Travail et la défense du code du travail, les négociations sur l’assurance chômage ont débuté lundi 22 février dans une atmosphère tendue soulignée par les médias, dont bon nombre n’ont pas manqué de relayer opportunément des chiffres témoignant de la « dette » et du « déficit » de l’Unédic.
C’est que le patronat réclame un durcissement des conditions d’indemnisation, et que la commission européenne exige également que soit revu à la baisse les conditions d’accès et les indemnisation des chômeurs.
La nouvelle convention d’assurance chômage, qui est entrée en vigueur le 1er juillet 2014, est insuffisante pour réduire le déficit. Les différentes mesures mises en place ont permis d’économiser 0,3milliard d’EUR en 2014. D’après les estimations, elles réduiront le déficit de 0,8milliard d’EUR supplémentaire en 2015, le faisant passer de 5,2milliards d’EUR à 4,4milliards d’EUR, et la dette du système augmenterait encore pour s’élever à 25,9milliards d’EUR. Des mesures structurelles sont nécessaires pour garantir la viabilité du système. Les conditions d’éligibilité, la dégressivité des allocations et les taux de remplacement pour les salaires les plus élevés devraient être réexaminés – 15 mai 2015 Lettre de la Commission Européenne au gouvernement français. Dans le cadre de la procédure de déficit excessif. Lire ici pour retrouver les autres diktats de l’UE : casse du code du travail, fin des 35H, libéralisation etc….
Revue de presse selon la confédération syndicale FO :
Le Figaro, propriété de Dassault, agite les peurs sur le mode, il n’y a pas d’alternative, il faut réformer, sinon, c’est la faillite, l’engloutissement :
« Avec un trou abyssal à combler, le régime d’assurance chômage ne peut plus échapper une réforme structurelle. Plus question maintenant de chipoter ! Le régime d’assurance chômage, que les partenaires sociaux gèrent depuis 1958, est au bord de la faillite. Depuis le début de la crise, il a accumulé 25 milliards de déficit, soit l’équivalent du budget 2016 du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ». Le Figaro
Le Monde, journal de Niel et Cie, est de la partie… évidemment
Pourtant « le régime d’indemnisation du chômage est en effet assez largement excédentaire. Depuis 2008, l’excédent atteint 2,9 milliards d’euros, alors que le nombre de chômeurs a fortement augmenté et que la proportion de ceux qui bénéficient des indemnisations est tombée en dessous de 45 % en 2015 ». Alors pour quoi parle-t-on de « dette » ?, C’est « que le gouvernement entend maîtriser, notamment en restaurant la dégressivité des indemnités chômage ». Et une reprise du travail à bas coût. Un euro de l’heure par exemple ? Mais d’où vient cette dette ? « Ce n’est pas l’indemnisation des chômeurs qui creuse le déficit et donc la dette de l’Unédic, mais les ponctions faites par l’Etat. » Quand on veut réformer son chien, on lui inocule la rage…
Ouest-France fait monter la température pour mettre la pression sur la négociation
« Le gouvernement fait pression : Alors que le chômage (3,59 millions de chômeurs fin 2015) et la dette du régime (25,8 milliards d’euros) affichent des niveaux records, les partenaires sociaux doivent trouver un accord sur la prochaine convention avant le 1er juillet. Pressé par Bruxelles, l’exécutif pousse pour de nouvelles règles de l’assurance chômage afin d’atteindre 800 millions d’euros d’économies dès 2016 ».
Et revoici les clous de Bruxelles pour fermer le cercueil.
Le Point aussi
« Dans ce contexte, la ministre du Travail Myriam El Khomri n’exclut pas un retour à la dégressivité des allocations, une position traditionnelle du patronat et de la droite. Elle a appelé dimanche à « regarder les choses de façon non passionnée », tout en admettant que dans les années 1990, ce système n’avait pas prouvé son efficacité auprès des « personnes les plus en difficulté » ».
Ce qui sous-entend qu’il le serait pour les autres ?
ou encore Le Journal du Centre
La dégressivité « a déjà été mise en œuvre de 1992 à 2001. Ce dispositif avait alors plutôt ralenti le retour à l’emploi, selon diverses études. Pourquoi ? Parce que, comme l’expliquent des économistes peu suspects d’appartenir à la gauche de la gauche, la réduction des allocations – sous forme de dégressivité – incite les chômeurs les plus qualifiés à prendre des emplois moins qualifiés et rejette du même coup les chômeurs les moins qualifiés vers un chômage plus long ». Dont ils sont pour la plupart responsable, à écouter le Medef, « réclamant des mesures « « incitant à travailler tous les gens qui peuvent […] et qui ne le font pas » ».
Un langage qui renvoie, à mots à peine couverts, à la très douteuse et injurieuse équation chômeur = fainéant, et qui semble valider par avance la dégressivité ». Le gouffre de la « dette » inciterait donc à ne faire qu’un pas entre agressivité et dégressivité. Vers une société dégressive.