C’est tout sourire que le MEDEF, pardon Manuel Valls, a reçu le rapport Combrexelle proposant de démanteler le code du travail, sous un tonnerre d’applaudissements des médias des MM Dassault, Lagardère, Pinault et autre Bolloré. Ce rapport n’est pas une suprise, puisqu’il reprend l’ensemble des mesures réclamées par le grand patronat, et dont la Commission Européenne a ordonné la mise en œuvre notamment au printemps dernier. Ce rapport n’est donc que la première vague d’assaut – médiatique – afin de préparer l’opinion à la destruction du code du travail, et de l’ensemble des droits conquis par les dures luttes des travailleurs, et permettre à Hollande Valls, d’appliquer au plus vite et avec zèle les diktats de Bruxelles.
Car pour la France et concernant directement le code du travail, les ordres sont implacables. Et la déclinaisons des nouvelles mesures que propose le rapport Combrexelles n’en est que la stricte application. Voila ce que dit notamment la lettre du Kommissaire Moscovici à F Hollande (lire ici) :
Des mesures ont été prises pour réduire le coût du travail et améliorer les marges bénéficiaires des entreprises, notamment le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi de 20 milliards d’EUR et l’allègement des cotisations patronales de 10 milliards d’EUR supplémentaires prévu dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. Ces deux mesures, qui représentent 1,5 % du PIB, devraient contribuer à combler l’écart entre la France et la moyenne de la zone euro concernant le coin fiscal sur le travail. Leur mise en œuvre devrait se poursuivre en 2016 mais, compte tenu de leur coût élevé pour les finances publiques, il est important d’évaluer leur efficacité au niveau des entreprises. Cette évaluation devrait particulièrement tenir compte des rigidités affectant le marché du travail et le marché des produits, et tout spécialement celles affectant les salaires. Le coût du salaire minimum reste élevé si on le compare à celui des autres États membres. Le salaire minimum continue d’évoluer d’une manière qui n’est pas propice à la compétitivité et à la création d’emplois. De plus, dans un contexte d’inflation faible, son indexation automatique pourrait conduire à des hausses de salaires supérieures à ce qui est nécessaire pour préserver le pouvoir d’achat
Traduction de la langue des technocrates de la Troika :
- réduire le coût du travail et améliorer les marges bénéficiaires des entreprises = baisser les salaires pour augmenter les profits des patrons, des banques, des actionnaires
- allègement des cotisations patronales = un moyen de diminuer les salaires des travailleurs. Le résultat c’est un déficit de financement pour la sécu, l’indemnisation chômage et le financement des services publics (école, transport etc…)
- rigidités affectant le marché du travail et le marché des produits, et tout spécialement celles affectant les salaires. Le coût du salaire minimum reste élevé = ce que la commission – c’est à dire les patrons – appelle « rigidité » c’est toutes les mesures de protections des travailleurs contre l’exploitation la plus dure ! c’est toutes les mesures permettant aux travailleurs de se défendre et de s’organiser. En un mot, la commission européenne du patronat veut renvoyer les travailleurs aux 19e siècle ! Et pour faire bonne mesure, pour obtenir une diminution de l’ensemble des salaires, afin que toute la richesse reviennent à cette seule classe d’assistés (qui sont les assistés, lire ici), de profiteurs et exploiteur qu’est la classe capitaliste, la Commission exige la diminution du salaire minimum.
De fait, la commission exige que le gouvernement Valls s’engage à :
à réformer le droit du travail afin d’inciter davantage les employeurs à embaucher en contrats à durée indéterminée; à faciliter, aux niveaux des entreprises et des branches, les dérogations aux dispositions juridiques générales, notamment en ce qui concerne l’organisation du temps de travail; à réformer la loi portant création des accords de maintien de l’emploi d’ici à la fin de 2015 en vue d’accroître leur utilisation par les entreprises; à entreprendre une réforme du système d’assurance chômage afin d’en rétablir la viabilité budgétaire et d’encourager davantage le retour au travail
et
à éliminer les obstacles réglementaires à la croissance des entreprises, notamment en révisant les critères de taille fixés dans la réglementation pour éviter les effets de seuils
les mesures du rapport Combrexelle ne sont que la déclinaisons des instructions strictes données via la Commission Européenne par la classe capitaliste.
Personne ne doit se laisser prendre aux pièges de l’offensive médiatique visant à faire passer pour une « réforme » ou une évolution ce qui est une destruction. www.initiative-communiste.fr site web du PRCF se fait avec plaisir l’écho de l’analyse de la propagande médiatique par nos camarades du Cercle Ouvrier du Bassin Minier Ouest du Pas-de-Calais, jetant bas les masques.
Pour défendre les conquis sociaux, notre code du travail payé du prix du sang des luttes des travailleurs, il est indispensable de briser les chaines de l’union européenne. Tous ensemble, avec le PRCF, résistance !
Utilisons les paroles réactionnaires pour libérer les consciences du carcan et des mensonges.
Pour masquer les effets de la réforme annoncée du Code du Travail, le journal gratuit 20 Minutes fait sa une du 04 septembre 2015 avec un titre dévastateur :
« Temps de travail : 71% des Français prêts à laisser tomber les 35h »
Puis ils ajoutent
« Les Français sont donc prêts à abandonner l’idée de partir en week-end dès le vendredi midi. C’est en tout cas ce qui ressort d’un sondage réalisé par l’institut CSA pour Les Echos, Radio Classique et l’institut Montaigne. D’après l’enquête, 71 % des Français se disent favorables à l’idée de laisser les entreprises « fixer librement le temps de travail par accord avec leurs salariés »
Deux jours plus tôt, le 1er septembre, Laurent Berger le patron de la CFDT déclare dans Le Monde :
« Ma vision m’amène à dire clairement non au statu quo car le Code du travail est illisible pour les salariés et, du coup, il n’est plus respecté. La voie de passage est de voir comment on articule les différents niveaux de régulation. Il n’est pas interdit de dire que l’entreprise est un de ces niveaux, à condition qu’on préserve une norme sociale minimale si l’entreprise ne joue pas le jeu de la négociation ». Laurent Berger
Hier, 3 septembre, Philippe Martinez, devenu patron de la CGT déclare dans le journal Sud-Ouest :
« c’est possible d’alléger le code du travail, mais sans supprimer de droits » Philippe Martinez
Quant à Jean-Claude Mailly, le patron de FO, il avoue dans une interview à Europe1 le 28 août que la Loi Aubry n’a jamais été une Loi progressiste mais une Loi au service du capital quand il dit :
« les 35 heures, c’est quoi ? C’est une durée légale. Il faut savoir que la durée effective du travail en France, elle est autour de 39 heures aujourd’hui. Ça sert à quoi une durée légale ? Ça sert à calculer le taux de rémunération des heures supplémentaires. La flexibilité dans la durée du travail, elle existe dans notre pays : il y a la modulation, l’annualisation, il y a des semaines qui peuvent être à 42 heures en fonction de l’activité. Tout cela existe, je ne vois pas l’intérêt de relancer ce type de débat aujourd’hui ». Jean-Claude Mailly
Réforme du Code du Travail, remise en cause des 35 heures, réforme des conseils des prud’hommes, réformes des Inspections du travail et de la Médecine du travail, aggravation de la détérioration des conditions de travail par la flexisécurité, remise en cause des congés payés, allongement des cotisations retraites, privatisations, externalisations… quand les patrons du CAC 40 annoncent « 40 Milliards de profits pour le premier semestre 2015 »
Rappelons-nous le 18 septembre 2014, quand François Bayrou agitait le Code du Travail suisse qui comporte 40 pages…
Souvenons-nous des propos d’Alain Juppé en octobre 2014 :
« je suis pour la liberté contractuelle de négocier le temps de travail pour en finir avec le carcan des 35 heures ». Alain Juppé
Celui à la même date de François Fillon
« Il faut supprimer les 35 heures ». François Fillon
Le propos de Nicolas Sarkozy sur le statut des fonctionnaires :
« je suis pour la création d’un CDD de cinq ans dans la fonction publique pour éviter les recrutements systématiques sous statut »… Sarkozy
Et enfin le fond de l’assureur Xavier Bertrand, tête de liste LR (anciennement UMP) de la nouvelle région nord :
« Je propose que pour tous les nouveaux entrants, le statut de fonctionnaire ne soit conservé que pour les fonctions régaliennes. Pour les autres, je propose un contrat de droit privé, et non un contrat de cinq ans» Xavier Bertrand
Rappelons aussi la nature réactionnaire du rapport De Virville de 2004 « pour alléger le Code du Travail » : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/04….
Relisons les écrits du sémillant trublion Gérard Filoche (opposant interne dans le PS) : http://www.filoche.net/2015/08/16/en-avant-vers-lindividualisation-du-…
Quant à Jacques Attali, le pseudo économiste qui murmure depuis 40 ans à l’oreille des puissants, de gauche, du centre et de droite, il a dit dans le journal Les Echos :
« Le Code du travail pense principalement le travail en termes de comptage des heures, des congés… et de lutte sociale ou de rapports de forces. Ce code ignore l’implication et l’engagement intellectuel des salariés, seuls les cadres sont censés être libres de leur organisation… ». Attali
Rappelons aussi ce que l’ancienne présidente du Médef, Laurence Parisot, déclarait en 2011 :
« La vie, la santé, l’amour sont précaires, pourquoi le travail échapperait-il à cette loi ? » Laurence Parisot
Quant au FN, il déclarait en octobre 2010 :
« la liberté d’opinion est bafouée, il faut déverrouiller l’étau syndical et cela s’inscrit dans la stratégie de Marine Le Pen et du Front National pour reconquérir le champ social et le monde du travail » : « Ensemble, gouvernement et syndicats jettent la France dans le chaos. Voilà deux semaines que la France s’installe dans le chaos, entre grèves, manifestations et blocus. La tolérance zéro doit s’appliquer à tous les émeutiers » : « Le sabotage de l’économie française caractérise l’action des dirigeants de la CGT. Ces blocages frappent avant tout les salariés qui se rendent à leur travail, les entreprises, et menacent l’emploi. La CGT doit être rendue pénalement responsable, ses dirigeants doivent en répondre »
L’adage dit « les écrits restent et les paroles s’envolent » mais rien ne s’est envolé. Force est de constater que les ultralibéraux se sentent pousser des ailes grâce à la perte de souveraineté de la France engluée dans le bourbier européen.
La lutte des classes est aujourd’hui empêtrée dans le réformisme, le corporatisme et l’individualisme, des maux de notre société de consommation et de concurrence qui créent un profond sentiment d’impuissance et amènent à une forme de résignation, soit-elle passagère.
Outre la guerre économique entre impérialistes, le capital est bien aussi dans une guerre idéologique, nous n’allons pas répéter une énième fois les propos du rapport JP Morgan. Il la mène grâce à la corruption des élites pseudos intellectuels et des politiciens corrompus à sa cause.
Mais il y a une carence idéologique de ceux qui, médiatiquement s’expriment au nom de la « vraie gauche », aussi ce que nous avions appelé « coup d’épée dans l’eau » à propos du référendum grec, s’est bien transformé en « coup de couteau dans le dos ».
En effet, aujourd’hui la forfaiture d’Alexis Tsipras, expliquée en amont par les communistes du KKE et par le PAME, est devenue une épine qui fait très mal à la gauche, car l’espoir s’est transformé en cauchemar, et le retour de la droite est aujourd’hui annoncé en Grèce, malgré les conséquences pour les masses laborieuses de ce pays livré aux requins et mafias.
La seule solution est révolutionnaire, mais il ne suffit pas d’appuyer sur un bouton ou d’écrire au travers d’un clavier pour la déclencher. Car comme disait Lénine : « Sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire » qui disait aussi : « On dit souvent : la classe ouvrière va spontanément au socialisme ; cela est parfaitement juste en ce sens que, plus profondément et plus exactement que toutes les autres, la théorie socialiste détermine les causes des maux de la classe ouvrière ; c’est pourquoi les ouvriers se l’assimilent si aisément, si toutefois cette théorie ne capitule pas elle-même devant la spontanéité, si toutefois elle se soumet cette spontanéité. Cela est généralement sous-entendu, mais le Rabotchéïé Diélo (organe de presse organe de l’« Union des sociale-démocrates russes à l’étranger avant la révolution de 17) oublie justement ou dénature ce sous-entendu. La classe ouvrière va spontanément au socialisme mais l’idéologie bourgeoise la plus répandue (et constamment ressuscitée sous les formes les plus variées) n’en est pas moins celle qui, spontanément, s’impose surtout à l’ouvrier. »
Ainsi le sondage, soit-il dirigé, mis en avant par 20 Minutes, mais aussi tous les propos inscrits en amont, démontrent ce qu’affirmaient les marxistes-léninistes sous la plume du grand Lénine.
Nous qui sommes communistes, nous ne pouvons être comme des alchimistes qui transforment le plomb en or en mélangeant l’eau et le feu. Pourtant beaucoup trop montent des barricades idéologiques, alors qu’une barricade n’a toujours que deux côtés, c’est la lutte des classes et l’antagonisme entre capital et travail qui définissent les camps qui s’affrontent.
Rappelons Gramsci : « La crise consiste justement dans le fait que l’ancien meurt et que le nouveau ne peut pas naître : pendant cet interrègne, on observe les phénomènes morbides les plus variés », c’est exactement ce que nous vivons avec l’épée de Damoclès brandit par l’extrême-droite, arme ultime du capital.
Aussi nous devons mener la bataille idéologique par l’évaluation pratique des théories afin de soustraire les masses laborieuses à l’idéologie dominante qui les contraint à penser contre elles-mêmes et contre leurs intérêts.
Décodage des propositions du rapport Combrexelle
Plus de plancher pour les salaires, plus de plafond pour la durée du travail, plus de règles contraignantes en hygiène et en sécurité, plus de sanctions pour les patrons délinquants, tels sont les objectifs.
Le moyen c’est de renverser la hiérarchie des normes : la loi était un plancher, le même pour tous, au-dessus l’accord collectif ne pouvait logiquement n’être que plus favorable aux salariés, et encore au-dessus le contrat de individuel ne pouvait être, suivant la même logique d’égalité des droits, que plus favorable que l’accord ; avec Combrexelle, l’ordre est inverse, l’accord collectif plus défavorable que la loi s’appliquera et pourra également s’imposer au contrat de travail individuel.
Pour la vaseline pédagogique, un seul slogan : on ne peut être plus syndicalistes que les syndicalistes, s’ils signent c’est que c’est « protecteur » pour les salariés.
Un exemple ancien (décembre 1981) permet d’illustrer ce qui en jeu dans la réécriture du code qui va suivre (quatre ans prévu pour l’achèvement de la destruction du droit du travail, mais d’ici trois mois les premiers changements seront effectués sauf mouvement social gigantesque pour s’y opposer) : dès le 21 décembre 1981 a été signé dans l’agriculture un accord national sur la durée du travail stipulant, entre autres, qu’on pouvait faire faire à un salarié, « avec son accord » 12 fois 12 heures (144 h donc) sans repos. Le ministère a étendu cet accord lui donnant donc quasiment « force légale ». Alors inspecteur du travail, j’ai dit à la responsable de la décision d’extension au Ministère qu’il y avait violation des durées maximales journalière et hebdomadaire et du repos hebdomadaire et que je serai obligé de relever le cas échéant par procès-verbal ces infractions. Elle m’a répondu que j’avais raison mais qu’on ne pouvait pas être plus royalistes que le roi. On était six mois après l’arrivée d’un gouvernement de gauche et il n’y avait pas de chantage à l’emploi dans la négociation de cet « accord » collectif.
Alors, on peut être sûr qu’en dehors des accords arrachés par d’immenses mouvements de grève (1936, 1968), il n’y a aucun accord à froid qui ne soit, en tout ou en majeure partie, régressif pour les salariés. Plus de trente années d’expérience confirment cette évidence : pourquoi un patron signerait-il un accord qui lui est défavorable de sa propre initiative (on peut à cet égard noter que toutes les grandes « négociations » se font sur exigence du MEDEF et sur leur texte !, les organisations syndicales de salariés s’efforçant de déplacer des virgules sans réussir à changer l’essentiel qui, derrière le charabia vaseliné, est toujours une déclaration de guerre).
Pour être complet, il faut rappeler, notamment après la loi Rebsamen, que désormais, les employeurs peuvent toujours trouver des personnes habilitées par mandatement à signer, même sans délégués syndicaux, même sans représentants du personnel élus, et même sans eux s’ils refusent dans le délai d’un mois de négocier (les reculs demandés) avec l’employeur qui le souhaite.
Proposition 1 :
L’ABC de la propagande. « Vous devez accepter de négocier » nous dit Combrexelle, car on est dans un monde de « concurrence » ; en clair, il faut baisser le « coût du travail ».
Proposition 2 :
Propagande encore : comment faire adhérer les organisations syndicales à notre « stratégie ». Plutôt que négociation, il faut entendre reddition.
Proposition 3 :
Choisir les D.R.H compétents pour les arnaques.
Proposition 4 :
Former les futurs responsables de ces arnaques dès les grandes écoles.
Proposition 5 :
Former, sur finances de l’Etat, les conseillers des employeurs pour un meilleur suivi des arnaques.
Proposition 6 :
Trier le bon grain de l’ivraie dans les cadres de la Fonction publique à l’aune de leur goût pour l’arnaque ; ils mériteront alors d’être dénommés « dirigeants ».
Proposition 7 :
Inscrire dans le Code du travail l’ABC de l’arnaque : des « accords de méthode » systématiques avant l’arnaque pour qu’elle se déroule de façon « souple » et sans possibilité de « contentieux » ultérieur. Les patrons, contrairement au discours officiel, sont risquophobes.
Proposition 8 :
Justement, pour garantir l’efficacité de l’arnaque, on a ici une superbe circonvolution dont la traduction est : pour dire que, comme cela a été fait (avec l’ANI du 11 janvier 2013 et la loi du 14 juin 2013 qui l’a recopié) pour les consultations des représentants du personnel, il faudra faire vite et en temps compté pour conclure les arnaques.
Proposition 9 :
Au cas où les accords ne seraient pas assez juteux pour les employeurs, prévoir dans la loi une limite à leur durée d’application. Accord bien acquis (du point de vue des travailleurs) ne devra jamais profiter. Mais, plus vraisemblablement, cette limite est pensée pour pouvoir à intervalles réguliers conclure de meilleures arnaques (en invoquant la concurrence qui s’est aggravée – l’exemple des producteurs de porc auxquels on a expliqué un mois après que l’accord sur le prix de 1,40 euro au Kg était dépassé l’illustre bien).
Enfin, cette limite permet d’entrer dans les têtes des « négociateurs » qu’il n’y a rien d’acquis et qu’ils doivent se préparer à un rôle dont la permanence les coupera à coup sûr de leurs mandants.
Proposition 10 :
Un renforcement de la proposition 9. En plus des limites de temps, il faut pouvoir dénoncer plus facilement les accords, avant la limite.
Proposition 11 :
1/ Faire un groupe de travail qui va réfléchir à la façon (on devine, par accord collectif !) d’échapper à la loi et à la jurisprudence actuelles sur les transferts de salariés d’une entreprise -et d’une convention collective- à une autre. En clair, comment supprimer les quelques garanties (« avantages individuels acquis », par convention collective et/ou grâce au contrat de travail).
2/ Faire un groupe de travail réfléchissant à « l’application du principe d’égalité aux accords collectifs pour permettre leur évolution dans le temps ». Là, même avec quelque expérience, on a du mal à comprendre le sens de la proposition. Il faut dire que la signification est à l’inverse de l’affirmation d’un principe d’égalité. Il s’agit de la mise en œuvre du revirement opportun de la Cour de cassation (27/1/2015), salué par Combrexelle dans son rapport, et qui désormais exonère l’employeur de la charge de la preuve du motif professionnel justifiant les différences de traitement introduites par un accord collectif entre différents catégories de salariés (cadres notamment par rapport aux non-cadres). L’argument de la Cour de cassation est essentiel : les organisations syndicales qui signent le font par utilisation du pouvoir que leur donne la loi de défendre les intérêts professionnels des salariés et, si elles signent, c’est a priori pour de bonnes raisons. Autrement dit, on ne peut pas être plus syndicalistes que les syndicalistes. Tout est là.
Alors cette partie de la proposition 11 doit s’entendre comme : on peut justifier plus encore et sans risque les inégalités entre catégories professionnelles.
Proposition 12 :
Faire financer par les employeurs une formation commune à l’arnaque, pour les employeurs et les organisations syndicales. Déjà avancée pour les conseillers salariés prud’hommes salariés dans la loi Macron, cette idée de faire se former ensemble les futurs « négociateurs » est une trouvaille : on se forme ensemble, on parle la même langue, on ne se quitte plus, on peut commencer à s’estimer et à penser de la même manière.
Proposition 13 :
Dans le même ordre d’idées, transformer les Instituts Régionaux et Supérieurs du Travail pour qu’ils forment les représentants du personnel et les conseillers prud’homaux selon les « bons principes » et les « bonnes pratiques » évoqués aux propositions 1 et 2.
Proposition 14 :
Rendre obligatoire la signature par les organisations syndicales d’un texte expliquant aux « tiers » le contenu de l’arnaque à laquelle ils ont participé et définissant à l’avance la façon dont elle devra éventuellement être interprétée. Cochon qui s’en dédit.
Proposition 15 :
Même chose que la proposition 15, pour contrôler la façon dont les organisations syndicales devront assurer la diffusion de l’arnaque auprès des « salariés concernés ».
Proposition 16 :
1/ Vérifier si la mise en place de toutes ces arnaques s’avère juteuse par les travaux que devront réaliser la DARES et France-Stratégie sur « l’étude économique de la négociation collective ». En clair le rapport coût/bénéfices. Il n’y a jamais rien dans les « négociations » comme dans les « accords » ou lois dictées par le MEDEF, qui ne se traduise par « combien d’euros on y gagne ».
2/ Mettre en place la surveillance par le Ministère du travail de la bonne mise en route des arnaques au niveau de l’entreprise. Une proposition en apparence contradictoire avec la ritournelle du rapport Combrexelle sur l’autonomie de la négociation collective.
Proposition 17 :
Un site national supplémentaire pour concentrer et diffuser la propagande.
Proposition 18 :
Maintien de l’extension des accords de branche par le Ministère du travail. On peut être étonné que la question se soit posée. Car, s’agissant d’arnaques, il est bon pour les arnaqueurs que les « accords » régressifs puissent être imposés aux employeurs qui ne sont pas signataires et à leurs salariés qui n’ont rien demandé.
Mais, à la lecture du passage du rapport sur ce point, on comprend mieux que l’extension est d’abord un moyen de légitimer des « accords » régressifs et d’en diminuer ainsi la contestation devant les tribunaux, et ensuite un moyen pour les grandes entreprises d’éliminer la concurrence et d’aller vers une diminution drastique du nombre de branches. Combrexelle conclut en disant que « Lorsque il n’y aura plus qu’une centaine de branches… les modes d’intervention de l’État pourront être modifiés et allégés en s’inspirant du dispositif qui sera applicable aux accords d’entreprise. ».
Et l’autonomie des « accords » finira alors par s’imposer…
Proposition 19 :
Assurance définitive que le gouvernement ne sanctionnera pas les « accords » d’entreprise illégaux. L’administration nous dit-il est « obligée de délivrer le récépissé même si elle a le sentiment que, sur le fond, l’accord d’entreprise est en tout ou partie contraire au code du travail ».
Alors, maintenant que vont fleurir des « accords » qui vont remplacer la loi, il serait logique qu’à minima, le Ministre du travail homologue l’ « accord », un peu comme dans la procédure d’extension pour les accords de branche.
Pas question répond Combrexelle, cela « alourdirait considérablement les tâches des services déconcentrés sans qu’ils aient les moyens d’assurer la sécurité juridique qu’exigent de telles fonctions » ; et puis cela ruinerait « l’effort commun » qui doit « tendre à renforcer la confiance dans la négociation collective ».
Et Combrexelle de balancer l’écran de fumée : dans les deux mois du dépôt de l’ « accord », « le Direccte, aurait la faculté, en cas de violation manifeste de la loi, de demander l’annulation de tout ou partie de l’accord devant le tribunal de grande instance compétent ». En lisant cette proposition, on peut, pour en saisir l’inanité s’arrêter au mot « Direccte », tant ces personnages, de par leur statut, leur tri et leurs fonctions n’ont ni le temps ni l’envie de contrôler quoi que ce soit quand il s’agit des employeurs. Mais on peut aussi s’interroger sur le sens du mot « loi » quand on explique que désormais ce sont les « accords » qui la feront ! Pour être clément avec Combrexelle, on peut penser qu’il fait référence à ce qui va rester de la loi dans la réécriture du code qu’il appelle de ses vœux après avoir fait le greffier du MEDEF pour la précédente (2004-2008) : quelques grands « principes » (déjà écrits par le tandem Lyon-Caen Badinter) qui ne sont que la reprise des principes existants sur lesquels aucun contrôle et aucune sanction n’est possible. C’est le but de toutes ces manœuvres.
Un rappel cependant pour les adhérents du MEDEF qui n’auraient pas bien suivi la co-élaboration du rapport Combrexelle, celui-ci précise que, bien entendu il n’est pas question pour le Direccte d’aller contester les plans de licenciements (« Plans de Sauvegarde de l’Emploi »).
Proposition 20 :
Ne plus sanctionner les violations par les employeurs de l’obligation de négocier. Combrexelle ne parle même pas des sanctions pénales, il doit penser qu’elles n’existent même plus, depuis le temps qu’il s’active à les faire disparaître, à travers la recodification de 2007 et à travers les lois qui tombent en rafales (14 juin 2013, lois MACRON, REBSAMEN et les ordonnances qui vont avec). Non, il évoque juste les « sanctions financières », qu’il trouve inefficaces quant à la qualité de la négociation. Alors tant qu’à faire, pas de sanction du tout, juste « l’Etat devrait essayer de promouvoir les bonnes pratiques de négociation dans le cadre de dispositifs de droit souple (label…) contribuant à la bonne image des entreprises qui sont volontaires en la matière ». Du sucre à la place des sanctions, il fallait y penser.
Là aussi, Combrexelle n’oublie pas de rassurer. Il y aura toujours des sanctions financières pour les cas de « très fortes contraintes d’intérêt général ». Tant que c’est trop voyant, on y sera encore un peu obligé…ou presque car, pour ceux qui ont prêté quelque attention à la loi Rebsamen, celle-ci prévoit l’auto-blanchiment des employeurs délinquants par exemple sur l’égalité professionnelle hommes/femmes qu’évoque Combrexelle dans son rapport : l’employeur qui aura réussi à faire passer à trois ans par accord la périodicité des négociations sur l’égalité professionnelle hommes/femmes est « regardé » comme remplissant ses obligations en la matière pendant toute cette durée, en clair sera blanchi pour ce temps quelle que soit la situation des salariées de l’entreprise.
Proposition 21 :
Empêcher, en instaurant des délais, les recours contre les « accords » collectifs régressifs. Une mesure très efficace pour garantir la pérennité des arnaques.
Proposition 22 :
Assurer une formation aux arnaques des juges « judiciaires » et administratifs.
Une incertitude sur les juges concernés par le qualificatif de « judiciaire ». La réécriture de la partie législative du code du travail en 2007 a anticipé la suppression des prud’hommes souhaitée par le MEDEF en rebaptisant indistinctement « juge judiciaire » tant les juges du tribunal d’instance ou du T.G.I (ce qui est l’appellation commune) que les prud’hommes. Aussi revient-il non plus au législateur mais au gouvernement par décret de décider de quel juge il s’agit dans tel ou tel domaine. Jusqu’à présent, les décrets intervenus n’ont jamais attribué aux prud’hommes la qualité de « juge judiciaire » qui figure dans les dispositions législatives ; on peut penser que le MEDEF, qui donne comme consigne à ses conseillers prud’homaux de ne pas intervenir dans les accords collectifs au prétexte de complexité, ne tiendra pas à les inclure dans ces formations.
Proposition 23 :
Instaurer des moments de commémoration (« Mise en valeur des bonnes pratiques ») à l’occasion d’ « d’événements importants concernant l’entreprise et ses salariés ».
Proposition 24 :
Limiter le nombre de réformes législatives sur le droit du travail. Venant de la part de ceux, Combrexelle en tête, qui les multiplient ne manque pas de piquant. Mais l’idée, c’est que les arnaques devant prendre le dessus sur la loi, autant qu’il y en ait le moins possible. Et limitée aux grands principes.
Proposition 25 :
Une idée pour détendre un peu les lecteurs : si on créé une loi en droit du travail, on en supprime une autre. Ubu ministre du travail.
Proposition 26 :
Sans doute la plus importante, et peut-être aussi celle où les enjeux sont les plus perceptibles.
Il s’agit de refaire le coup de la recodification de 2007, mais cette fois sans prétendre réécrire « à droit constant ».
Combrexelle propose donc de réécrire une nouvelle fois le code en trois parties :
1/ une qui relèvera de « dispositions impératives », une formulation vague pour ne pas dire loi (logique quand on veut en faire disparaître la portée en la réduisant à des « principes » sans contrôle ni sanction possible).
2/ la deuxième, les « accords » collectifs qui vont concrètement dire le droit, ou plutôt les droits, potentiellement autant que d’entreprises.
3/ la troisième ne s’appliquera qu’en l’absence d’accord ! il s’agit dit Combrexelle de « dispositions supplétives » (là aussi, Combrexelle n’arrive pas à écrire « décrets » et on le comprend, c’est là le plus souvent et notamment en hygiène et en sécurité que l’on trouve les règles « impératives », concrètes et chiffrées, qui permettent potentiellement l’application de réels droits pour les salariés ou la sanction pénale de leur inobservation.
Abracadabra, les « accords » remplacent la loi et les décrets, et aucune sanction pénale n’est possible.
Proposition 27 :
En contradiction avec les propositions 24 et 25, Combrexelle propose une loi dès 2016 pour modifier le code du travail sur les conditions de travail (comprendre tout ce qui concerne la santé des travailleurs), le temps de travail, l’emploi et les salaires. Derrière l’acronyme créé « ACTES » (« Accords sur les Conditions de Travail, l’Emploi et les Salaires », Combrexelle est joueur) se cache donc tout ce qui est essentiel pour les droits et la vie des travailleurs dans l’entreprise et l’on peut sans grand effort imaginer que cette loi sera le premier pas dans l’architecture décrite à la proposition 26.
Proposition 28 :
Complémentaire de la précédente, Combrexelle n’ignore pas que depuis 2004 (loi Fillon) et depuis 2007 (loi Bertrand) a été déjà inscrit dans la loi et dans le code du travail l’obligation avant toute loi sur le droit du travail d’une « négociation » sur le sujet entre « partenaires sociaux ». Combrexelle sachant qu’il lui est difficile de penser qu’il pourra si vite obtenir un nouvel Accord National Interprofessionnel disant que oui, les majorations pour heures supplémentaires, les durées maximales du travail, les salaires conventionnels peuvent être négociés et dans les branches et dans les entreprises, il propose que cette « négociation » puisse être remplacée par une « Position commune qui se borne à la définition des principes essentiels ».
Cette proposition de Combrexelle a l’avantage pédagogique de la répétition ; on comprend de mieux en mieux les mécanismes de l’arnaque. En on peut déjà rédiger la « position commune » avec les « principes essentiels », ceux que les grands médias ont déjà repris en boucle : « on est pour le dialogue social sans tabou, à tous les niveaux, et dans tous les domaines ; on demande juste l’engagement qu’on ne touche pas au SMIC et à la durée légale de travail ».
Proposition 29 :
Complémentaire de la précédente : Hollande l’avait déjà promis au MEDEF, la grande arnaque (l’ « accord », fut-il défavorable, remplace la loi) doit être inscrite dans la Constitution (comme pour le traité constitutionnel européen dont on a bien mesuré avec la Grèce ce que son adoption signifiait : il n’y aura plus qu’une seule politique possible, celle du laisser faire, laisser passer). Combrexelle propose de l’inscrire dans le préambule de la Constitution.
Proposition 30 :
Encore une nouvelle loi ou est-ce la même que celle de la proposition 27 ? Combrexelle propose une loi pour une « modification du code du travail » avec « rationalisation et extension du champ de la négociation dans les champs prioritaires des accords ACTES ». La lecture du rapport est nécessaire pour comprendre ce qui est derrière le jargon, c’est d’ailleurs le seul point du rapport où tout le monde peut toucher du doigt le massacre en préparation.
Combrexelle commence par dire, et il a raison que l’essentiel des relations de travail sont derrière l’acronyme ACTES pour déplorer la « très forte imbrication de la norme unilatérale (loi et règlement) » dans ces domaines et il propose en conséquence de déterminer ce qui pourrait dorénavant relever de la « négociation ».
1/ Le temps de travail.
Après avoir affirmé de façon erronée qu’on ne peut toucher aux normes européennes telles le maximum de 48h par semaine (sans parler de l’Angleterre et de son opt-out, l’article L.3121-35 du Code du travail permet au Direccte, encore lui, d’accorder des dérogations, de même que pour la durée maximale moyenne de 46 heures par semaine et les dispositions par « convention » individuelle de forfait sur l’année permettent d’effectuer 78 heures par semaine, payées 35, en respectant le repos journalier « européen » de 11 h par jour), Combrexelle délivre enfin la proposition que le MEDEF attend depuis 1936 (après avoir obtenu l’annualisation du temps de travail en 1982) : la fin de la durée légale de travail.
Le contraire de ce qui est bruyamment garanti par les annonces officielles. Comment décrire mieux la proposition de Combrexelle : laissons les entreprises, par « accord » décider à partir de quand on compte les heures supplémentaires (et donc on paye les éventuelles majorations). Depuis que le temps partiel est autorisé (1973), il n’y a pas définition plus concrète de la durée légale de travail.
2/ Les salaires
Combrexelle le sait, il ne peut dire qu’on va toucher au SMIC. De même, formellement, il ne peut dire qu’on va toucher aux salaires minima des conventions collectives. Mais Combrexelle est sans doute la personne la mieux placée en France pour savoir comment toucher au SMIC par « accord » collectif. Cela fait plus de 20 ans que les distributeurs de gratuits dans les boîtes aux lettres sont payées à environ la moitié du SMIC par la grâce tout d’abord d’un décret modifiant les mentions obligatoires sur les bulletins de paie sur les heures de travail effectuées. Comme les juges ont continué à estimer que ces entreprises, comme les autres, devaient justifier des heures réellement effectuées, Combrexelle, comme Directeur Général du Travail, a œuvré à la conclusion d’un « accord » collectif qu’il a ensuite traduit en décret (décret n° 2010-778 du 8 juillet 2010, article R.3171-9-1 du code du travail). Deux fois annulé par le conseil d’Etat, cet article qui n’a pas été supprimé, dit que l’employeur peut ne pas inscrire les heures de travail réelles du moment qu’il a passé un « accord » collectif étendu (par Combrexelle !) qui indique les modalités de la « quantification préalable » du travail en fonction « du secteur géographique sur lequel s’effectue le travail, de la part relative dans ce secteur de l’habitat collectif et de l’habitat individuel, du nombre de documents à distribuer et du poids total à emporter ».
Voilà à quoi va ressembler la « simplification » qu’on nous promet, l’allègement du code du travail qui va surtout alléger les salaires.
D’autant que Combrexelle a d’autres idées. Pour rappel, les salariés au forfait, surtout les cadres mais pas que (aujourd’hui plus de 10 % des salariés), c’est quoi leur salaire horaire quand on fait la division par le nombre d’heures ? Plus que le SMIC ?
Pour les cadres justement mais pas que, Combrexelle évoque tout ce qui est rémunérations variables, en dehors des minima, ce qui relève des contrats de travail individuels ou des « accords » par exemple et qui, selon Combrexelle, pourraient être développés. De même pour les rémunérations qui ne sont pas considérées comme des salaires (intéressement, participation) ; échappant aux cotisations sociales et permettant précisément à certains employeurs d’éviter des augmentations de salaire.
3/ Les conditions de travail
Premier mensonge, Combrexelle affirme qu’on est là dans le domaine des normes communautaires (« un corpus communautaire très imposant ») dont l’application certes nécessaire, est très contraignante pour les entreprises ». C’est le contraire et Combrexelle, qui a supervisé la réécriture du code en 2007 le sait bien. Ce qui est contraignant pour les entreprises ce sont les limites chiffrées (exemple : la manutention des charges) fixées par décret. Le non respect des « normes » européennes, élaborées par les employeurs pour les employeurs, d’une part ne peut être sanctionné et elles s’avèrent peu protectrices dès qu’un intérêt patronal les détermine. Exemple : en 2007 a été supprimé le règlement qui, pour les femmes, fixait à 60 Kg véhicule compris la charge maximale pour pousser ou traîner ds véhicules à quatre roues. En 2011, la France (l’INRS) a adopté la norme européenne unisexe qui fixe cette limite de charge à 400 Kg sans préciser si elle s’applique aussi en cas de sol non lisse et/ou de pente. Les 400 Kg n’ont pas été choisis au hasard, ils correspondent exactement au poids maximal en charge des containers poubelles standard de 600 L qui fleurissent le continent européen depuis que l’on a inventé une mécanisation pour les éboueurs. Les employeurs et la sécurité sociale, appelés au tribunal des affaires de sécurité sociale saisi par les femmes des entreprises de nettoyage dont le dos et la vie sont brisées, arrivent en disant : on a droit à 400 Kg ! et 600 L, à la densité moyenne des déchets (entre 0,1 et 0,4) avec une poubelle à vide de 45 Kg, ça ne dépasse pas 300 Kg…alors peu importe la pente, les obstacles des trottoirs. Voilà le monde merveilleux des normes. Pour être complet sur cet exemple, il faut ajouter qu’on peut se dispenser des normes quand elles ne conviennent pas aux employeurs. La même norme unisexe fixe à 25 Kg le maximum pour le port de charges…mais la France n’a pas supprimé pour les hommes la limite, règlementaire cette fois, de 55 Kg (et 105 Kg avec avis médical).
Deuxième mensonge, Combrexelle dit qu’il est possible d’ouvrir de fructueuses discussions (« Il conviendrait en conséquence d’être plus précis sur la place de la négociation collective sur la question des modes d’organisation du travail ») sur des domaines échappant à l’Union européenne, et de citer les « troubles musculo-squelettiques » et les très mal nommés « risques psychosociaux ».
L’expérience de tous les représentants du personnel, notamment sur les « risques psychosociaux », c’est que pour eux la santé est une exigence et pour l’employeur un coût (pas seulement financier pour les « risques psycho-sociaux ») et que toutes les discussions et autres plans de prévention et formation à la résistance au stress n’ont pour seul effet que de faire perdre leur temps aux salariés et de dégager la responsabilité des employeurs quand il ne s’agit pas de la faire retomber sur les salariés eux-mêmes.
Proposition 31 :
1/ Transformer les discussions de la proposition 30 en négociation sur la « responsabilité sociale des entreprises ». Bonne idée les labels existent déjà, on va à pas cher pouvoir vite transformer les « négociateurs » en publicitaires.
2/ Entamer « avec un mandat de la loi » des négociations sur l’ « économie digitale ». Le rapport, sans parler le moins du monde de cette mystérieuse « économie digitale » propose dans cette partie que la négociation permette « d’avoir recours à de nouvelles formes de contrats de travail ou d’instituer des dispositifs nouveaux de transition professionnelle conciliant les exigences de sécurité des salariés et d’adaptation des entreprises, ceci dans un cadre prédéfini par la loi. ».
On comprend qu’il s’agit très certainement des emplois UBER (MACRON ayant fait savoir qu’il ferait des propositions pour que cette nouvelle forme « innovante » trouve sa place légale) et plus généralement du travail sans contrôle de la durée du travail (travail à domicile, salariés en « portage » salarial), le lien entre ces contrats étant l’informatique qui a bon dos pour exonérer l’employeur du respect des règles élémentaires du droit du travail.
Proposition 32 :
Ouverture des discussions pour la répartition des arnaques entre les branches et les entreprises, « dans un premier temps dans les champs prioritaires des accord ACTES », qui sont, on l’a vu les plus importants dans les relations de travail… et dans les économies que les employeurs peuvent faire sur le dos des travailleurs.
Proposition 33 :
« Mécanisme de fusion des branches qui représentent moins de 5000 salariés à une convention collective d’accueil » : des dizaines, voire des centaines d’arnaques potentielles en un seul coup.
Proposition 34 :
« Faculté, par accord majoritaire, de regrouper en deux catégories de thèmes la négociation des accords d’entreprise et de leur fixer une périodicité quadriennale avec clause annuelle de revoyure ».
En clair, « négocier » pour faciliter les futures arnaques et renvoyer à quatre ans les négociations annuelles obligatoires notamment celle qui dérange vraiment les entreprises, celle sur les salaires.
Proposition 35 :
Présentée sous forme d’expérimentation avec bilan dans quatre ans (une technique éventée pour pérenniser en douceur les arnaques), la presque claire affirmation de la supériorité de l’accord d’entreprise, même défavorable, sur l’accord de branche. Et ce dans les jolis « champs prioritaires des « accords ACTES », soit tout ce qui intéresse les salariés et relativise la restriction énoncée par Combrexelle pour l’application de ce nouveau principe destructeur (« Sous réserve de l’ordre public défini par le code du travail et l’accord de branche »).
Propositions 36 et 37, énoncées ainsi :
36. « Assimilation législative de l’accord de groupe aux accords d’entreprise. »
37. « Prévoir que les accords de groupe organisent l’articulation accords de groupe/entreprises/établissements. »
La première proposition (dire dans la loi que l’accord de groupe équivaut à un accord d’entreprise) ne règle pas la définition du « groupe » qui selon Combrexelle posait problème. La conséquence dommageable est que le groupe, qui peut être étranger avec des règles différentes, va, à travers la proposition 37, pouvoir manœuvrer pour fixer les différents niveaux de négociation (groupe, entreprises, établissements) en fonction des sujets traités. A l’inverse de ce que dit vouloir éviter Combrexelle, à savoir la fixation de ces niveaux de façon unilatérale par l’employeur. En effet, comment croire qu’il en ira différemment quand on s’en remet, comme le propose Combrexelle à un « accord de méthode au niveau du groupe» pour les fixer. Le groupe pourra aussi s’assurer que les arnaques sont bien équivalentes à l’intérieur du groupe.
Proposition 38 :
Multiplication et diffusion d’arnaques-type auprès des T.P.E.
Proposition 39 :
Des « dispositifs territoriaux négociés ».
Un gadget pour dire que l’on peut parler de tout dans les « territoires » ou « sites » ou autres « bassins d’emploi », sans que cela n’engage à rien : « Le principe devrait être posé que ces dispositifs s’appliqueraient au territoire concerné sans s’immiscer dans les relations entre entreprise et salariés » « Les dispositions de nature normative que, le cas échéant, ces « dispositifs territoriaux négociés » contiendraient n’auraient d’effet juridique que dans la mesure où elles seraient explicitement reprises dans les accords d’entreprise conclus à l’intérieur du territoire concerné ou dans une décision unilatérale de l’employeur pour les TPE ».
Le seul intérêt est pour les employeurs qui pourront, à travers ce « dispositif » souple donner à leur décision unilatérale la force d’un accord sans qu’un seul représentant du personnel représentatif du « territoire » ait eu un mot à dire.
Proposition 40 :
Encore un gadget pour faire semblant de prendre en compte les intérêts des salariés des multinationales (« filières internationalisées ») tout en ne générant aucune contrainte pour celles-ci : « Le législateur pourrait prévoir le cadre juridique de ces expérimentations, dans le cadre de ce que les spécialistes dénomment parfois « l’entreprise étendue ». « Plaquer ces accords dans un paysage dont les piliers essentiels sont l’accord de branche et l’accord d’entreprise peut être source de grande insécurité en l’absence de toute articulation entre les différents accords ».
Il s’agit de faire comme pour les « comités d’entreprise européen » des grandes entreprises implantées dans plusieurs pays : une coquille vide, sans pouvoirs.
Pour garantir la sécurité des multinationales, Combrexelle prévoit que le ministre de l’économie soit en charge de l’expérimentation au même titre que le ministre du travail.
Proposition 41 :
Propagande pour les délicieuses « bonnes pratiques » des accords transnationaux à mieux intégrer dans les arnaques nationales.
Proposition 42 :
Une proposition limpide pour une fois : l’accord collectif « préservant l’emploi » dissout le contrat de travail individuel. En clair, baisse de salaire et augmentation de la durée du travail « légalisées » si l’employeur met avant la « préservation de l’emploi » ce qui peut toujours être invoqué.
En cas de refus le salarié qui ne veut pas renoncer à son contrat de travail est licencié et ce qu’il advient de lui est si incroyable (enfin pas pour Terra nova qui avait claironné cette solution deux jours avant Combrexelle) qu’il suffit de citer Combrexelle pour voir la dissolution des règles élémentaires du droit et saisir la cruauté de la proposition : « S’il refuse cette situation, ce salarié doit pouvoir être licencié pour un motif économique tenant à la situation de l’entreprise, la cause réelle et sérieuse étant présumée. Le régime indemnitaire serait spécifique à cette situation et devrait être moins attractif que celui prévu par le droit commun en cas de licenciement pour motif économique.
Le refus volontaire du salarié de se plier à la règle négociée commune qui a pour seul objet de préserver l’emploi de la communauté de travail devrait avoir, pour ce salarié, un coût par rapport à l’indemnisation de droit commun dont bénéficie le salarié qui fait l’objet d’un licenciement pour motif économique ».
Proposition 43 :
Généralisation à partir de 2017 du principe selon lequel l’arnaque sera légitimée par des « accords » « majoritaires ».
Proposition 44 :
Une dernière mascarade pour la fin : Combrexelle propose une « large concertation » avec les « partenaires sociaux » sur la « base de ses propositions ».
Une illustration du constat fait plus haut : on ne discute jamais que des exigences du MEDEF.
Une illustration du mensonge à répétition : il n’y a jamais eu pour le droit du travail la moindre concertation réelle, mais des courses (procédures accélérées, ordonnances, 49-3) pour éviter ne serait-ce qu’une discussion qui mettrait en lumière ce dont il est question.
De ce point de vue, la composition de la commission Combrexelle est une caricature de ce que l’on fait quand on veut éviter d’avoir en face des personnes qui connaissent la pratique du droit du travail et peuvent se représenter et décrire les conséquences pour les travailleurs des changements d’ « architecture » et autres euphorisants.
Richard Abauzit