A l’approche du congrès de la CES (Confédération Européenne des Syndicats) organisé à Paris du 29 septembre au 2 octobre 2015, l’UD CGT de Paris a organisé le 27 Août 2015 une Commission Exécutive élargie en présence de Frédéric Imbrecht, responsable confédéral Europe-International.
Vous lirez, ci-dessous, l’intervention, à titre personnel, de Joran Jamelot, secrétaire de l’Union locale CGT du 15ème arrondissement de Paris.
Chers camarades,
Merci au bureau de l’UD de Paris de créer les conditions d’un véritable débat autour des enjeux du congrès de la Confédération Européenne des Syndicats à Paris. Contrairement à l’apparence, il n’est pas déconnecté des enjeux de la rentrée, de la façon dont la CGT peut et doit les aborder. Nous avons tous en tête la force salariée et syndiquée qui s’est exprimée le 9 avril dernier, ses attentes de lutte. Aussitôt après, l’affiliation sur le mot d’ordre européen de la CES, porté aussi par la CFDT et l’UNSA, n’a pas permis de prolonger le 1er mai la dynamique du 9 avril. Celle-ci reste la clef de la riposte, en cette rentrée, à la politique antisociale de Hollande et Valls.
Vu la période de convocation, la Commission Exécutive de l’UL du 15ème n’a pas pu se réunir pour discuter du congrès de la CES. Je m’exprime donc à titre personnel, même si la réunion du bureau et toutes les réactions reçues des sections vont dans le même sens.
D’abord, le programme du congrès choque. Hollande, Juncker, les commissaires européens, les dignitaires du patronat européen comme intervenants: ce n’est pas un congrès syndical, c’est l’université d’été du Medef !
Cette année, aussi parce que le congrès se tient à Paris, à la Mutualité, éclate aux yeux des camarades la différence, l’opposition complète de conception syndicale entre les syndicats de lutte comme la CGT et les syndicats institutionnels de collaboration comme la CES. Dans le communiqué du CCN du 28 mai, on lit que le congrès de la CES « devrait être aussi l’occasion d’unir le syndicalisme dans une posture offensive pour construire un modèle social en rupture avec le libéralisme européen et qui réponde aux attentes des travailleurs. » On a l’impression que la direction confédérale s’efforce de tordre la réalité mais elle ne peut pas y parvenir devant l’évidence.
La secrétaire générale sortante de la CES, la Française Bernadette Ségol, est une technocrate jusqu’à son élection à la CES inconnue du mouvement syndical français. Va lui succéder un autre technocrate, Luca Visentini, issu de l’UIL syndicat italien créé par la CIA contre le syndicat révolutionnaire, notre homologue la CGIL à la Libération. Elle avait elle-même succédé au Britannique John Monks, devenu Lord Monks, puisqu’il a été fait Lord par la Reine d’Angleterre, qui n’est pas non plus précisément une travailleuse…
Et ce n’est vraiment pas une question de principe ou de culture différente mais une contradiction systématique. On le voit sur les sujets brûlants. Quand nous combattons la perspective du TTIP euratlantique, la CES y voit – je cite – « un appel à un accord de commerce UE-USA qui bénéficie aux citoyens ».
Au sujet de la Grèce, avec les syndicats grecs publiquement dirigés par les socio-démocrates et la droite, la CES s’est faite le chantre de la défense à tout prix de la dépendance à l’UE et à l’euro. La CES est conforme à sa raison d’être de défendre le modèle européen de l’UE du capital.
Comment ne pas se souvenir de son action de groupe de pression pour le projet de constitution européenne en 2005 contre la position collective finale de la CGT notamment ? Comment ne pas rappeler les ingérences de Lord Monks dans la vie syndicale irlandaise pour casser le NON au traité de Lisbonne. Comment ne pas repenser au point d’appui trouvé dans la CES par Raffarin et Sarkozy pour faire passer en France la casse du statut EDF-GDF puis la privatisation ? On pourrait multiplier les exemples sur la réforme ferroviaire, etc.
Là où CGT nous analysons un appareil systématique coordonné de casse des acquis sociaux, la CES promeut un socle social européen. Il est temps que cette contradiction totale éclate. Non – le congrès de Paris l’illustre – la CGT n’est pas en train de changer la CES ! Mais, la CES est peut-être en train de changer la CGT. La question de la CES n’est pas une question extérieure : elle rejoint les questions fondamentales posées avant le congrès confédéral.
Vu la provocation que représente le programme du congrès de la CES à la Mutualité, je propose que l’UD de Paris décline l’invitation à y assister et le fasse savoir publiquement.
Au-delà, je fais partie de ceux qui demandent l’ouverture dans l’UD avant le congrès confédéral d’une tribune particulière sur l’intérêt et les inconvénients pour la CGT de rester membre de la CES.
La CGT a un rôle à jouer dans la renaissance d’une internationale syndicale de lutte de classe. Ça ne se fera certainement pas avec la CES ou la CSI !
source : http://www.frontsyndical-classe.org/2015/09/le-congres-de-la-ces-a-paris-une-universite-d-ete-du-medef.html