Union du peuple : ça passe par une lutte déterminée contre le terrorisme, l’impérialisme et les politiques d’austérité et de régression sociale !
Le Front Syndical de Classe se joint aux nombreuses organisations qui ont dénoncé les crimes horribles perpétrés vendredi 13 novembre contre des citoyens et travailleurs français, revendiqués par Daesh.
Le FSC exprime sa compassion pour les victimes et leurs familles. Il dénonce avec la même force les attentats perpétrés contre tous les citoyens de nombre d’autres pays eux aussi touchés par des actes terroristes revendiqués par Daesh.
Mais ces dénonciations ne serviront à rien si elles ne débouchent pas sur une modification radicale des politiques qui sont à l’origine de ces massacres de populations ici ou ailleurs notamment dans les pays du Proche Orient, premières victimes parmi les autres.
Les organisations syndicales de France et d’ailleurs ont le devoir d’informer sans concession les travailleurs de la réalité des responsabilités des gouvernements des pays du commandement intégré des forces de l’OTAN, y compris des gouvernements français successifs, durant ces dernières années.
Au plan intérieur : Des institutions françaises de plus en plus affaiblies par des contradictions de plus en plus évidentes
Ces attentats perpétrés dans différents pays soulèvent un peu plus chaque jour les contradictions dans lesquelles se débattent les pouvoirs publics, la classe politique des partis de l’alternance et leurs satellites.
La puissance administrative gouvernementale prend inexorablement le pas sur l’autorité judiciaire, de plus en plus mise mal dans l’exercice de ses prérogatives, battant en brèche chaque jour un peu plus le principe constitutionnel fondamental de séparation des pouvoirs. Ces reculs que le gouvernement français entend conforter par une réforme constitutionnelle, constituent clairement un levier supplémentaire de renforcement du contrôle et de mise au pas des travailleurs au service des intérêts du grand capital, dans un contexte d’usure accélérée du pouvoir en place et de délégitimation croissante des pouvoirs publics et des institutions de la cinquième République.
La politique étrangère, une question clé pour la sécurité de la population et pour le progrès social
La situation intérieure à la fois en matière de politique sociale et de sécurité ne saurait donc être appréhendée indépendamment de la situation extérieure et de la politique internationale des gouvernements successifs de la France :
- Le président de la République dispose de pouvoirs exorbitants : sans consulter personne (pas même le parlement) il peut engager le pays dans n’importe quelle aventure guerrière, et ni Sarkozy, ni Hollande ne s’en sont privés.
- Ces décisions ont un coût majeur en matière de budget au détriment des politiques publiques, des politiques sociales. Sait-on que le tir du moindre missile c’est 100.000 euros, tandis que le système hospitalier dont on vient de mesurer massivement l’utilité pour la population civile est soumis aux restrictions massives, à la rentabilité marchande.
- Le manque de transparence des décisions du pouvoir en matière de défense masque à l’opinion comment ce pouvoir agit à l’extérieur, en vue de la défense de quels intérêts et avec quels alliés.
Nos gouvernements prétendent agir internationalement au nom de la défense des droits de l’homme et de la défense des populations civiles et combattre les dictatures et combattre résolument le terrorisme à l’étranger.
Combattre les dictatures ?
Alors comment justifier notre alliance de fait et nos ventes d’armes massives à l’Arabie saoudite quand pour s’en tenir à cela, cette dernière piétine les droits des femmes avec des lois d’un autre âge, condamne un écrivain, pour son expression, à 1000 coups de fouet sur la place publique, décapite au sabre la tête de condamnés à mort, 143 à ce jour pour la seule année 2015, et que le Président Hollande a rencontré ses dirigeants à plusieurs reprises en 2015 sans aucune espèce d’allusion à ces méfaits ?
Davantage préoccupé de vendre des armes à la dynastie des Saoud accueillis cet été dans le Vaucluse de manière outrageusement et honteusement privilégiée!
Combattre le terrorisme à l’étranger ?
Le gouvernement a engagé depuis trois ans les forces armées nationales sur plusieurs théâtres d’opérations militaires, au motif d’un pseudo droit d’ingérence humanitaire dénué de toute base légale, en contradiction ou dérogation unilatérale avec toutes les règles de droit international et décisions de l’Organisation des Nations Unies. Ce ne serait là seulement qu’arrogance si ce droit d’ingérence ne masquait en fait bien d’autres motivations inavouables et pourtant si bien connues : le vol des ressources énergétiques des pays du proche Orient et la destruction des États refusant de se soumettre aux diktats des-dites grandes puissances..
Quel cynisme ! Alors que le Ministre Fabius jusqu’à peu considérait que la branche syrienne d’Al Qaida « faisait du bon boulot, » alors que le camp occidental s’est bien gardé jusqu’à peu de frapper les sources de financement de l’OEI , en particulier par la vente du pétrole transitant par la Turquie par file de camions massives de crainte, disait-on hypocritement, de faire des victimes civiles.
Non jusque-là le gouvernement français comme les occidentaux n’a eu qu’un objectif majeur : imposer le départ de Bachar El Assad, intervenir pour cela en Syrie sans aucun mandat international et donc en violation de la Charte de l’ONU, cofinancer à cette fin des groupes terroristes baptisés pour la circonstance « modérés » comme au temps du soutien en Afghanistan où les talibans étaient baptisés « combattants de la liberté », l’objectif majeur étant alors d’abattre l’URSS…
On connaît la suite…
La lutte pour la paix
Oui, il est du devoir du mouvement syndical de se battre pour la paix, indissociable de la lutte pour la démocratie et le progrès social.
Mais cette lutte ne saurait se réduire à de vagues incantations sans s’appuyer sur une analyse concrète et précise des enjeux de l’heure et des responsabilités dans l’actuelle situation. Dans l’immédiat et dans l’urgence cette lutte passant par l’émergence d’une solution politique en Syrie pour ne rien dire du drame séculaire des Palestiniens.
De différents côtés (Hollande à l’Assemblée générale de l’ONU le 28 septembre dernier et Guetta sur France Inter) les gouvernements des pays de l’OTAN tentent de faire porter au régime Syrien la responsabilité de l’existence et de la croissance de Daesh. Ce mensonge d’État ne résiste pas à un examen sérieux des faits. Et ce n’est pas soutenir inconditionnellement ce régime que de dire que cela est un véritable travestissement de l’histoire.
La déstabilisation de cette région d’où émerge Daesh est incontestablement le résultat de l’intervention américaine en Irak en 2003, de celle de Sarkozy en Lybie, de soutiens logistiques , de financements directs et fourniture d’armes par les États-Unis, la France, l’Arabie saoudite, le Qatar, la Turquie, Israël …
En détruisant les structures étatiques de ces pays ce n’est pas la démocratie qui s’est installée mais le chaos propice au surgissement des forces les plus obscurantistes.
Et ce sont les « fruits » de cette politique dont nous faisons les frais, dont notre peuple fait les frais !
La lutte pour la paix dans notre pays doit donc s’appuyer sur la dénonciation de ces responsabilités et l’intervention de l’opinion pour la mise sur pied d’une coalition internationale s’attaquant cette fois réellement à Daesh, tout en s’attachant sans faillir à la mise en œuvre d’une réelle solution politique en Syrie et l’ensemble du Proche Orient. Cela passe par un arrêt des combats, un assèchement des sources de financement et de fourniture d’armes, et surtout un compromis entre les acteurs nationaux réellement opposés à la dictature obscurantiste de Daesh.
Le gouvernement français et ses sous-fifres médiatiques essaie de faire croire que la Russie a changé de politique alors que c’est le gouvernement français sous la pression des événements qui semble s’engager dans la grande coalition proposée par la Russie dès son intervention militaire en vue dans la foulée d’une solution diplomatique au conflit.
A gauche et chez un certain nombre de pacifistes c’est le « Ni Assad, ni Daesh » qui fait florès. Mais que l’on sache – quoi que l’on pense de son régime – ce n’est pas Assad qui commandite des attentats en France et un peu partout !
Et finalement toute cette prétention à incarner les droits de l’homme et à décider de l’extérieur qui doit diriger des pays qui ne sont pas les nôtres au nom du droit d’ingérence si cher à Kouchner, à BHL et à Glucksman n’est-elle pas idéologiquement dans la continuité de toutes les interventions coloniales d’antan, au nom bien sûr de la supériorité de la civilisation occidentale ?
Et n’est-il pas temps de tirer en tout cas les enseignements de ce que ces interventions et ce droit d’ingérence ont semé comme désordres, comme crimes et comme instabilité généralisée ?
Seul le respect de la souveraineté des états comme principe des relations internationales est de nature à assurer davantage de stabilité et de sécurité dans le monde… et donc à faire progresser les droits de l’homme en privilégiant l’intervention autonome des peuples et non pas le droit à l’ingérence des grandes puissances !
Le double sens de l’état d’urgence
Nous ne contestons pas les nécessaires mesures pour assurer la sécurité des français.
MAIS !
Pour le peuple Français, après les politiques d’austérité, l’heure est donc à de nouvelles restrictions des libertés publiques et individuelles, déjà engagées depuis de nombreux mois et au renforcement des frappes militaires contre Daesh, pour le financement desquelles le « pacte de sécurité » s’impose désormais au « pacte de stabilité », avec le quitus des institutions antidémocratiques bruxelloises et de la troïka. Quant au Parlement Français il s’en trouve réduit à son rôle désormais habituel de supplétif, spectateur de la politique extérieure, comme il l’est devenu sur la quasi-totalité des domaines de politique intérieure, désormais sous contrôle des institutions anti démocratiques de l’U€.
Pour donner le change face à ses mandants légitimement soucieux de leur sécurité, le gouvernement Hollande-Vals se voit dans l’obligation de remettre des contrôles aux frontières du pays, ou du moins de communiquer en ce sens. Mais la remise en question des accords de Schengen n’est pas à l’ordre du jour. L’Union Européenne, toujours abusivement appelée « l’Europe » par ses promoteurs, ne saurait être contestée : la libre circulation des marchandises, des capitaux et des personnes doit impérativement se poursuivre, pour le plus grand bonheur du grand patronat. Qu’il soit Français, Allemand ou d’un autre pays de l’U€, celui-ci se félicite de l’arrivée de centaines de milliers de migrants dans un grand désarroi, tout prêt à vendre leur force de travail à encore moins cher que les populations autochtones. Ces vagues d’immigration de population fuyant le désastre de leurs vies ravagées par des combats de plusieurs années et des structures étatiques en lambeaux vont ainsi permettre au patronat des grands monopoles de disposer de leviers supplémentaires pour organiser encore plus de concurrence entre les travailleurs, détruire un peu plus vite, encore plus facilement, nos conquis sociaux et ainsi baisser la rémunération de la force de travail… tandis que les actionnaires des multinationales continuent de voir exploser leur rendement actionnarial et financier.
Pour s’en tenir à un seul exemple on voit bien comment à partir du choc provoqué par les événements comment dans les partis de l’alternance et au gouvernement en place, la demande de renforcement de la sécurité et donc des moyens matériels et budgétaires attribués aux diverses forces de sécurité est utilisée pour accentuer et aggraver le sort réservé à la population et mettre en cause les moyens publics; tel intervenant dans les médias se plaignant des 35 heures, des grèves et tel porte-parole de l’armée se plaignant lui du nombre de cheminots comparé aux effectifs militaires !
La liquette déchirée d’un cadre d’Air France est sur-médiatisée. Mais silence est fait sur la croissance continue et scandaleuse des grandes fortunes, le « salaire » des PDG, notamment ceux d’Air France, la distribution de dividendes toujours plus importants aux actionnaires et donc sur l’opportunité – la nécessité – de les mettre à contribution eux d’abord et eux exclusivement. Ce qui implique une révision totale des politiques menées et par la droite et par le gouvernement dit socialiste, d’en finir avec l’austérité et les contre-réformes s’attaquant à tous les conquis de la Libération et du programme du Conseil National de la Résistance.
Dans un tel contexte, quel est le sens de la journée nationale d’action du 2 décembre?
A l’occasion de son récent CCN du 17 et 18 novembre, la CGT a déclaré : « Pas plus qu’il n’y a de trêve dans les attaques contre le monde du travail, il n’y aura de trêve dans l’action syndicale pour le progrès social ». Le FSC se retrouve dans cette déclaration, qui tranche d’ailleurs avec la déclaration initiale de l’intersyndicale nationale qui ne disait mot de l’agression gouvernementale contre les conquis sociaux et qui s’inscrivait de fait dans l’esprit de l’union sacrée, appelée de ses vœux par le gouvernement Français. Cette nouvelle déclaration de la CGT marque une pertinente opposition aux tentatives du gouvernement d’asseoir son emprise sur toutes les organisations syndicales confédérées et de les associer aux politiques sécuritaires, en plus des politiques d’austérité.
Alors que les organisations syndicales, notamment la CGT, devraient être à l’initiative d’une résistance farouche aux politiques rétrogrades et réactionnaires mises en œuvre sous pilotage serré de Bruxelles, de la troïka, et de l’OTAN, c’est à dire de l’oligarchie financière, le contenu de l’appel du CCN doit nous interroger sur certains aspects.
En effet, dans le même appel à organiser une journée nationale d’action le 2 décembre prochain, le CCN s’en tient au thème un peu vague du « NON à la violence sociale, OUI à l’efficacité économique, sociale et environnementale » alors que le 2 décembre incluait :
- la question de l’emploi
- La retraire à 60 ans à taux plein
- Les Libertés Syndicales
- Les salaires, les pensions et les minimas sociaux
- La reconnaissance des métiers pénibles
- Le développement industriel et des services publics
Et surtout l’appel initial comportait la dimension de la lutte contre la répression syndicale et le soutien aux salariés d’Air France avec l’appel à une manifestation devant le tribunal d’instance de Bobigny à partir de 12 heures ils sont traduits sur demande des dirigeants d’Air France !
Alors qu’est-ce qu’on fait exactement le 2 décembre?
Le FSC soutient d’ailleurs les initiatives locales et départementales qui existent dans le pays pour manifester le 2 décembre devant les préfectures en soutien aux camarades d’air France.
L’union sacrée, pour le plus grand malheur de la classe ouvrière
On sait ce qu’elle représente historiquement pour la classe ouvrière et comment, pour s’en tenir à la première guerre mondiale, elle a signifié l’abandon des objectifs de paix et le ralliement aux intérêts des classes dominantes et à la grande boucherie.
Et c’est cela qui rend suspect l’appel à l’union nationale, les travailleurs perdant de vue leurs propres intérêts et ceux du peuple en s’en remettant aux objectifs des classes dominantes, banquiers et marchands de canon, propriétaires des grands médias privés.
Contre l’Union sacrée gouvernementale les organisations syndicales non réformistes ont le devoir d’organiser les conditions de l’union du peuple sur d’autres bases, des bases de lutte de classe, à savoir :
combattre les divisions, rassembler contre une véritable tentative d’installer un climat de guerre civile, ; en permettant de bien identifier les responsables de ces atrocités plutôt que de désigner un bouc émissaire, un ennemi intérieur que seraient les musulmans ou les immigrés dans leur ensemble ; dérives dangereuses qu’il faut combattre dans la cité, dans les entreprises, dans les quartiers, dans les universités et les lieux scolaires… Sans déléguer, comme c’est devenu récurrent, la mise en œuvre de cette tâche aux instances religieuses, signe inquiétant d’une communautarisation des enjeux publics et d’un recul de la laïcité.
Les moyens et les mesures de l’état d’urgence doivent être tournés exclusivement contre les terroristes et ne servir sous aucun prétexte à museler le mouvement social et ce qu’il reste de démocratie dans notre pays.
Nous alertons également sur l’institutionnalisation de l’État d’urgence, promis à devenir une modalité courante de gestion du pouvoir et qui risque de favoriser la transformation de notre pays en état policier comme le souligne le Syndicat de la Magistrature, tout en intimidant le mouvement ouvrier alors que l’offensive antisociale ne va pas ralentir.
C’est dire que l’action des travailleurs contre la répression syndicale comme à Amiens pour les Goodyear ou à Air France doit rester à l’ordre du jour comme la nécessité du développement de l’action contre toutes les agressions et les régressions qui demeurent à l’agenda gouvernemental (code du travail, précarisation généralisée, financement de la protection sociale, santé …).
En ne renonçant pas aux manifestations dans l’espace public!
Hommage aux services publics : monsieur Hollande, des actes !
C’est dire aussi que l’agression contre les services publics doit cesser, tout comme l’entreprise de privatisation rampante, notamment celle des aéroports par exemple.
Car s’il est un des enseignements que l’on peut aussi tirer des actuels événements c’est bien leur rôle comme on a pu le constater avec la mobilisation exemplaire des hôpitaux parisiens au service des victimes de l’attentat du Bataclan. Et l’hommage qui a été en cette occasion rendu au personnel devrait d’abord se traduire par l’abandon de la réforme Hirsch qui s’en prend directement aux personnels en application du pacte Hollande-Vals de responsabilité, lui-même déclinaison du pacte budgétaire européen !
Notre devoir
Le système capitaliste porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage expliquait déjà Jaurès. Aujourd’hui plus que jamais, ce système économique en crise permanente allie guerre sociale à l’intérieur et guerres impérialistes à l’extérieur, déchaînant destructions, misère, pillages.
Oui nous devons renouer avec les grandes traditions du mouvement ouvrier et syndical de la lutte pour la paix, non pas dans le flou des dénonciations sans contenu véritable mais en désignant nommément les fauteurs de guerre, les bénéficiaires du chaos actuel, les marchands d’armes dont notre pays qui se situe au troisième ou quatrième rang mondial et qui de ce fait ajoute le malheur aux malheurs du monde !
Les organisations syndicales qui ont une visée transformatrice ont plus que jamais le devoir de ne plus rester sur des positions défensives. Elles doivent être porteuses de propositions permettant d’ouvrir de nouvelles perspectives de transformation sociale et de dépassement du rapport d’exploitation capitaliste, notamment en promouvant de nouvelles formes de socialisation des moyens de production. Ces perspectives ne pourront advenir qu’à la condition qu’elles redeviennent concrètement des organisations de masse. Les travailleurs ont besoin de retrouver de la confiance pour y adhérer et prendre leur part active dans l’organisation syndicale et contribuer collectivement à l’élaboration de revendications sociales émancipatrices.
Elles doivent prendre au plus vite les dispositions permettant de reconquérir leur indépendance vis à vis des forces du capital et de renouer avec une politique syndicale internationaliste à la hauteur des enjeux actuels. Cela passe entre autre par une rupture claire notamment avec la Confédération Européenne des Syndicats.
Le Front Syndical de Classe
19 novembre 2015