LES SYNDICATS QUI DISENT « ATTENDRE DES ACTES » DU NOUVEAU MINISTRE DOIVENT EUX-MÊMES PRÉPARER L’OFFENSIVE POUR LA FIN D’ANNÉE SCOLAIRE ET LA RENTRÉE
par la commission Éducation du PRCF – 25 mai 2022
L’éjection du méprisant, incompétent et maltraitant Jean-Michel Blanquer du ministère la rue de Grenelle était attendue comme la moindre des politesses par le monde enseignant et il est lamentable qu’aucun grand syndicat enseignant n’ait eu le cran d’exiger, quand ce personnage malfaisant était encore en capacité de nuire, la démission de cet Attila du bac national, du groupe classe, des séries identifiée, du lycée à la française et de nombre de disciplines (les maths, la philo…), ni de dénoncer les faux-semblants du « dialogue social » sans contenu qu’avait mis en place ce personnage ultra-autoritaire et proche de l’extrême droite.
La nomination de l’intellectuel Pap N’Diaye au ministère de l’Éducation nationale est d’abord un outil électoral visant à « gauchir » l’image du gouvernement très droitier de Macron-Borne tout en tentant de freiner la fronde montante des enseignants. Un monde enseignant que l’empilement de contre-réformes néolibérales sur fond d’euro-austérité salariale a placé aux portes de l’exaspération, voire du désespoir professionnel et du découragement.
Tombant dans la diversion voulue par le pouvoir, la pseudo-gauche bobo type « Libé » s’extasie sur le parcours intellectuel du nouveau ministre tandis que la droite et l’extrême-droite lui tombent dessus sur les bases grossièrement réactionnaires attendues. Nous ne nous plaindrions pas pour notre part si le nouveau ministre combattait autrement qu’en paroles les discriminations et inégalités de tous ordres qui gangrènent la société française et son école malgré l’engagement républicain de nombre d’enseignants qui accomplissent leur mission en subissant le mépris de l’institution. En effet, nous ne confondons jamais, ni l’universalisme républicain véritable, qui est lutte frontale contre toutes les inégalités socioculturelles avec l’universalisme de façade que cultive la droite sur fond de xénophobie de plus en plus assumée.
Oui, les élèves de France doivent se réapproprier l’histoire, histoire de France et histoire universelle. Cela nécessite d’en finir avec le formatage anticommuniste et antisoviétique des manuels scolaires, avec la propagande européiste, patronale et militariste institutionnalisée. Cela implique d’éviter à la fois la rechute immature dans le « roman national » mythique et le formatage « post-national » que valorise l’institution entièrement tournée vers la « construction » européenne qui détricote notre pays. Cela commande aussi de rompre avec l’anglomanie générale qu’encourage l’institution aux dépens de la langue commune de la République, le français. Enfin, l’amour de la France et la formation de la conscience républicaine n’impliquent nullement, quoi qu’en disent Zemmour et Cie, que les programmes fassent l’impasse sur la honte de l’esclavage, du colonialisme et de Vichy pourvu que soient aussi chaleureusement mis à l’honneur les engagements généreux que ces fléaux ont suscité pour les combattre, que ce soit en France ou dans son ex-empire colonial. Les jeunes Français doivent par ex. connaître les noms de Toussaint Louverture et de Robespierre, qui promulgua le premier décret d’abolition de l’esclavage, comme ils doivent connaître l’action des militants communistes et des autres anticolonialistes de France, d’Indochine, d’Algérie, d’Afrique subsaharienne, qui combattirent le colonialisme dans l’esprit universaliste d’Engels déclarant: « un peuple qui en opprime un autre ne saurait être libre ».
Il reste que le sujet principal, s’agissant de l’avenir de l’école, c’est le DÉLABREMENT de l’Éducation nationale ravagée par l’euro-austérité et par l’accumulation pluri-décennale des contre-réformes comme l’ont du reste été l’ensemble des services publics dévastés depuis trente ans de « construction » maastrichtienne: hôpital, poste, SNCF, EDF, Équipement, sapeurs-pompiers, etc.
D’urgence il faut massivement augmenter les salaires des enseignants et les réindexer sur les prix comme c’était le cas avant que la triste équipe Mitterrand-Mauroy-Delors-Le Pors n’eût détruit l’échelle mobile des salaires et des prix en 1983 pour engager la marche au « franc fort » et à la monnaie unique calée sur le mark; c’est principalement cette contre-réforme engagée par le PS et ses satellites qui a provoqué le décrochage rapide des salaires et des pensions, alors que parallèlement s’envolaient les dividendes des actionnaires;
D’urgence il faut exiger l’abrogation des contre-réformes Blanquer du lycée et cesser de prendre pour acquises les contre-réformes Jospin-Allègre, Fillon-Darcos, Chatel, et, à l’université, les contre-réformes dévastatrices Pécresse-Fioraso-Vidal. Ces contre-réformes résultant de l’alignement européen et « transatlantique » de la France ont gravement érodé l’école publique, déboussolé les professeurs, institué les ruineux passages automatiques d’une année sur la suivante sans aucune exigence d’acquis, détruit le goût de l’effort sous prétexte d’une fausse « bienveillance » sur fond de maltraitance institutionnelle des enseignants. Soi-disant motivées par la « démocratisation » de l’école, ces contre-réformes n’ont rien produit d’autre que la fuite massive des enfants issus des couches moyennes vers l’école confessionnelle sur fond de baisse générale du niveau scolaire (camouflée par la baisse des barèmes du bac) et d’exacerbation des inégalités sociales, génériques et territoriales. L’euro-austérité, les contre-réformes néolibérales détruisant le caractère national des diplômes (à commencer par la grande braderie du bac en contrôle continu local), la baisse pseudo-démocratique des exigences scolaires (jusqu’à Blanquer faisant des maths une option en lycée!), l’introduction massive de l’enseignement non pas DE l’anglais mais EN anglais pour la partie des élèves devant former la future « élite » post-nationale, voilà M. N’Diaye nombre de facteurs massifs et lourds des discriminations que vous devez combattre sans vous en tenir à des généralités « sociétales ». À l’arrière-plan de la casse scolaire, il y a aussi bien sûr l’euro-démolition de l’appareil industriel français (privatisations/délocalisations…) et de l’agriculture paysanne avec tout ce que cela a comporté de marginalisation pour les enfants des couches populaires, qu’ils soient nés ou pas dans notre pays. Car, M. Pap N’Diaye, comment un pays qui se désintègre sous la poussée de ses élites euro-atlantistes, pourrait-il, même s’il le voulait, intégrer ses minorités discriminées?
Il faut aussi exiger que Macron et Cie en finissent avec la politique de casse du statut des fonctionnaires, avec la précarisation galopante du corps enseignant, avec l’érosion méthodique des maigres avantages en nature dont jouissent encore les enseignants (dont les vacances, absolument nécessaires eu égard aux conditions de travail éprouvantes, pourquoi ne pas le proclamer, Mmes et MM. les responsables syndicaux?), avec le recul incessant de l’âge de la retraite sous menace de lourdes décotes pour ceux qui arrêtent parce qu’ils n’en peuvent plus, avec à l’arrivée un grand nombre d’enseignants, et surtout d’enseignantEs réduits à la pauvreté après une vie de service et d’astreintes multiples, sans parler des attaques honteuses que la droite macroniste et non macroniste (celle des LR notamment, les Pécresse, Retailleau, Ciotti, etc.) ne cesse de lancer contre les professeurs en particulier et contre les fonctionnaires en général.
Il est encore possible, Mmes et MM. les dirigeants syndicaux nationaux, notamment à l’approche des examens de fin d’année, de lancer dans le pays une grande campagne d’information sur toutes ces questions, et plus encore d’arrêter des actions fortes, résolues, construites dans le temps pour obtenir ce que ce gouvernement, qui a de l’argent pour nourrir l’escalade irresponsable en Ukraine, mais qui n’en a pas pour les personnels, pour les salaires, pour les pensions et pour les services publics, ne lâchera jamais sans un rapport des forces qui l’y contraigne. N’oublions pas, enseignants, puisque aucun de vos syndicats arrimé à la sacro-sainte « construction » européenne ne vous le dit, qu’entre 2011 et les débuts de la pandémie virale, la Commission européenne a sommé 62 fois les gouvernements français, qui ont obtempéré avec zèle, de « réduire ses dépenses de santé » avec le joli résultat qu’on a vu sur les capacités hospitalières. Et il en va de même, pour tenir à tout prix sur l’euro et sur le réarmement massif de l’UE arrimée à l’OTAN, ce prédateur planétaire déguisé en berger des peuples, à l’encontre de toutes les dépenses publiques, services publics, salaires des fonctionnaires, retraites, remboursement des soins.
Sortant tout sourires de leur première rencontre avec N’Diaye, les responsables syndicaux ont dit « attendre des actes ». Mais c’est des directions syndicales elles-mêmes qui, pour ne jamais se heurter à la « construction » euro-atlantiste chère à la fausse gauche, ont laissé l’Éducation nationale se délabrer sur tous les plans depuis trente ans que nous, enseignants, parents d’élèves, lycéens, étudiants, militants d’une laïcité universelle véritable (et non pas tournée contre UNE seule religion) attendons, non pas des actes, mais un véritable plan d’action.
Entre l’euro-austérité et la reconstruction de l’Éducation nationale il faut choisir, comme il faut choisir entre la marche au surarmement et à la guerre mondiale et la renaissance de services publics dignes de ce nom au service d’un avenir humain !