Déclaration du PRCF du 5 mars 2023
Il y a 70 ans, le 5 mars 1953, mourrait Staline, qui fut considéré en son temps par de Gaulle et Churchill comme un « grand chef d’Etat ». Et pour cause : celui qui succéda à Lénine mena la collectivisation des terres via les kolkhozes et l’industrialisation massive qui permit la victoire contre l’Allemagne nazie, et ce tout en favorisant l’alphabétisation, la laïcisation et l’urbanisation. A la suite de Lénine, l’URSS de Saline devint ainsi une puissance en rupture avec l’archaïsme tsariste et en mesure de se confronter avec l’ordre capitaliste, en dépit de l’encerclement visant l’URSS depuis l’arrivée au pouvoir des bolcheviques en 1917.
Pourtant, encore aujourd’hui, Staline continue d’être résumé aux seuls « goulag », « totalitarisme » et autres « jumeau d’Hitler », au point même que la victoire de Stalingrad tombe dans l’oubli le plus total – sauf pour les militants franchement communistes du PRCF – du fait d’une atmosphère négationniste assimilant toujours plus le socialisme soviétique au nazisme hitlérien.
En 2010, le PRCF adoptait à l’unanimité moins deux voix d’abstention une résolution à propos de Staline, figure de proue favorite de tous les anticommunistes primaires pour attaquer l’URSS et l’ensemble du Mouvement communiste international, y compris l’historique Parti communiste français de Maurice Thorez et Jacques Duclos. Une rhétorique qui, malheureusement, a gagné y compris la direction euro-mutante de l’actuel P« C »F-PGE, en atteste la déclaration du secrétaire national Fabien Roussel affirmant que Staline « n’est pas un camarade ».
A l’heure où montent de manière galopante l’euro-fascisation, la menace d’une conflagration nucléaire sous l’impulsion du belliciste axe UE-OTAN, les attaques répétées contre les conquêtes sociales et démocratiques et la criminalisation du communisme via l’infâme assimilation du communisme au nazisme, il est fondamental de réaffirmer la nécessité de combattre l’anti-stalinisme primaire à l’occasion de la 70e année de la mort de Staline. Car derrière cet anti-stalinisme primaire se cache en réalité un anticommunisme viscéral, qui se propage manière galopante dans les manuels scolaires, dans les universités, dans les médias, au sein des formations politiques (y compris chez des membres du P« C »F-PGE et de la « France insoumise ») et, plus encore, dans les institutions européistes à l’image de l’infâme résolution adoptée le 15 décembre dernier accusant Staline d’avoir commis un prétendu « génocide » en Ukraine en 1933 – résolution adoptée par tous les eurodéputés de France, « Insoumis » à la sauce Manon Aubry inclus.
C’est pourquoi le PRCF avait déjà pris en 2010 une résolution tenant compte des diverses sensibilités de chaque camarade en son sein et qui est, aujourd’hui, plus que jamais d’actualité. Une résolution qui rappelle que : « Pour défendre efficacement le passé communiste, il faut combattre sa diabolisation sans tomber dans l’idéalisation et le déni des contradictions et des erreurs ». Car la diabolisation de l’URSS et du communisme, paradoxe suprême, profite à des anticommunistes comme Vladimir Poutine, qui exploite le passé stalinien tout en attaquant de manière cinglante Lénine et les bolchéviques rendus responsables de la situation actuelle en Ukraine dans le cadre de l’offensive belliciste généralisée de l’Axe UE-OTAN.
Plus que jamais, le PRCF mènera le combat contre l’anti-stalinisme primaire, clé de voûte de l’anticommunisme viscéral et du négationnisme historique ciblant spécifiquement le camarade Staline. Et toujours en ne perdant pas de vue que :
« Notre défense du passé communiste doit s’effectuer les yeux grands ouverts pour permettre au PRCF de faire grandir dans notre peuple l’idée que la révolution socialiste et la dictature du prolétariat que nous voulons pour notre pays seront clairement orientées vers l’objectif final du communisme, c’est à dire : La société sans classes, le dépérissement de l’Etat, le développement de chacun comme clé du développement de tous. »
Combattre l’anti-stalinisme primaire, clé de voûte de l’anticommunisme viscéral et du négationnisme historique
Résolution du CPN du PRCF à propos du débat sur Staline – Septembre 2010 – Unanimité moins deux abstentions.
Le CPN se félicite de la qualité et de la sérénité du débat organisé par « Etincelles » sur le bilan historique de l’URSS à l’époque de Staline.
Sur cette base, la présente résolution a pour but d’unir le PRCF dans le respect des sensibilités qui se sont exprimées sur cette question. Il s’agit à la fois pour le PRCF de combattre fermement la criminalisation du communisme et de montrer qu’il est soucieux de porter la perspective d’avenir du socialisme en partant du principe léniniste de l’« assimilation crique de l’héritage historique ».
En effet, comme le disait Elsa Triolet : « une barricade n’a que deux côtés » ! Cela signifie que le PRCF assume TOUTE l’histoire du Mouvement communiste international, qu’il la défend sans concession contre le négationnisme anticommuniste, dont l’« anti-stalinisme » est l’emblème ostentatoire et le prétexte indigent.. Mais en même temps, la solidarité de principe avec notre passé, comme notre solidarité de classe inflexible avec les pays qui continuent de construire le socialisme, ne signifient nullement l’alignement systématique et a priori sur toute décision prise par tel ou tel dirigeant dans le passé comme aujourd’hui. Comme l’écrivait Clara Zetkin, fondatrice de l’Internationale Communiste et envoyée du Komintern au Congrès de Tours : « discipline révolutionnaire et solidarité internationale, ne sont pas synonymes d’obéissance aveugle, d’applaudissements automatiques, de renoncement à un jugement personnel. Plus un militant a conscience de son devoir révolutionnaire, et moins il se considère comme un stipendié, qui du jour au lendemain, sur ordre, cesse d’avoir du caractère et perd toute faculté d’appréhension. ».
Sur ces bases, le C.P.N. observe :
1°) Que considérables sont les mérites historiques de l’URSS et de l’ensemble des militants et dirigeants bolcheviks à l’époque où Staline était secrétaire général du PCUS.
De grands choix politiques comme la construction du socialisme dans un seul pays, la mise en place et l’exécution de plans quinquennaux audacieux qui firent en quelques décennies de la Russie arriérée des tsars, cette « prison des peuples », un grand pays multinational moderne débarrassé de l’exploitation capitaliste et féodale et du colonialisme, la collectivisation de l’agriculture, la signature du « pacte de non-agression » avec l’Allemagne pour diviser le front antisoviétique des « Munichois », ont été validés par l’histoire dans leur principe sinon toujours dans les moyens trop souvent brutaux qui dans des conditions particulièrement difficiles furent mis en œuvre.
Reste que sur le fond, les choix stratégiques défendus par Boukharine ou par Trotski contre Staline et la majorité des militants bolcheviks de l’époque eussent conduits à la stagnation et à la défaite rapide du socialisme en URSS.
L’impartialité commande également de réexaminer sans a priori les conceptions théoriques de Staline dans différents domaines.
Aussi, le PRCF affirme-t-il clairement que l’URSS était un pays socialiste quand le PCUS était dirigé par Staline, et qu’elle l’est demeurée, malgré des déviations droitières qui sous le prétexte de corriger les erreurs de Staline, furent de plus en plus dommageables, de 1956 à la victoire de la contre-révolution menée par Eltsine et Gorbatchev.
A plus forte raison, le PRCF continuera de rejeter l’infâme amalgame « Staline=Hitler » en rappelant que c’est à Stalingrad, et grâce à l’héroïsme de l’Armée Rouge, de ses soldats venus de toutes les républiques d’URSS et de ses chefs forgés par la Révolution d’Octobre, comme à l’abnégation de ses travailleurs produisant dans les usines surgies des plans quinquennaux un armement de haute qualité, que la Bête nazie a pu être terrassée et que la France a pu être libérée, comme de Gaulle l’a reconnu en 1966 : à Stalingrad il n’y avait pas trois camps mais deux, et tout honnête homme qui voulait battre Hitler luttait nécessairement dans le même camp que Staline, Joukov, Tchouikov, etc….
Le PRCF combat donc avec détermination toute tentative d’assimiler l’URSS libératrice et l’Allemagne nazie tortionnaire des peuples comme deux « Etats totalitaires » en faisant abstraction de leur nature de classe diamétralement antagonique; en occultant le soutien des « démocraties occidentales » à Hitler (politique de Munich, espoir que les nazis allaient vite attaquer l’URSS, « choix de la défaite » par les gouvernements bourgeois français, collaboration, etc.) et en passant sous silence le rôle de la social-démocratie occidentale qui n’a cessé de s’allier aux pires réactionnaires et même d’être en première ligne pour combattre les communistes (non intervention en Espagne, « lâche soulagement » de Blum après Munich, soutien de la guerre antisoviétique en Finlande, décret Sérol punissant de mort les communistes français, etc.).
Toute attaque criminalisant l’URSS, y compris à l’époque de Staline, doit aussitôt entraîner, une riposte cinglante de la part des communistes fidèles à leurs principes, qui, au prétendu « livre noir du communisme » doivent opposer la bibliothèque noire du capitalisme, de l’anticommunisme et de la contre-révolution. De même tout dénigrement du bilan positif de la première expérience socialiste de l’histoire doit susciter une riposte foudroyante sur le bilan catastrophique de la destruction contre- révolutionnaire du socialisme.
Il est certainement nécessaire de pousser la critique de la manière dont Khrouchtchev et son équipe, prétextant l’indispensable remise en cause du dogmatisme et du culte de la personnalité, ont instrumenté la critique de Staline pour promouvoir des conceptions révisionnistes et droitières en matière idéologique, politique, économique, géostratégique et militaire.
Cela ne signifie pas que cette critique n’était pas nécessaire car le culte de la personnalité et les répressions aveugles furent à certaines périodes une tragique réalité, découlant de mesures policières utilisées pour résoudre les contradictions politiques dans le Parti. Mais comme l’avait demandé la direction du PCF en 1956, une telle critique devait se faire sur des bases constructives, à partir d’une réflexion marxiste, en respectant la réalité des conditions historiques de la construction socialiste dans un seul pays, en reconnaissant les mérites de Staline dans cette construction – quelle honte d’avoir débaptisé Stalingrad ! -, sans tomber dans la caricature du nihilisme historique, sans dévaloriser ses apports théoriques (par ex. l’approfondissement de la lutte de classe à l’étape socialiste) et sans nourrir les conceptions social-démocrates et trotskistes.
2°) Reconnaître les mérites de Staline, ne signifie pas que l’analyse marxiste critique du bilan de son action soit assimilable à une déviation droitière ou à un alignement sur des conceptions réformistes.
D’incontestables marxistes, à commencer par Lénine, mais aussi Thorez ou Castro, ont parfois émis des critiques contre Staline, dont l’existence n’exclut pas leurs auteurs du mouvement communiste. La pensée communiste ne saurait se passer de la critique pourvu que celle-ci soit fondée sur la volonté de corriger les erreurs et de faire avancer la cause du communisme.
La principale des critiques politiques vise les méthodes brutales de Staline, et la propension sous sa direction à considérer les opinions divergentes comme des trahisons au risque de diaboliser toute divergence politique au sein du camp communiste et prolétarien et d’en faire un motif de répression. A l’inverse, la discipline révolutionnaire du parti bolchevik quand Lénine le dirigeait, n’a jamais empêché l’exposé libre des divergences à l’occasion des congrès ou dans la presse du parti.
Il était juste également de critiquer radicalement la pesante dogmatisation du marxisme et des sciences – notamment l’absurde théorie jdanovienne des « deux sciences » –, l’attitude religieuse frisant l’idolâtrie envers « le Parti » et les dirigeants soviétiques (et aussi français à la même époque !) qui prévalut longtemps à partir de la fin des années 1930 dans les partis communistes.
Ce monolithisme de commande ne pouvait conduire à long terme qu’à dépolitiser le parti, qu’à affaiblir l’esprit critique du prolétariat, qu’à cultiver la passivité politique du peuple et la délégation de pouvoir au chef omniscient en oubliant le principe dialectique selon lequel « la contradiction est la racine de toute vie et de tout mouvement ».
Ce culte du monolithisme et du suivisme politique eut des conséquences lourdes, même quand la direction du parti fut exercée par des communistes sincères comme Staline, cela est devenu redoutable pour tout le mouvement communiste international quand dans les années 80/90, des renégats comme Eltsine et Gorbatchev en URSS, Schabowski en RDA, Carillo en Espagne, Ochetto et d’Alema en Italie, Hue en France, se sont servi de la culture unanimiste et du suivisme pour faire adopter le cours liquidateur et réformiste, en réprimant les opposants à la liquidation sous prétexte que le Parti ( c’est-à-dire ses dirigeants) « savent ce qu’ils font ».
Au demeurant on ne saurait imputer au seul Staline ces dramatiques déviations. La direction du PCUS de l’époque étant malgré tout collective, même si Staline y joua un rôle décisif.
Il ne s’agit pas de mettre sur le même plan les communistes qui dirigeaient l’URSS à l’époque de Stalingrad et les renégats gorbatchéviens qui ont trahi le communisme et qui profitent grassement aujourd’hui de la restauration du capitalisme ; ni d’oublier les conditions terribles –guerre civile, intervention de 20 pays capitalistes, encerclement impérialiste, invasion nazie, guerre froide, tentatives incessantes pour infiltrer l’URSS, dans lesquelles a pu s’installer un climat de suspicion propice à une répression sans limites, laquelle n’aura pu empêcher au final, les éléments droitiers et antisoviétiques de se hisser de plus en plus haut dans le Parti et dans l’Etat, en disant toujours amen, en flattant les dirigeants, voire en poussant à la répression, en exacerbant la suspicion pour éliminer les communistes honnêtes qui pouvaient contrecarrer leurs menées carriéristes.
Il s’agit de comprendre dans l’intérêt des révolutions futures quela dictature du prolétariat devra toujours marcher sur ses deux jambes, répression des menées contre–révolutionnaires ET démocratie prolétarienne la plus large sans laquelle est impossible un socialisme victorieux. De même que le Parti Communiste doit en permanence chercher l’équilibre entre le centralisme, sans lequel il n’y a pas d’organisation, et la démocratie qui donne sa vie au Parti et sans laquelle des dirigeants sans scrupules peuvent exploiter à leur profit la foi aveugle de militants exagérément habitués « à suivre » jusqu’à liquidation du parti.
On peut également s’interroger au vu de la décomposition croissante du Mouvement Communiste international qui a suivi cette dissolution, sur la justesse de la décision prise de dissoudre en 1943 l’Internationale Communiste, au prétexte de favoriser la construction d’une coalition antifasciste mondiale. Car pas plus que la constitution d’un large Front Populaire dans un pays ne justifie bien au contraire l’auto-dissolution du parti communiste de ce pays, la constitution d’un large front mondial ne justifie la dissolution du grand parti communiste mondial qu’était l’Internationale Communiste.
Disant cela, le PRCF se garde bien de vouloir donner des leçons rétrospectives à l’URSS, d’autant plus que le PCF n’a pas pu en 70 ans d’existence abattre le capitalisme chez lui. Notre souci tourné vers l’avenir est de chercher ce qui aurait pu intervenir dans le passé de façon différente pour construire dans le futur un socialisme indestructible.
Comme il se doit pour des matérialistes nous avons le devoir d’utiliser la première expérience socialiste de l’histoire pour faire en sorte que celle que notre peuple avec les autres peuples du monde devra construire au 21° siècle, tire sereinement parti des enseignements de l’histoire dans leurs contradictions.
3°) Le CPN du PRCF appelle à :
a) Combattre la diabolisation de Staline et poursuivre une réflexion sereine à son sujet, sans pour autant sacraliser et idéaliser son héritage et a fortiori sans stigmatiser les camarades qui estiment que cet héritage comporte des aspects problématiques et négatifs.
b) Permettre à chaque camarade à titre personnel et sans engager le PRCF et ses organisations, de défendre son point de vue personnel sur cette question, étant entendu que le PRCF défendra comme il l’a déjà fait sur la base de la présente déclaration, ceux de ses membres qui seraient attaqués sur ce sujet par la réaction ou par les réformistes et par les liquidateurs.
c) Refuser toute forme de déviation théoriciste ou historiciste qui détournerait le PRCF de sa tâche historique : redonner aux travailleurs l’éclairage marxiste sur leur place et leur rôle dans la société capitaliste, leur apporter l’éclairage marxiste sur le grand affrontement de classes qui germe dans notre pays, aller aux luttes et aux entreprises, comme l’a décidé notre 2° Conférence nationale, élaborer une réponse politique, programmatique et stratégique de haut niveau à la crise systémique du capitalisme, travailler à l’unité de combat des communistes fidèles aux fondamentaux marxistes, aider à construire le front syndical de classe, contribuer à l’émergence d’un grand rassemblement populaire capable de mettre en place une République démocratique sociale et souveraine ouvrant la perspective du socialisme.
En résumé :
Pour défendre efficacement le passé communiste, il faut combattre sa diabolisation sans tomber dans l’idéalisation et le déni des contradictions et des erreurs. Il faut promouvoir scientifiquement et fraternellement, une analyse profonde, matérialiste, dialectique et non manichéenne des processus anciens et récents qui ont pu ouvrir des brèches au révisionnisme et à la contre -évolution.
Cela implique de ne pas personnaliser à l’excès les responsabilités politiques (que ce soit pour le meilleur ou pour le pire), car cette attitude idéaliste conduit à occulter les facteurs fondamentaux qui déterminent l’histoire, comme nous l’enseigne le matérialisme historique.
Notre défense du passé communiste doit donc s’effectuer les yeux grands ouverts pour permettre au PRCF de faire grandir dans notre peuple l’idée que la révolution socialiste et la dictature du prolétariat que nous voulons pour notre pays seront clairement orientées vers l’objectif final du communisme, c’est à dire :
La société sans classes, le dépérissement de l’Etat, le développement de chacun comme clé du développement de tous.
L’indispensable répression des menées contre-révolutionnaires et fascistes ne doit jamais nous faire perdre de vue, que la dictature du prolétariat est avant tout le développement de la démocratie socialiste et son épanouissement dans le communisme, conformément à la pensée de Lénine dans ses ultimes réflexions : « le socialisme est l’œuvre vivante des masses ».
NDLR – les illustrations sont le fait de la rédaction et ne font pas partie de la déclaration.