Le PRCF informe ses lecteurs du communiqué de la fédération nationale de la libre pensée ci-dessous et salue la fédération pour sa vigilence et son article, les régimes UMPS sont en effet coutumiers de l’acte de violation de la laîcité…
Voici le communiqué:
Depuis le rejet des recours dirigés contre le décret ratifiant l’accord conclu entre la République française et le Saint-Siège relatif à la reconnaissance des diplômes de l’enseignement supérieur délivrés par des instituts catholiques, et ce, en violation du monopole de la collation des grades par l’État, le Conseil d’État revisite la jurisprudence administrative ayant trait à la laïcité et à la séparation des Églises et de l’État, dans un sens conforme à la vision qu’il avait dégagée dans son rapport annuel de 2004 sur la laïcité. Le 19 juillet 2011, il rendait cinq arrêts par lesquels, au nom de l’intérêt public local entendu dans une acception très large, il a jugé qu’étaient légales des subventions directes ou indirectes allouées à des fins de financement d’activités ou d’équipements à caractère partiellement cultuel. L’un de ces arrêts précise même, en l’absence de tout fondement, que le législateur aurait entendu déroger implicitement mais nécessairement à la loi du 9 décembre 1905 en ouvrant le droit aux communes de consentir moyennant des loyers symboliques ou dérisoires des baux emphytéotiques à des associations cultuelles.
Une offensive continue
Le Conseil d’Etat a poursuivi son offensive, le 4 mai 2012. Il a confirmé trois arrêts par lesquels la cour administrative d’appel de Lyon avait annulé trois jugements du tribunal administratif de Lyon qui, en 2007, avait estimé illégales les subventions accordées en 2005 par la région Rhône-Alpes, le département du Rhône et la ville de Lyon à la communauté Sant’Egidio, une association internationale fondée en 1968 et reconnue par le Vatican en 1986, pour organiser les 19èmes rencontres internationales pour la paix. Les premiers juges avaient reconnu la Libre Pensée fondée à contester le versement par les collectivités publiques de 600 000 euros à cette communauté dès lors « qu’à l’issue [des] débats, les participants étaient invités à des prières pour la paix [.] puis à une procession à partir de Fourvière pour rejoindre le théâtre gallo-romain où [eut] lieu la « fête de la paix », cérémonie finale » et que cette manifestation, prévue au programme des rencontres, présentait « un caractère en partie cultuel ».
Le tribunal administratif de Lyon s’était en réalité borné à appliquer la jurisprudence dégagée en 1992 par le Conseil d’État dans le célèbre arrêt commune de Saint-Louis de La Réunion (CE, 9 octobre 1992, commune de Saint-Louis de La Réunion) aux termes duquel la Société Siva Soupramanien de Saint-Louis, une association relevant de la loi du 1er juillet 1901, ne pouvait recevoir la moindre subvention publique dans la mesure où elle poursuivait des activités à caractère cultuel à côté de ses actions de nature sociale et culturelle. Pour justifier son revirement, le Conseil d’État a considéré, au prix d’une interprétation audacieuse des faits, que les cérémonies religieuses inscrites au programme des 19èmes rencontres de Lyon organisées par la communauté Sant’Egidio se seraient déroulées en marge des débats eux-mêmes et qu’en tout état de cause cette manifestation présentait un intérêt public local, notion très vague permettant tous les accommodements, compte tenu de ses retombées économiques pour la ville de Lyon. En quelque sorte une grande messe en fin de petit colloque et quelques nuitées d’hôtels suffisent désormais à conférer un caractère légal à des subventions publiques allouées à des associations relevant de la loi du 1er juillet 1901.
Une contradiction, une de plus ?
Non content d’infléchir sa jurisprudence dans un sens qui vide peu à peu de leur effectivité les dispositions de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905, aux termes desquels « la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte », le Conseil d’État a mis à la charge de la fédération départementale du Rhône de la Libre Pensée, au titre des frais non compris dans les dépens incombant à la ville de Lyon, au département du Rhône et à la région Rhône-Alpes, la lourde somme de 9000 euros. Seule consolation pour la Libre Pensée : le Conseil a été contraint d’annuler l’arrêt par lequel la cour administrative d’appel de Lyon avait annulé le jugement du tribunal administratif de Lyon déclarant illégale la subvention accordée à la communauté Sant’Egidio par la communauté urbaine de Lyon (COURLY) au motif cette dernière ne détient pas de compétence générale contrairement aux autres collectivités et que cette aide publique ne pouvait être regardée comme une action de développement économique entrant dans le champ des attributions de la COURLY.
N’y a-t-il pas une petite contradiction à considérer, d’une part, que l’octroi d’une subvention par la COURLY était illégal à défaut de contribuer à une action de développement économique, d’autre part, à affirmer que les aides consenties par la ville, le département et la région étaient licites dans la mesure où elles répondaient à un intérêt public local en « [contribuant] utilement à la vie économique » de la ville de Lyon ? Certes, la perfection n’est pas de ce monde.
Mais une nouvelle fois, la justice est au carrefour de son destin. Il revient au législateur de trancher ce noud gordien pour résoudre cette double jurisprudence contradictoire. Le choix est simple : retour au respect de la loi de Séparation des Églises et de l’État ou maintenir sa violation continue au profit des religions ?
Paris, le 28 mai 2012