Par Georges Gastaud, secrétaire national, Fadi Kassem, secrétaire national adjoint, Gabriel Casadesus et Jean-Claude Houseaux, responsables de la commission Santé du Pôle de Renaissance Communiste en France – 17 mars 2020
Il faut le voir, le Premier ministre Édouard Philippe, ce soir du 17 mars 2020, « interrogé » (ou plutôt, mis en avant par des laquais pseudo-« journalistes » complaisants davantage préoccupés de faire œuvre de « pédagogie » pour expliquer quelle case cocher dans l’autorisation de circulation – comme si les citoyen(ne)s étaient incapables de comprendre !) sur France 2 à 20h par Anne-Sophie Lapix. Satisfait de son bilan, le Premier ministre met en avant l’action du gouvernement et, à plusieurs reprises, salue le travail et le dévouement des personnels hospitaliers qu’il prétend soutenir. A-t-il oublié que, pas plus tard que le 14 février dernier, la profession hospitalière organisait une grande manifestation nationale sur le thème de « J’aime l’hôpital », en cette journée de Saint-Valentin hospitalière ? S’est-il rendu dans les hôpitaux publics démembrés, sinistrés, étouffés par les nombreuses demandes de soin, hôpitaux où l’on peut voir très clairement ce genre d’affiche : « Ce n’est pas parce que nous faisons grève que vous attendez : c’est parce que vous attendez que nous faisons grève » ?
Il faut aussi le voir confirmer les propos de Macron qui expliquait que les « critères de Maastricht », qui ont tant déstructuré les services publics – structures hospitalières en tête –, sont désormais caducs en temps de crise. Et ce, au point d’accepter le dépassement du sacro-saint chiffre de 3% de déficit public, de remettre en cause le « sans-frontiérisme » qui fait le bonheur des patrons du CAC-40 (faut-il rappeler que l’ancienne présidente du MEDEF Laurence Parisot proclamait, dans son « Besoin d’aire » de février 2012, son amour pour la « totale liberté de circulation », y compris celle de migrants transformés, comme toujours, en « armée de réserve des travailleurs » exploités et soumis à la tyrannie patronale) et d’oser parler de « nationalisation » … pourtant au cœur du programme « Les Jours heureux » produit par le Conseil national de la Résistance (CNR) dont s’est honteusement réclamé le poulain de Juppé pour justifier son projet de contre-réforme des retraites.
Mais ce qui aurait pu être le clou du spectacle, à savoir les propos explosifs d’Agnès Buzyn, ancienne ministre de la Santé, sur l’inconséquence, l’irresponsabilité et la mise en danger de vies de la part de Macron et Philippe, fut transformé en quasi-entretien de complaisance par une « journaliste », de toute évidence aux ordres. Dans le même temps, l’ensemble des chaînes d’« information » en continu, davantage préoccupées par le souci « pédagogique » de répéter 100 fois – quand bien même il est clairement indispensable de pratiquer les gestes-barrières et la discipline collective – les mêmes directives de manière infantilisante, dédouanent le gouvernement et « refusent la polémique » … tout en expliquant que la « vie démocratique » (forcément polémique) doit se poursuivre. Mais peut-on attendre autre chose de la part d’éditocrates, « journalistes » écervelés et aux ordres et autres chroniqueurs et consultants – parfois anciens ministres, à l’image de Roselyne Bachelot qui ne cesse d’ergoter sur LCI… – qui, en 2008, observèrent un silence absolu lorsque fut adopté le « traité simplifié » de Lisbonne en passant outre le référendum du 29 mai 2005 ?
En effet, Anne-Sophie Lapix interrogea, sans trop forcer, Édouard Philippe au sujet des propos d’Agnès Buzyn, qui a assuré dans Le Monde du 30 janvier 2020 auprès du Premier ministre que « les élections ne pourraient sans doute pas se tenir ». L’ancienne candidate à la mairie de Paris se lâche : « Quand j’ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections n’auraient pas lieu ». Et d’ajouter sur le déroulé de sa campagne municipale : « Depuis le début je ne pensais qu’à une seule chose : au coronavirus. On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade. La dernière semaine a été un cauchemar. J’avais peur à chaque meeting. J’ai vécu cette campagne de manière dissociée. »
Face à cela, Édouard Philippe assure que tout a été mis en œuvre, que le gouvernement a pris la pleine mesure de la gravité de la situation dès le mois de janvier, et ne cesse de se réfugier derrière « les avis du Conseil scientifique » … oubliant au passage les alertes lancées par de nombreux médecins avant le premier tour des élections municipales, comme ceux de Rémi Salomon de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) ou d’Éric Caumes qui a regretté que le gouvernement accompagne et non prévienne l’épidémie et que Macron ne fasse pas« un beau geste de donner satisfaction à la revendication d’augmentation des salaires des infirmières. Ce côté humain a quand même manqué au discours présidentiel lundi soir ».
Le gouvernement sur le pont ? Pourtant, son obsession jusqu’à il y a quelques jours était de faire passer à tout prix son projet de contre-réforme des retraites par le biais de l’article 49-3, avant les municipales ; pourtant, son mentor Macron affirmait encore, le 6 mars 2020, fier-à-bras et avec une infantile inconséquence : « Il ne faut pas, sauf pour les populations fragiles, modifier les habitudes de sortie », arguant du fait que « la vie continue » ; pourtant, après avoir annoncé la fermeture des bars, restaurants, cinémas, etc., Édouard Philippe expliquait qu’il n’y avait aucun risque pour aller voter, acte aussi important que d’acheter de la nourriture et de se soigner (visiblement, Agnès Buzyn ne semble pas du même avis…) ; pourtant, Macron et Philippe n’ont nullement tenu compte des alertes adressées il y a déjà 2 mois par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et la Chine – cette dernière étant la cible des railleries, et même de discours racistes inacceptables –… ce que confirme Agnès Buzyn elle-même.
Gouverner, c’est prévoir, et ni Macron, ni Philippe, ni leurs laquais de ministres (qui finissent par lâcher des bombes comme Buzyn) et de députés (qui ne cessent de quitter un groupe parlementaire composé de godillots au garde-à-vous) ne savent le faire. Cette terrible crise du coronavirus, au sujet de laquelle le PRCF alertait depuis longtemps, met plus que jamais à nu l’immense fragilité de ce « Nouveau Monde », mû par la seule volonté de la recherche immédiate du profit, de la défense de la « souveraineté européenne » ridiculisée dans le cadre des mesures frontalières nécessaires pour juguler le virus, de la promotion de la « mondialisation (capitaliste) heureuse » et de la « start-up nation ». Et certainement pas par la priorité à accorder à la santé, à l’environnement aux services publics démantelés sans cesse par les gouvernements maastrichtiens qui se succèdent en France depuis des décennies, atteignant son apogée (actuelle) avec le gouvernement du bébé Juppé.
Le PRCF, mobilisé et responsable depuis le début de la pandémie, appelle à une application stricte des consignes individuelles (les fameux « gestes-barrière ») et collectives pour réduire au maximum les risques de propagation du virus.
Il exprime de nouveau son entière solidarité avec les personnes contaminées et l’ensemble des travailleurs directement confrontés à la pandémie (médecins, infirmiers et aides-soignants, ambulanciers, retraités et étudiants mobilisés, policiers, pompiers, chauffeurs de taxi, employés de supermarchés…), et renouvelle son appel à arrêter l’ensemble des travailleurs (à l’exception de ceux mobilisés pour le strict nécessaire) au nom de la priorité absolue d’assurer la santé de toutes et tous, qui doit primer sur les profits.
Il appelle également à scrupuleusement respecter l’union nationale avec tous les travailleurs et citoyens mobilisés contre la pandémie, mais certainement pas avec Macron et le gouvernement Philippe qui n’ont cessé de mépriser et négliger l’ampleur du désastre, révélant leur incapacité à prévoir, donc à gouverner.
Et plus que jamais, le PRCF veillera à ce que, derrière les paroles martiales, les moyens, mis à mal par les politiques d’euro-casse sociale de Macron (et ses prédécesseurs)-MEDEF-UE, soient réellement mis en œuvre pour éradiquer le coronavirus. Cela ne sera possible que si, outre l’indispensable nationalisation des laboratoires et grands groupes pharmaceutiques, l’indispensable lutte contre la délocalisation de la production du matériel médical et le tout aussi indispensable investissement urgent de milliards d’euros à la fois dans les structures hospitalières et dans le recrutement de futurs médecins, infirmiers et aides-soignants de qualité, nous nous débarrassons, une bonne fois pour toutes, de l’UE et de l’euro, qui sacrifient la santé sur l’autel de l’austérité et les services publics au nom du dogme de la « concurrence libre et non faussée », de l’OTAN, bras armé de l’UE, et du capitalisme, dont l’essence exterministe se traduit jour après jour par la destruction de l’environnement, de la santé, des conquêtes sociales et démocratiques… et tout simplement de toute trace de vie sur terre.