Vendredi 13 octobre 2023, trois ans pratiquement jour pour jour après l’assassinat de Samuel Paty, un nouvel enseignant a été lâchement assassiné au lycée Gambetta d’Arras, dans le Pas-de-Calais, alors qu’il tentait de s’interposer au criminel venu chercher un professeur d’histoire-géographie. Les pensées du PRCF vont d’abord à ses proches et à ses collègues et nous partageons leur émotion, leur douleur et leur colère.
Car cet attentat abject frappe encore en plein cœur une communauté enseignante de plus en plus exposée et maltraitée depuis des années, soumise à de multiples offensives idéologiques faisant le jeu de tous les obscurantismes. Il n’est d’ailleurs pas surprenant que le professeur initialement visé enseigne l’histoire-géographie, plus que jamais au cœur de l’actualité : après tout, Emmanuel Macron n’annonçait-il pas, fin août 2023, vouloir une énième transformation des programmes d’histoire ?
Le drame d’Arras est révélateur de plusieurs dynamiques néfastes pour les travailleurs et pour la République une et indivisible. Tout d’abord, elle démontre le danger majeur que représente l’islamisme – au même titre que tous les autres obscurantismes religieux qui tuent dans le monde entier – du fait de son rejet viscéral des Lumières et du refus de l’esprit critique. Un islamisme (ou plutôt, DES islamismes) qui, faut-il le rappeler, a été largement encouragé par les forces impérialistes (à commencer par les Etats-Unis) qui, désireuses de combattre leur principal ennemi qu’était le communisme, ont largement armé et financé ces « fous de Dieu », comme l’ont tristement démontré la destruction du mouvement panarabe (anti-impérialiste, laïc, socialisant et défendant la souveraineté nationale) en Egypte, en Syrie, en Irak, etc. – avec un rôle majeur joué par l’Arabie saoudite wahhabite et l’Etat d’Israël colonialiste – ou le soutien des moudjahidines afghans dès juillet 1979 (programme afghan de Carter) pour chasser Najibullah et l’URSS. A ce propos, entendre Le Pen-Zemmour, les LR et la Macronie parler de combat contre l’islamisme et utiliser le vocable fascisant d’« islamo-gauchisme » a quelque chose de savoureux quand on sait que ces forces acceptent l’alliance et les relations avec l’Arabie saoudite et/ou le Qatar, au point que Nicolas Sarkozy pouvait déclarer en février 2008 que l’Arabie saoudite pratique un « islam modéré ».
En outre, se limiter à la seule accusation de l’islamisme reviendrait à occulter l’immense responsabilité des forces euro-atlantiques se succédant au pouvoir depuis plus de 40 ans dans les drames à répétition que connait la communauté éducative. En effet, les attaques à répétition contre le statut de la fonction publique, contre les contenus disciplinaires, contre les enseignants accusés de « faire de la propagande » gauchiste (forcément), etc., ont largement contribué non seulement à affaiblir les enseignants, mais aussi à créer une atmosphère propice aux attaques obscurantistes en tous genres. Encore récemment, le limogeage de la présidente du jury du CAPES de philosophie, Sylvia Giocanti, qui souhaitait faire de l’« entretien » pour les candidats un « exercice de philosophie pratique et appliquée (en accord avec les consignes de l’inspection générale !) et non un contrôle de catéchisme pseudo « républicain », témoigne de la destruction quotidienne des Lumières que prétendent défendre les euro-gouvernements successifs. Les offensives contre les sciences, et en particulier contre les sciences humaines et sociales – et en priorité le triptyque philosophie-sociologie-histoire –, nourrissent ainsi tous les courants réactionnaires – à commencer par l’extrême droite fascisante lepéno-zemmouriste – qui ne cessent de criminaliser la critique, encore plus si elle émane de penseurs se réclamant du marxisme. Comment interpréter autrement la récente fermeture du séminaire « Marx au XXIe siècle » à la Sorbonne, censurant ainsi les enseignants et chercheurs comme l’historienne Annie Lacroix-Riz ?
Il serait cependant erroné de croire que seule l’extrême droite, qui souhaite imposer sa vision racialiste et civilisationnaliste (voire même créationniste) dans l’enseignement – vision parfaitement compatible avec la « défense de l’Occident » et la « défense de l’Europe » que portent Le Pen et Zemmour se soumettant également à l’ordre UE-OTAN – est responsable de la progression de l’obscurantisme. Après tout, Manuel Valls n’expliquait-il pas en 2016 que « expliquer le djihadisme, c’est déjà vouloir un peu l’excuser » ? Et comment comprendre autrement la volonté de toutes les forces pro-israéliennes de France de taire absolument la politique colonialiste et raciste du gouvernement fasciste Netanyahou en criminalisant toute critique de ce dernier et, plus généralement, toute critique contre l’ordre UE-OTAN établi ? Il n’est qu’à voir la suspension de Franklin Nyamsi, professeur de philosophie, pour avoir critiqué la politique françafricaine de la France dans un cadre privé et en dehors de ses obligations professionnelles et scolaires.
Le lâche assassinat de Dominique Bernard ne saurait être réduit à un nouvel attentat islamiste. Il est la conséquence de l’existence d’un ordre capitaliste qui, comme le disait déjà Lénine, n’est que « Réaction sur toute la ligne », se traduisant notamment par le rejet des Lumières qui est la plus forte caractéristique des forces fascistes. Un ordre dominé par l’Axe UE-OTAN qui, terrifié de voir son hégémonisme s’effriter petit à petit, cherche à mettre au pas les critiques se dressant contre lui en les criminalisant, à commencer par les enseignants toujours plus appelés à chanter les louanges de la « construction européenne », l’ « Occident », la prétendue « démocratie » contre les « totalitarismes » (assimilant ainsi grossièrement et mensongèrement le communisme au nazisme ou la critique d’Israël à de l’antisémitisme) ou les vertus de la « mondialisation » capitaliste. Et qui a pour conséquence de détruire l’explication scientifique du monde, « analyse concrète de la situation concrète » qui révulse les illuminés au pouvoir et en passe de l’être comme Le Pen.
Voilà pourquoi, au-delà de l’indispensable combat contre l’islamisme et contre tous les obscurantismes religieux fauteurs de guerre et de fascisation, l’assassinat de Dominique Bernard appelle à l’indispensable reconstruction d’une Ecole des Lumières communes (ELC), aux antipodes du prétendu « Enseignement moral et civique » (EMC) visant à embrigader les esprits pour leur imposer un ordre profondément mortifère et exterministe qui « détruit les deux sources de richesse que sont la Terre et les travailleurs » (Karl Marx) et qui nourrit la fascisation galopante dans toute l’Europe et au-delà. Une Ecole une et indivisible pour toute la République, véritable service public national aux antipodes de la pseudo « Ecole de la confiance » qui nourrit l’euro-démantèlement de l’Education (de moins en moins) « nationale ».
Autant d’évolutions funestes nécessitant, plus que jamais, de mener le combat profondément humaniste pour les Lumières communes, comme le fait le PRCF œuvrant pour conquérir une nouvelle hégémonie culturelle non pas réactionnaire MAIS progressiste, au service des travailleurs et pour le triomphe du genre humain. Objectif impliquant inévitablement de rompre avec l’UE du Capital (qui nourrit l’extrême droite fasciste) et sa monnaie austéritaire l’euro, avec l’OTAN, bras armé de l’impérialisme états-unien et de ses affidés « occidentaux », ET avec le capitalisme, donc de mener le combat pour le Frexit PROGRESSISTE.