APRES LE DISCOURS DU PREMIER MINISTRE – Déclaration de G. Gastaud, F. Kassem (secrétaires nationaux du PRCF), J. Hernandez (secrétaire de la commission luttes) et Gilliatt de Staërck (Jeunes pour la Renaissance communiste) pour le PRCF – 11 décembre 2019
Union, action, jusqu’au retrait total !
Sans parler du peu crédible Laurent Berger, le « syndicaliste » favori du MEDEF qui dirige à la fois la confédération CFDT et la non moins jaunâtre Confédération Européenne des Syndicats (C.E.S.), les responsables syndicaux de lutte et autres syndicalistes de terrain engagés dans la grève inter-pro reconductible auront tôt fait d’analyser point par point les « concessions », pour beaucoup purement illusoires, qu’a tactiquement annoncées Edouard Philippe dans son discours du 11 décembre dans le but de diviser et de briser la grève avec l’aide du syndicalisme jaune, dit « réformiste ».
S’agissant de notre organisation politique franchement communiste et 100% anti-Maastricht, elle appelle d’ores et déjà tous ceux qui liront ces lignes à poursuivre, amplifier et durcir ce mouvement, le plus important et massif depuis décembre 1995.
Notons d’abord que, comme nombre de confédérations syndicales, y compris hélas parmi celles appelant au mouvement, le Premier Ministre ment par omission en oubliant de rappeler que cette contre-réforme, que Macron nous vend comme visant l’ « équité », résulte en fait d’une « recommandation » récemment adressée par Bruxelles à la France (et tout récemment réitérée par le nouveau commissaire européen Thierry Breton !) d’instituer un « régime unique de manière à faire plusieurs milliards d’économie ». L’enjeu de classe central est comme toujours de « réduire les dépenses publiques » de la France (Sécu, retraites et services publics) pour tenir les critères de Maastricht, préserver l’euro (c’est-à-dire l’intenable arrimage au Deutsche Mark fort du franc et des autres monnaies européennes) et privilégier à tout prix le « service de la dette » qui serait « due » aux « marchés financiers » par notre pays « souverain »…
Notons ensuite que, sans la pression que notre grève de masse a imposée au gouvernement, ce ne sont pas les pleurnicheries et le « dialogue social » bidon cher à Berger et Cie qui auraient obtenu les concessions, fussent-elles verbales, ambiguës et floues* qu’a énumérées le Premier Ministre (primes des fonctionnaires dans le calcul des retraites, report de la réforme pour certaines tranches d’âge, sauvegarde des pensions de réversion, prise en compte des enfants pour les salariées, étalement de la transition entre l’actuel régime solidaire et le système par points…etc.).
Continuons donc d’exiger le retrait pur et simple de cette régression civilisationnelle majeure car le refus clair et net est le plus efficace pour imposer à Macron-MEDEF la seule chose qu’il a reconnu craindre : le rapport des forces. Et, quitte à rappeler qu’en démocratie, le peuple est seul légitime, n’hésitons pas d’exiger, avec des centaines de milliers de Gilets jaunes, la démission de ce pouvoir minoritaire qui casse l’héritage social du monde du travail et le legs démocratique de la nation !
Constatons en outre que le ton mesuré du premier ministre, initialement si arrogant, et que ses hypocrites références au programme du CNR, sont aussi à mettre au compte du mouvement social ; et en particulier de ceux qui, comme les militants syndicalistes de la FNARC, devenue PRCF en 2004, ont montré dès 2003 – sous les huées des gauchistes qui confondent Europe supranationale et internationalisme prolétarien !- que l’enjeu de la prétendue « construction » européenne est de substituer aux avancées des ministres communistes de 1945 une jungle sociale à l’anglo-saxonne où tout serait marchandisé pour le seul avantage des banquiers. Plus que jamais, dénonçons l’omerta des appareils euro-formatés qui désarment gravement les luttes en ménageant l’UE, en promettant la mensongère « réorientation sociale de l’UE » et en cachant que l’émergence d’une perspective révolutionnaire concrètement anticapitaliste passe par le libre débat de masse sur le Frexit progressiste sans lequel il est mensonger de parler de nationalisations, de démocratie populaire, de coopérations internationales et de progrès social. En effet, sans la construction d’une telle perspective politique, les luttes sont condamnées à la défensive.
En outre ne perdons pas de vue que même les « concessions » minimalistes, biaisées et diviseuses** du Premier Ministre n’ont qu’un but : briser les retraites solidaires (qu’il faudrait améliorer : retour à la retraite à 60 ans pour tous, calcul pour tous sur le salaire le plus favorable, prise en compte des années d’étude et des périodes de chômage, etc. ), installer le nouveau système (que les successeurs maastrichtiens d’Edouard Philippe auront ensuite tout loisir d’aggraver), et surtout, plafonner le « coût des retraites » par rapport au P.I.B. comme l’exige l’UE en sommant les « partenaires » sociaux (en clair, le MEDEF et la CFDT marchant sur le ventre de la CGT) de ne jamais sortir de l’enveloppe au rabais qu’auront préétablie, pour « l’équilibre du système », la Commission européenne, la Cour des comptes néolibérale et les gouvernements maastrichtiens. D’ailleurs Edouard Philippe a indiqué qu’il « reprendrait la main » si, – devenus les gérants nominaux du système – les Berger etCie ne reportaient pas assez vite à 64 ans, puis à plus tard encore, comme le prescrivent les Accords européens de Barcelone* le prétendu « âge pivot » et les décotes dissuasives qui l’accompagneront. Et pour cela, le prétendu futur « conseil indépendant des retraites » ne pourrait faire autrement que d’aggraver sans fin les décotes pour ceux, et plus encore pour celles qui, épuisé(e)s, partiraient plus tôt (rappelant que la longévité moyenne en bonne santé en France est de… 63 ans). Bref, derrière le « Berger » chargé de surveiller et de « fixer » le troupeau des salariés et des pensionnés, il y aura, en libero, le tondeur de pensions du gouvernement maastrichtien, le joueur de pipeau de la retraite par capitalisation (n’est-ce pas, M. l’Assureur Delevoye ?) et le couperet budgétaire et monétaire de la Commission européenne. Belle « démocratie sociale » en vérité qui ne pourra jamais décider, « de manière responsable », que pour empirer la situation ! Est-ce là l’ «autogestion » que proposait déjà la CFDT dans les années 70 pour éluder la question des nationalisations démocratiques et de l’expropriation capitaliste ?
Constatons enfin qu’en mêlant à son « régime unique » les dégradations dites « paramétriques » (recul de l’âge de départ à 64 ans de fait), E. Philippe a satisfait aux sommations du MEDEF et de Bruxelles, ce qui montre clairement le but euro-austéritaire de la contre-réforme. Mais ce faisant il a compliqué la tâche du « syndicaliste » Berger qui aurait préféré, tactiquement, que ces deux mauvais coups soient dissociés dans le temps, histoire de faire passer la retraite à points sans trop heurter sa base avec ce nouveau recul brutal qu’est la retraite à 64 ans. Mais laissons Berger et Macron se débrouiller avec cette contradiction et construisons l’unité combative à la base !
Le PRCF appelle donc tous ceux qui veulent, non dans les mots mais dans les faits, rester fidèles aux principes impérissables du CNR à renforcer la grève, à la gérer démocratiquement dans de larges Assemblée Générale inter-professionnelle (AG interpro), à tendre la main aux Gilets jaunes, à s’adresser largement à la jeunesse, et à tenir sans faiblir le bras de fer jusqu’au retrait du projet sans ménager l’UE et sans craindre d’exiger la démission de ce gouvernement antipopulaire.
*Signés par Chirac et Jospin en 2002, ces accords européens prévoyaient de monter «progressivement l’âge de départ en retraite dans l’UE à 67 ans en moyenne ». On voit qu’on n’est pas au bout des régressions si l’on comprend la signification arithmétique du mot « moyenne ».
**Les enseignants savent avec certitude que leur pension baisserait gravement avec le système à points. Ils savent que la revalorisation salariale promise n’est, elle, qu’une hypothèse et que les sommes annoncées ici et là sont dérisoires. Pire, en échange d’une hypothétique non-dégradation de leur pension, Blanquer veut imposer une majoration du temps de service hebdomadaire alors que déjà, bien des professeurs sont aux portes de l’épuisement professionnel : retraite retardée, majoration des temps de service et mince revalorisation de primes « au mérite » (en clair, pour les chouchous des chefs d’établissement !), il faut vraiment prendre les enseignants pour des benêts pour croire qu’ils vont marcher dans ce marché de dupes.