Que faire pour faire face aux enjeux actuels ?
Georges Gastaud secrétaire national du PRCF répond aux questions d’Initiative Communiste journal mensuel et site internet du Pôle de Renaissance Communiste en France.
Initiative Communiste – Quels enjeux selon toi autour du meeting du 30 mai à Paris ?
Georges Gastaud : Pour nous PRCF, ce rassemblement pluriel à l’initiative des Assises du communisme ne
se réduit pas à une commémoration, fût-elle combative, du Non populaire à la constitution européenne. Bien sûr il faut rappeler que le Non souverain du peuple a été grossièrement trahi et qu’à ce titre, les gouvernants actuels, comme Sarkozy avant eux, sont ILLEGITIMES puisqu’ils gouvernent sous les auspices du Traité de Lisbonne, cette resucée de la constitution supranationale et du Traité budgétaire qui subordonne le parlement français aux eurocrates bruxello-« MEDEFO »-berlinois. Rappelons que cette forfaiture n’eût pas été possible si, dès le 29 mai 2005 au soir, les forces alter-européistes du Non, dirigeants du PCF-PGE en tête, n’avaient pas déclaré que Chirac venait d’être mandaté par le peuple pour négocier une autre constitution européenne, alors que c’était le moment de remettre totalement en question la funeste « construction » européenne et de crier « dégagez » aux complices de l’UMPS désavoués par le peuple.
Cela dit, pour nous, le meeting du 30 mai est surtout utile pour adresser au peuple, si modestement que ce soit, un signal d’espérance et d’alternative : en se regroupant à l’initiative de forces communistes dont certaines sont sorties du PCF et d’autres sont demeurées dans ses rangs, en appelant à sortir la France de l’euro, de l’UE et de l’OTAN (et pour ce qui nous concerne, nous communistes, du capitalisme !), en s’adressant aux syndicalistes de classe sans exclusive ni excommunication, mais aussi à tous les patriotes républicains qu’indigne la casse organisée du pays (industrie, pouvoir d’achat populaire, services publics, aide au logement, République une et indivisible, laïcité institutionnelle, hôpital public, Education nationale, et jusqu’à la langue française sacrifiée au tout-anglais, TOUT Y PASSE), il est possible de stopper, puis de briser l’ETAU que l’UMPS maastrichtienne et l’UM’ Pen ultraréactionnaire resserrent sur les travailleurs et sur la nation. Regroupons-nous sur ce message très simple que de plus en plus d’ouvriers, mais aussi d’intellectuels commencent à porter : si la France ne sort pas des broyeurs que sont l’euro, l’UE et l’OTAN couronné par le Grand Marché Transatlantique, elle « y restera » ! Il faut sortir de cette tenaille mortelle par la voie progressiste, sur la base des idées plus modernes que jamais du CNR : indépendance nationale, nationalisation démocratique des entreprises stratégiques, planification du produire en France pour en finir avec l’exclusion de masse des ouvriers, des paysans, des artisans, des jeunes techniciens, chercheurs et ingénieurs, recentrage de la vie politique nationale sur le monde du travail, coopération internationale avec les peuples de tous les continents, refus de la guerre continentale que l’UE-OTAN cherche à fomenter contre la Russie, refus de la fascisation de l’Europe (quelle honte que de voir le gouvernement français boycotter les cérémonies en Russie au mépris des sacrifices sans égal de l’Armée rouge, tout en courtisant les nazis ukrainiens de Kiev !), 80% de notre peuple pourrait s’unir sur un tel programme de salut public.
Et pour cela, il faut réussir le 30 mai qui, certes, n’est qu’une étape, mais dont le succès permettra d’aller plus loin tout en unissant les communistes, les syndicalistes et les vrais républicains dans une action claire et déterminée. Le 30 mai à 14 h, aucun progressiste valide n’a rien de mieux à faire que d’être présent avec amis, collègues et familles au rassemblement de la place Edouard Herriot, à proximité immédiate de la Place du Palais-Bourbon devant l’Assemblée Nationale.
I.C. – Mais ne devrions-nous pas plutôt nous unir pour le socialisme et pour la reconstitution immédiate du PC en France ?
Qui peut le plus peut le moins ! Nous PRCF ne détachons pas la sortie de l’euro, de l’UE et de l’OTAN de la sortie révolutionnaire du capitalisme. La stratégie dominante du capital monopoliste est à ce point liée à la « construction euro-atlantique » (cf tous les textes du MEDEF et du CAC—40 depuis dix ans !) qu’imposer une sortie unilatérale de l’euro, de l’UE et de l’OTAN par la lutte du peuple, en liant les « quatre sorties » à chaque revendication populaire au lieu de l’enfermer dans l’immédiat, c’est affronter le grand capital, c’est faire monter l’affrontement de classes non plus comme aujourd’hui à partir des initiatives de l’adversaire de classe, mais sur nos bases, celles du drapeau rouge frappé des outils et du drapeau tricolore hérité de la Révolution française. Bien entendu, il ne suffit pas de sortir de l’UE pour avoir le socialisme, mais il suffit encore BIEN MOINS de sauter sur sa chaise comme un cabri en criant « socialisme, socialisme » pour faire la révolution. Pour faire la révolution, il faut saisir le maillon faible de la chaîne ennemie, concentrer toute sa force sur lui et le briser. Or aujourd’hui, en France, la majorité de la classe ouvrière a déjà saisi que l’UE est un ennemi de classe (72 % des ouvriers ont voté non en 2005, il y a peu de chances que les choses ne se soient pas encore aiguisées depuis) et que le sort de la nation est lié au leur : car sans « produire en France », il n’y a plus de classe ouvrière, le prolétariat industriel est voué au déclassement et à la marginalisation sociale. Brisons ce maillon faible sur des bases progressistes, celles du Front antifasciste, patriotique et populaire, que le PRCF appelle le « FRAPP ! » et l’initiative historique repassera dans les mains du peuple avec au centre, les ouvriers. Et si entretemps, on n’a pas cessé d’expliquer que la source profonde des maux est le capitalisme, que la véritable issue est le pouvoir populaire et la socialisation des moyens de production, on aura ramené la révolution socialiste dans la problématique concrète bien plus efficacement que par un million d’incantations « anticapitalistes » de type NPA…
I.C. – Y a-t-il vraiment de quoi espérer une prise de conscience ?
Mais oui ! d’abord en France, regardons autour de nous : toutes sortes d’intellectuels qui avaient voté oui à Maastricht ou qui avaient d’abord accompagné la fable de l’Europe sociale sont maintenant sur la position d’une rupture avec l’euro et l’UE… et le débat sur l’UE prend corps dans le congrès du PG lui-même… Dois-je nommer ces intellectuels courageux qui sont loin d’être tous communistes, mais dont certains disent désormais que la destruction du camp socialiste a été une catastrophe historique ? Les mêmes ne s’en laissent pas conter sur les provocations russophobes en Ukraine et le PRCF n’est plus seul à gauche à employer le beau mot de patriotisme républicain pour l’opposer, non pas à l’internationalisme prolétarien qui en est indissociable, mais au mondialisme capitaliste, au supranationalisme néolibéral et au nationalisme chauvin et communautariste, qui sont les formes inversées de la décomposition nationale.
En Europe du sud, des forces communistes et progressistes nouvelles contestent l’euro sur des bases patriotiques et internationalistes, ralliant ainsi les positions de formations politiques marxistes-léninistes plus conséquentes… Le front international anti-euro et anti-UE s’élargit et nos ennemis de classe sont inquiets, d’où leur tendance à fasciser la vie politique sur quasiment tout le continent ! Bien entendu, en France, du fait que les forces ouvrières et progressistes jadis radicalement anti-UE ont adopté le mensonge social-impérialiste de l’ « Europe sociale », le FN a eu le champ libre pour pénétrer très dangereusement en classe ouvrière : on mesure la gravité de la faute politique gauchiste qui a consisté à abandonner la défense de la nation, la Marseillaise, etc. aux ennemis du peuple. Mais d’abord il faut démasquer le FN qui est aussi faussement national qu’il est faussement social : Marine Le Pen ne veut d’ailleurs pas sortir de l’euro puisqu’elle subordonne cette éventuelle sortie à un accord préalable (impossible !) des 18 pays concernés. Bien entendu, la sortie VERITABLE que nous voulons est diamétralement opposée à celle, simulée, du FN. Nous n’avons que faire d’une UE dominée par le capitalisme français car un peuple qui en domine d’autres ne saurait être libre. Notre perspective est à la fois patriotique, sociale, internationaliste et révolutionnaire. Sortir du mouroir euro-atlantique pour reconstituer la France, restaurer l’emploi pour tous, coopérer avec tous les pays du monde d’une manière planifiée, en finir avec la domination des monopoles capitalistes et mettre le monde du travail en situation de « devenir la nation » comme disaient Marx dans le Manifeste. Réécoutons la magnifique chanson de Ferrat « Ma France » et nous aurons une idée juste de ce que veut le PRCF, dans la droite ligne des Communards, du Front populaire et du CNR, bien entendu en l’adaptant aux conditions d’aujourd’hui.
Naturellement, il faudra pour cela ouvrir un très large débat dans notre pays avec toutes les forces qui veulent briser la tenaille UMPS/UM’ Pen, en clair avec tous ceux qui préfèrent la vie à la mort pour le monde du travail et la Nation. Ne faudra-t-il pas, le moment venu, appeler les forces vives du peuple à réécrire « en bas » le programme du CNR intitulé les « Jours heureux » ? C’est là, si on met de côté l’esprit de boutique et si on va ensemble aux luttes avec la proposition des « deux drapeaux » et des « quatre sorties », une perspective exaltante pour des militants désireux d’AVANCER et non de pleurnicher ? Les Jours heureux, on ne les attend pas, on ne les regrette pas, on les FAIT VIVRE en agissant et en s’organisant dans un vrai mouvement communiste. Le PRCF en est un, il est largement ouvert et fraternel, rejoignez-nous !
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Georges Gastaud vient de publier un nouvel ouvrage, Marxisme et universalisme aux éditions Delga. A lire d’urgence !