Pour un FREXIT ANTIFASCISTE, PATRIOTIQUE, PROGRESSISTE et ECOLOGIQUE. Entretien d Initiative Communiste avec Georges Gastaud, porte-parole du PRCF – 9 décembre 2016
Initiative Communiste : Que t’inspire la mort de Fidel, le deuil de masse du peuple cubain et les réactions de la « classe politico-médiatique » française ?
Georges Gastaud : Je pense traduire ce qu’a ressenti chaque membre du PRCF, et au-delà, ce qu’ont éprouvé des millions de progressistes en France et dans le monde, en disant que le décès de notre grand camarade a été vécu par chacun d’entre nous comme une perte personnelle.
Fidel n’était pas seulement le dirigeant historique de la Révolution cubaine, le second père de l’Indépendance cubaine après José Marti. Il était la figure de proue du Mouvement communiste international et du Front anti-impérialiste mondial, le chef de file de la résistance internationaliste à la contre-révolution anticommuniste et antisoviétique des années 80/90. Il avait en outre compris très tôt le lien dialectique entre la lutte anticapitaliste et le combat environnemental et Cuba a été primé plusieurs fois par l’ONU pour ses solutions originales sur le terrain écologique. Le rôle de Fidel a été majeur dans la libération de l’Afrique australe : on oublie trop souvent que c’est le contingent internationaliste cubain envoyé en Angola à la demande de Luanda qui a battu à plate couture l’armée raciste de Pretoria à Cuito Carnevale, une bataille dont l’importance n’est pas moindre pour les Africains du 20ème siècle que ne le fut Valmy pour les Européens du 18ème. Mandela ne s’y est pas trompé qui écrivait à Fidel : « La leçon la plus importante que vous pouvez nous offrir est que peu importe l’adversité, peu importent les difficultés contre lesquelles il faut lutter, il ne faut jamais se rendre ! ». Quant au président angolais José Eduardo Dos Santos, il a rappelé la « contribution inoubliable de Cuba (…) à la défense, au maintien de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Angola« .
Dans les années 1980, j’avais lancé, dans l’incrédulité générale, l’idée qu’à notre époque, sans changer de nature et en aggravant au contraire tous ses traits nihilistes, le capitalisme-impérialisme est devenu si régressif que « l’exterminisme est désormais le stade suprême de l’impérialisme ». C’était surtout vérifiable alors sur le terrain militaire : car le camp occidental conduit par Reagan/Thatcher s’engageait à l’époque dans une croisade nucléaire potentiellement pan-destructive contre l’URSS* afin de briser la poussée anti-impérialiste mondiale (on oublie que le camp impérialiste était sur le recul durant la décennie précédente : victoire du Vietnam socialiste, Révolution portugaise et décolonisation de l’Afrique lusophone, poussées révolutionnaires en Afghanistan, dans la Corne de l’Afrique, en Amérique centrale, « Rouges » à l’offensive en Italie, en France ou au Portugal, déconfiture des USA en Iran…). Et bien évidemment, cette contre-offensive idéologique et militaire de l’Oncle Sam sur fond de slogans exterminateurs (« plutôt morts que rouges », clamait la réaction allemande, « le Kremlin doit savoir qu’il aura la guerre si les dirigeants soviétiques ne renoncent pas au communisme », complétait Nixon, « je préfère mourir irradié avec mon enfant que j’aime à la suite d’un échange de Pershing et de SS 20 plutôt que de l’imaginer entraîné vers quelque Sibérie planétaire », couronnait le sinistre cuistre André Glucksmann…) n’a pas été sans lourds effets politiques : car sans cette énorme pression militaro-idéologique sur l’URSS, on imagine mal qu’un capitulard comme Gorbatchev ait pu prendre la tête du PCUS… Bref, la contre-révolution fut quelque part la continuation politique de la seconde guerre froide comme à l’inverse, l’actuelle re-mondialisation contre-révolutionnaire du capitalisme est sourdement structurée par un exterminisme latent : destruction accélérée de l’environnement par la course au tout-profit, guerres néocoloniales en voie de mondialisation (cf à ce sujet le dernier livre de Jean Salem paru chez Delga), course à la fascisation politique, crises financières à répétition, accroissement explosifs des inégalités, etc. Il est donc logique que Fidel, qui fut le chef de file de la résistance à la contre-révolution, soit aussi devenu la figure de proue de la lutte anti-exterministe. C’est en effet un aspect trop souvent occulté du mot d’ordre « le socialisme ou la mort », lancé à Camaguey par Fidel le 26 juillet 1989, alors que le camp socialiste était en voie d’implosion : ce mot d’ordre n’a pas seulement la portée héroïque qu’on lui connaît et qui rappelle le « plutôt mourir libres que vivre esclaves » des Grecs à Marathon, ou le « liberté, égalité, fraternité ou la mort » qui fut la devise de nos Sans Culottes, il a une portée anti-exterministe claire et nette : si l’humanité du 21ème siècle ne parvient pas à faire la révolution, à liquider la ruineuse exploitation de l’homme par l’homme et l’oppression impérialiste d’une poignée d’Etats sur la majorité de l’humanité, si elle n’entend pas l’avertissement de Marx (« le capitalisme ne produit la richesse qu’en épuisant la Terre et le travailleur »), en un mot, si elle ne parvient pas à mettre en commun pour le bien de tous les ressources terrestres, les recherches scientifiques, les technologies et les grands moyens de production et d’échange, alors notre espèce périra. Bref, à ses missions historiques traditionnelles (permettre à l’humanité d’accéder à l’âge adulte, de passer de la société divisée en classes à la société sans classes, et ce faisant, de devenir le sujet libre de sa propre histoire), le communisme doit ajouter cette suprême responsabilité : assurer la survie et le développement de l’humanité et de la vie au 21ème siècle, devenir un anti-exterminisme conséquent. Ce qui ne signifie pas se déculotter devant l’impérialisme pour sauver la « paix » – dont l’impérialisme est précisément l’ennemi principal ! – mais tout au contraire, devenir encore plus révolutionnaire : bref, préférer à la suicidaire voie gorbatchévienne, la voie révolutionnaire et proprement vitale incarnée par Fidel. Osons affirmer que c’est parce qu’il a su tenir les deux bouts de la chaîne, la réaffirmation de la voie révolutionnaire (contre Gorby et ses suiveurs) mais aussi la défense des intérêts à long terme de toute l’humanité non pas avec, mais contre l’impérialisme – qu’il n’a jamais confondu avec le peuple états-unien –, que Fidel a pu réussir cet incroyable exploit historique : la continuité de Cuba socialiste en plein ouragan contre-révolutionnaire mondial, et même son désenclavement avec la mise en place de l’ALBA avec l’émergence en Amérique latine du mouvement bolivarien lié à Chavez et à Morales.
Si l’on ajoute à cela que Fidel n’a jamais opposé, comme le font ruineusement les trotskistes, les eurocommunistes et les autres révisionnistes du mouvement ouvrier, la défense de l’indépendance nationale à l’action pour le socialisme, que tout en respectant les fondamentaux universels du socialisme (poder popular, socialisation et planification démocratique des moyens de production), il a toujours eu le souci d’une construction socialiste ancrée dans les réalités nationales (langue, musique, danse, etc.). Comme Raul et à l’inverse des néolibéraux, Fidel a toujours considéré la Santé, la recherche (notamment biomédicale) et l’éducation non pas comme des « coûts » à réduire mais comme des investissements productifs d’avenir, on voit que l’héritage fidéliste est au cœur de nos luttes pour les services publics, la recherche publique et la protection sociale. Pour se déclarer « fidèle à Fidel », notre PRCF n’a besoin que de rappeler ce que chacun peut aisément vérifier : au cœur de la stratégie politique nouvelle que nous proposons au mouvement ouvrier français, il y a, adapté à notre pays, le double slogan castriste « la patrie ou la mort » (car à notre époque, le capital détruit la France et le monde du travail est seul à même de la reconstruire), et « le socialisme ou la mort », car seule au final la révolution socialiste pourra sauver, voire régénérer la patrie, ou plutôt, les patries, en les inscrivant dans une défense humaniste et universaliste de toute l’humanité. Telle est si j’ose dire, notre Fidélité à l’avenir…
Quant aux commentaires méprisables de la grande presse, des Le Pen, des LR (la « Loi des Riches » ?), et à ceux, encore plus veules d’Ayrault ou de Cambadélis démentant les dignes propos de S. Royal, ils montrent simplement que notre pays est la proie d’une clique politico-médiatique indécente qui ne respecte même pas le deuil de masse de tout un peuple. Il n’est que de voir le veulissime Hollande s’envolant pour les Emirats du Golfe, ces parangons de « démocratie », pour éviter de se rendre à Santiago, pour voir ce que signifie pour ces gens la « démocratie » dont ils ont plein la bouche, entre deux ventes de Rafales, trois contre-réformes et quatre ingérences sanglantes, en Libye, au Mali, en Ukraine ou au Proche-Orient. Président du PRCF et ancien officier des FTP-MOI, notre camarade Léon Landini a magnifiquement répondu à l’histrion philosophique Onfray, qui venait d’injurier Fidel dans un journal de l’ultra-droite filloniste (j’ai nommé Le Point, dont le patron compare ridiculement la CGT à Daech !), que oui, il y a bien des prisonniers politiques à Cuba, oui, ces prisonniers sont odieusement torturés et que oui encore, il faut dénoncer ces exactions sans aucune œillère politique ! Sauf que ces prisonniers politiques sont à Guantanamo, sur une base illégalement occupée par l’US Army et par ses tortionnaires « scientifiques » !
Mais le contraste est si fort entre le deuil de masse des Cubains, j’allais dire, leur « deuil de combat », entre l’hommage populaire rendu à un Titan de l’histoire par des millions de gens de tous les continents, et l’infinie médiocrité de notre caste politico-médiatique dominante, sans parler de nos présidents successifs (qui sont vomis par le peuple à peine installés à l’Elysée, tant il est clair qu’ils y sont pour « faire le sale boulot » du capital !), que les crachats sur les cendres de Fidel n’en finiront pas de retomber sur le visage des néo-thatchériens « LR », des Fachos Nantis chers aux Le Pen, des Pseudo-Socialistes de Solferino et des « journalistes » cousus d’or qui, tels Pujadas ou Apathy, feignent de parler au nom du « service public » !
Initiative Communiste : Comment réagis-tu à l’élection de Fillon ? Le « second tour de cauchemar » Le Pen-Fillon, comme tu dis, est-il encore évitable, avec tout ce qu’il comporte de fascisation et de régressions en perspective ?
Georges Gastaud : l’élection triomphale du thatchérien Fillon, le nouveau Thiers cher à la droite dure, l’Anti-Robin des Bois nanti, le pseudo-chrétien chouchouté par les beaux quartiers, constitue une déclaration de guerre civile programmée sur ordonnances à l’encontre du monde du travail. Cette ultra-droitisation de la prétendue « droite républicaine » permet à Marine et à Marion Le Pen d’en rajouter aussitôt dans leurs propositions inhumaines contre la scolarisation gratuite des gosses de sans papiers ou sur le non-remboursement de l’IVG. Cette ultra-droitisation de la droite, cette réaffirmation décomplexée des positions classiques de l’extrême droite sont le produit direct de la droitisation du PS, de la fascisation de moins en moins rampante de l’Etat (libéral-fascisation, social-fascisation, les formes nouvelles d’un processus ne doivent jamais en occulter le contenu de classe profond : la guerre à outrance de l’oligarchie contre le mouvement ouvrier !). L’actuelle poussée ultraréactionnaire résulte aussi in fine – et les militants marxistes du PCF s’honoreraient de regarder en face cette douloureuse réalité–, de l’irréversible social-démocratisation du PCF-PGE et de l’arrimage structurel à la « construction » européenne que signifie l’affiliation du PCF au PGE (que préside Pierre Laurent). Un PCF-PGE qui n’en finit pas de dériver depuis que, déjà dans les années 1970, la direction du Parti d’alors a rallié l’ « eurocommunisme » en larguant le marxisme-léninisme, en coupant toute attache avec le camp socialiste, en applaudissant le liquidateur Gorbatchev et en détruisant l’ancrage prolétarien du Parti (destruction des cellules d’entreprise, rupture du lien organique avec le syndicalisme de classe…). Pour ne prendre qu’un exemple, quand la « commission économique nationale du PCF » (les Dimicoli, Marchand, Boccara…) attaque de droite le programme de Mélenchon en l’accusant d’ « étatisme » ( !) et de « nationalisme » sous prétexte que JLM se dit « indépendantiste » et qu’il ouvre le débat sur le maintien de la France dans l’UE, faut-il s’étonner si, de l’autre côté du spectre politique, les héritiers honteux de Vichy et de l’OAS peuvent usurper tout à loisir le nom glorieux du « Front national de lutte pour l’indépendance et la liberté de la France », c’est-à-dire de l’organisation unitaire de combat, authentique précurseur du CNR, que le PCF clandestin avait créée pour combattre l’Occupant hitlérien ?
Si le second tour de cauchemar FN/LR est encore évitable, ce n’est surtout pas en s’effaçant derrière Montebourg, comme le souhaite encore à demi-mots le candidat « communiste » et pseudo-identitaire Chassaigne. Sans manquer de respect à ce député sympathique, force est de constater que le chef de file des parlementaires du PCF se cramponne à l’ « union de la gauche » moribonde en vue des législatives (avec peut-être l’espoir d’obtenir du PS des candidatures uniques PS/PCF dès le 1er tour? A. Chassaigne n’a pas répondu à notre adresse publique à sur ce point !)… Un effacement fort peu « identitaire » devant Montebourg, que continue de promouvoir allusivement P. Laurent. Lequel, pour sauver l’UE, l’euro et le Parti de la gauche européenne qu’il préside (voire pour sauver son siège de sénateur francilien socialo-dépendant ?) rêve de ressusciter l’union de la gauche derrière Montebourg, l’ex-ministre qui s’est couché devant Valls, Hollande et Bruxelles quand il s’est agi de sauver Florange et l’acier français…
Non, pour conjurer le cauchemar annoncé LR/FN, la question principale et de loin est d’en finir avec l’actuel attentisme du mouvement social et syndical, actuellement tétanisé à la fois par les présidentielles, par les prochaines élections professionnelles et par la concurrence intersyndicale qu’elles induisent au détriment du combat social*. Car ce n’est pas DEMAIN avec Fillon, mais AUJOURD’HUI avec Valls-Cazeneuve que les libertés syndicales sont laminées, que des emplois industriels sont supprimés par milliers (cf Airbus !), que les salaires sont comprimés, que des millions d’HS ne sont pas payées aux salariés, que les conditions de transport sont pourries, que 9 millions de personnes survivent sous le seuil de pauvreté, que le travail est un enfer pour des centaines de milliers de gens, que cinq millions de citoyens, surtout des jeunes, moisissent au chômage, que les services publics sont asphyxiés, que l’Education nationale est plombée par un empilement de contre-réformes extravagantes, qu’EDF est reléguée sur la voie du dépeçage final… ou que les agents hospitaliers vont bientôt finir eux-mêmes aux « urgences » si le sort qui leur est fait n’est pas radicalement et rapidement amélioré ! Pour conclure sur ce point, notons à l’adresse de ceux qui réinventent quotidiennement le fil à couper le beurre du « mouvementisme » et du « post-léninisme », que les léninistes n’ont peur d’aucun mouvement populaire. Entre nous, les Soviets, c’était autre chose que le « cloud » sur internet ! L’un des défis léninistes actuels, c’est d’œuvrer à ce se lève un puissant mouvement DE CLASSE ET DE MASSE. Et ce mouvement a moins besoin d’un « Podemos » à la française que d’une puissante CGT rouge, que d’un parti franchement communiste renouant avec le marxisme-léninisme et ancré dans la classe ouvrière dans toute sa moderne diversité. Ce n’est pas d’un excès de léninisme ou de « post-léninisme » (que le PCF lui-même n’a cessé de « cartonner » depuis quarante ans !) que souffre le mouvement ouvrier français, c’est du fait qu’à l’inverse, alors que Fillon prend la tête d’une véritable avant-garde réactionnaire avec le FN en libero, le monde du travail ne dispose plus des outils, délibérément cassés, d’un parti de classe et d’un syndicat de combat.
C’est donc maintenant, et non pas quand Fillon gouvernera par ordonnances ou quand Le Pen aura gagné le second tour (voire le 1er, tant l’atonie prolongée des luttes, l’extrême désorientation du PCF et les combat d’égo du PS font le jeu des Fachos Nantis !), qu’il faut relancer l’ACTION pour les salaires, l’emploi, le logement, les services publics, la Sécu, les retraites, les indemnités chômage, l’école, l’hôpital public, le produire en France**, en faisant converger ces luttes sur la base d’une plate-forme revendicative unificatrice : si bien que la relance du syndicalisme de classe et de masse devient littéralement stratégique politiquement ! Rappelons à toutes fins utiles que le 11 janvier prochain coïncidera avec l’anniversaire de la nationalisation de Renault, que le 14 mars peut permettre une commémoration de lutte du programme du CNR Les jours heureux, lequel fut à l’origine de la Sécu, des retraites par répartition, du Code du travail, des conventions collectives généralisées, des statuts et des services publics modernes. Rappelons enfin que le 1er mai 2017, le mouvement ouvrier en grave danger doit absolument s’y préparer dès maintenant : il faudra alors montrer ses muscles, non seulement en se rassemblant massivement, mais en arborant notre drapeau rouge de combat… Et surtout, il ne faudrait plus désormais commettre la faute gravissime consistant à abandonner le drapeau tricolore et la Marseillaise au couple diabolique LR/FN qui ne les usurpent que pour mieux les opposer aux « Rouges »… Car en France, les plus belles avancées sociales du 20ème siècle ont été obtenues en 36 et en 45 quand le PCF et la CGT associaient offensivement le drapeau tricolore de 1789 au drapeau rouge de la Commune ! Tous deux sont nôtres ! Pointons-les l’un et l’autre contre l’UE, les LR, le FN, le MEDEF, l’OTAN et tous ceux qui les servent, y compris les Cazeneuve, Macron, Chérèque et autre Valls !
Le PRCF appelle en outre à utiliser le bulletin Mélenchon pour forger au 1er tour l’espace politique progressiste le plus large possible : c’est indispensable pour que le mouvement populaire ne soit pas complètement « sonné » à la sortie des élections et pour qu’il puisse contrer l’offensive euro-thatchérienne, voire passer à la contre-offensive sur l’ensemble des dossiers socio-économiques. Pour l’heure, de premiers points d’appui politiques existent dans le programme de Mélenchon : et tous ceux qui, comme nous, ont lutté à contre-courant depuis 2004 pour le Frexit progressiste et internationaliste n’y sont pas pour rien : au grand dam de P. Laurent, Mélenchon se réclame en effet de l’ « indépendantisme français » ; contrairement à P. Laurent, président du PGE, Mélenchon pose au moins la question « l’UE, on la change ou on la quitte ! ». JLM a soutenu les manifs anti-Loi Travail, il veut sortir de l’OTAN, il affronte de gauche le PS néolibéral, il a eu une position décente lors du décès de Fidel, ce « post-léniniste » impénitent ; et suspecter l’engagement anti-FN de JLM relèverait du procès d’intentions. Bien entendu, ce candidat fait déjà l’objet de pressions considérables de la part du rabatteur Montebourg, pour rentrer dans le giron du PS, mais aussi du « frondeur » euro-béat Benoît Hamon. Bien entendu, le « mouvementisme » de JLM mérite d’être confronté à la pratique et notre soutien critique à sa candidature, pour préserver et élargir l’espace politique progressiste indispensable aux luttes, n’implique en rien, au contraire, que nous reculions d’un pouce sur la reconstruction du parti de combat sans lequel le « mouvement », flottant dans son nuage informatique, serait condamné à tergiverser sans fin sur l’UE et sur la rupture avec le capitalisme… sans intéresser le moins du monde la classe ouvrière. En un mot, quand la droite se durcit, veillons à ne pas nous « gazéifier » !
Quant à la direction du PCF-PGE qui s’est ralliée à JLM contrainte et forcée, c’est de droite qu’elle critique son programme, avec l’objectif avoué de favoriser le rassemblement « des deux gauches » (bien entendu, derrière le PS) : alors qu’il faut absolument que le 1er tour serve au moins à inverser le rapport des forces à gauche entre le PS et son opposition de gauche patriotico-populaire ! A nous, militants franchement communistes, et plus largement, à nous, militants du Frexit antifasciste, patriotique, progressiste et écologique, de contrer ces pressions droitières en montrant qu’aucune politique patriotique et progressiste conséquente n’est possible dans le cadre totalitaire d’une UE « partenaire stratégique de l’OTAN » et d’une « économie de marché ouverte sur le monde où la concurrence est libre et non faussée » : ce qui signifie que le prétendu « Plan A » (« on change l’UE ») cher à la « France insoumise » est illusoire : car pendant que la « France insoumise » négocierait durant des mois avec Bruxelles et Berlin, le changement promis s’enliserait en France ; si bien que la réaction en profiterait pour reprendre l’offensive sur des bases fascisantes, tant il n’est vrai que, comme le disait Robespierre, « ceux qui font les révolutions à moitié n’ont fait que se creuser un tombeau ». Mais peut-être faut-il aussi devenir « post-robespierristes », et pourquoi pas… girondins, pour mériter le titre de « modernes » et de « décentralisateurs » ? Bien entendu, il faudrait aussi nationaliser à 100% le CAC-40, les assurances et les banques sans verser un sou d’argent public aux actionnaires capitalistes et en donnant aux travailleurs de larges pouvoirs de contrôle.
Bref, contre les deux erreurs symétriques consistant à dissoudre le parti de classe dans le « mouvement » ou à l’inverse, de se soucier comme d’une guigne du mouvement populaire et de l’espace politique progressiste pour camper sur la vieille union PCF/PS, il faut associer, articuler, « dialectiser », comme nous disons, et non pas opposer, les trois processus distincts et complémentaires que sont à nos yeux…
- la reconstruction urgente du vrai parti communiste, de manière à permettre aux OUVRIERS, aujourd’hui tentés par le retrait politique, voire par le vote FN, de disposer d’un outil politique leur permettant de devenir l’axe du Front populaire et de donner toute sa portée anticapitaliste, anti-impérialiste, antifasciste, patriotique internationaliste et révolutionnaire, au Frexit progressiste ; car c’est toute la question du contenu de classe du changement qui se joue dans la reconstruction du vrai parti communiste. Sans un parti à elle, sans un parti franchement communiste, la classe ouvrière ne pourra ni investir le changement ni l’orienter fermement contre l’UE et le capitalisme. On voit d’ailleurs dans certains pays latino-américains comment le changement, lorsqu’il est livré à une direction petite-bourgeoise nécessairement hésitante, se met à la merci d’une contre-attaque fascisante solidement ORGANISEE. Mais on ne combat pas le « mouvementisme » petit-bourgeois en se repliant ad vitam aeternam sur le PCF-PGE, en retardant à l’infini les ruptures nécessaires au regroupement organisé des vrais communistes… Car tel qu’il est, le PCF-PGE est déjà lui-même un « mouvement » qui tire à hue et à dia (surtout à Hue d’ailleurs !) et son extrême désorientation électorale récente a prouvé que le PCF est devenu impuissant à jouer le rôle normalement dévolu à un PARTI : celui d’être l’avant-garde de sa classe de référence. Comment un « parti » qui ne s’oriente pas lui-même pourrait-il orienter la classe ouvrière, qui plus que toute autre classe, a besoin de détermination et de franchise pour devenir un sujet politique ?
- la réactivation du mouvement ouvrier et populaire de combat : ce qui suppose de contrer les manœuvres visant à écarter les militants du Front syndical de classe qui cherchent à activer, comme un levier et un tremplin pour le tous ensemble des travailleurs, le tous ensemble des syndicalistes de lutte par-delà les frontières de branches, de corporations et d’appareils ; sans du tout négliger l’internet et les réseaux sociaux (le site du PRCF fait d’ailleurs partie désormais des plus influents de France sur le terrain politique !), qu’apporterait aux travailleurs un « mouvement » qui se contenterait de « gazouiller » sur la Toile, mais qui se désintéresserait du lieu décisif de l’affrontement des classes, l’ENTREPRISE CAPITALISTE. Car comme l’a rappelé le très dur affrontement du printemps sur la loi Travail, l’entreprise, ou les services (de moins en moins) publics restent le lieu central de l’exploitation capitaliste : c’est là en effet que se forment la plus-value ou ses conditions matérielles, et non pas devant les seuls claviers que se joue principalement le rapport de forces entre capital et travail, entre réaction et camp progressiste.
- et la mise en place méthodique d’un Front Antifasciste, patriotique, populaire et Ecologique allant jusqu’au bout de sa démarche en appelant à la rupture immédiate avec l’UE/OTAN de manière à activer l’Europe des luttes sociales et permettre à notre pays de coopérer à égalité avec tous les continents.
C’est pourquoi, tout en tendant constructivement la main aux militants de terrain du Parti de gauche, de la « France insoumise » (et bien entendu, à leur candidat), nous appelons les marxistes qui militent au sein du PCF-PGE à ne pas s’enfermer dans ce cadre largement piégé, à diffuser avec nous à la porte des entreprises des propositions communes pour le FREXIT progressiste et pour un programme communiste de transition révolutionnaire. Le tête-à-tête à l’infini avec les Laurent, Chassaigne et autre Buffet est sans perspective si l’on n’a pas en tête, alors que notre peuple est désarmé face à la montée des périls, le but final : la renaissance du vrai parti communiste séparant salutairement les révolutionnaires des euro-réformistes et rassemblant les « communistes des deux rives », ceux qui sont encore au PCF et ceux qui se sont organisés à l’extérieur, sans oublier les milliers de camarades qui errent aujourd’hui « dans la nature ». Par conséquent, sauf à faire montre d’un électoralisme désolant, le vrai clivage n’est pas aujourd’hui « Mélenchon ou pas Mélenchon ? », comme si ce candidat était l’ennemi principal des communistes, ou comme si, à l’inverse, il était le « sauveur suprême » ! A l’heure où le bloc thatchéro-fascisant des LR et du FN flanqués de Valls-Macron veut faire main basse sur la France. privilégier un clivage électoral serait occulter la vraie question de classe : aller ensemble dès maintenant à la porte des usines avec un programme communiste commun. C’est dans cet esprit que le PRCF propose aux militants ouvriers d’agir ensemble pour « quatre sorties » : euro, UE, OTAN, capitalisme, et pour dix « entrées » : République souveraine (1), sociale et populaire (2), démocratique (3), une, laïque et indivisible (4), productive (nationalisations et relance planifiée du produire en France industriel et agricole) (5), fraternelle : antifasciste, antisexiste, antiraciste et anti-communautariste (6), écologique (7), pacifique, internationaliste et anti-impérialiste (8), soutenant l’école laïque et les « Lumières communes » (9), porteuse d’une culture nationale ouverte et diverse, promouvant la langue française et la francophonie contre le tout-anglais néocolonial ; bref, une République nouvelle, émancipée de l’UE/OTAN, centrée sur le monde du travail, affrontant le grand capital et marchant résolument vers la transformation révolutionnaire (10)).
Bref, il ne s’agit nullement pour quelque communiste que ce soit, de se soumettre à la « France insoumise », mais de l’aider fraternellement et dynamiquement, à devenir une France Franchement Insoumise (à l’UE/OTAN et au MEDEF !). Non seulement cela ne plomberait pas ses résultats électoraux, mais cela attirerait vers elle des millions d’ouvriers, d’employés, de fonctionnaires, d’artisans et de paysans, de jeunes en révolte qui, pour s’engager, ont moins besoin d’une multiplication exponentielle de « tweets », que d’un « choc de franchise » sur l’UE, sur l’indépendance nationale, les nationalisations démocratiques, en un mot, sur l’affrontement résolu du peuple travailleur avec le grand capital. Car sauf à s’y coincer les doigts, on ne peut pas claquer à demi la porte de son cachot !
Et ce programme de Frexit révolutionnaire et progressiste, c’est sans attendre que les militants du PRCF le portent actuellement aux entrées d’usine : 20 000 tracts-programmes sont déjà partis depuis la conférence nationale du PRCF (13 novembre) qui a acté, quasi-unanimement, notre positionnement sur les luttes et les élections, et 92 000 tracts-programmes viennent d’être commandés au national par nos structures départementales. Si l’on ajoute à cela que www.initiative-communiste.fr , le site d’Initiative communiste, se classe désormais parmi les 30 premiers sites politiques de France, et que nous sommes par ailleurs à l’offensive, voire à l’avant-garde, dans plusieurs domaines théoriques (livres, revues, conférences…), je crois pouvoir dire que nos militants n’attendent aucun accord d’état-major pour aller là où nous avons le plus à apprendre et à apporter : vers la classe ouvrière, vers le monde du travail, vers la jeunesse populaire et les quartiers populaires : voilà les forces vives qui finiront par balayer tous les réacs si elles constatent, sur le terrain principal – l’entreprise, qui est le cœur de l’affrontement capital-travail, que les vrais communistes font retour tous ensemble en portant un programme crédible de rupture franche avec l’UE du grand patronat. Et pour le PRCF, qui vient de déposer 6000 premières signatures en préfecture de Tulle pour un référendum de sortie de l’UE, cette proposition est déjà un engagement d’action !
Alors, camarades franchement communistes extérieurs au PRCF, syndicalistes de classe non encore engagés politiquement, citoyens authentiquement républicains, étudiants et jeunes prolétaires révolutionnaires, pourquoi ne pas accepter la main tendue du PRCF, pourquoi ne pas porter ce message de Frexit progressiste et révolutionnaire dès maintenant et tous ensemble à la porte des entreprises ?
*Ce que confirme Noam Chomsky dans son dernier entretien accordé à l’Humanité (novembre 2016).
*Bien entendu, les véritables amis du combat populaire ne resteront pas neutres aux élections professionnelles entre les dirigeants jaunes de la CFDT, qui sont les vrais auteurs de la loi Travail avec Valls-MEDEF, et les militants CGT de classe auxquels nous souhaitons plein succès !
*** Et non le « made in France » comme dit A. Montebourg qui, à défaut de sauver l’industrie française, a fait de son mieux, quand il était ministre, pour promouvoir le frenglish !