N’ayant pu stopper les combatifs Gilets jaunes avec les mesurettes annoncées en décembre, Macron a lancé un pseudo « grand débat » dont se sont massivement désintéressés, à juste titre, les travailleurs, les « Gilets jaunes », la majorité des jeunes et les syndicalistes dignes de ce nom.
Les conclusions que le Roi Macron vient souverainement d’apporter au « grand débat », sans se donner la peine de consulter l’Assemblée nationale, n’apportent pas de surprise. Certes, il annonce quelques timides avancées destinées à éteindre l’incendie social. Personne ne crachera sur la ré-indexation des « petites retraites » et sur la ré-indexation future annoncée des pensions en général. Sauf qu’il ne s’agit au mieux que de revenir, avec retard, sur la contre-réforme décidée par Macron dès son accession au pouvoir au détriment des retraités, alors même que « Jupiter » multipliait les cadeaux fiscaux aux très riches. Il n’est pas négligeable par ailleurs que le chef de l’Etat ait annoncé la suspension des suppressions de services publics de proximité jusqu’à la fin du quinquennat, même s’il convient d’être prudent sur la mise en œuvre réelle de cette mesure : dans le cadre des contre-réformes maastrichtiennes qui ravagent l’Education nationale, l’hôpital, la poste, la SNCF, l’Equipement, les sapeurs-pompiers, etc., la vigilance s’impose si l’on veut que les « petites facs », les hôpitaux, etc. ne deviennent pas des coquilles vides qui, derrière leur maintien de façade, se vident rapidement de leurs services médicaux, de leurs lits d’hôpital, de leurs filières universitaires, etc.
Tant mieux si les familles monoparentales peuvent enfin toucher leurs pensions de divorce, mais encore faut-il que les conjoints et conjointes, souvent chômeurs ou « travailleurs pauvres », soient en état de payer…
On l’aura compris, tout cela ne fait pas le compte, d’autant qu’il s’agira surtout de redéploiement entre couches moyennes et couches populaires et non d’une augmentation franche de salaires mettant à contribution les capitalistes…
Si maigres soient-elles, ces mesures sont toujours bonnes à prendre pour les personnes concernées ; mais le gain réalisé, si limité soit-il, montre surtout que, contrairement au « dialogue social bidon » qu’entretiennent les états-majors syndicaux (et qui ne produit que des régressions depuis des décennies), les GJ ont bien fait de tenir le rapport des forces dans la durée, de délégitimer ce président des hyper-riches (« Macron démission »), d’exiger l’augmentation des salaires et pensions, de réclamer la justice fiscale, d’appeler à rétablir la souveraineté populaire confisqués par les élites franco-européennes. Ils ont bien fait aussi de mettre en débat l’idée d’insurrection populaire et celle de la sortie de l’UE (« frexit » !) pour reconstruire le progrès social !
D’autres mesures macroniennes sont en réalité des cadeaux empoisonnés. Qu’attendre de bon de la mise en extinction des « grands corps de l’Etat », de la fermeture de l’ENA, de la réduction du nombre de parlementaires (alors que le parlement est constamment contourné par l’exécutif…), de l’accroissement du pouvoir des notables locaux (« pacte girondin », « décentralisation ») si ce n’est, dans le contexte actuel de marche à l’Europe fédérale des « territoires » soumis à une concurrence permanente, une pénétration plus grande encore de l’Etat par les oligarques du privé (comme c’est le cas de l’ex-banquier Macron), avec en prime une désarticulation accrue de l’Etat-nation (« droit à la différenciation territoriale » inscrit dans la Constitution = fin de l’égalité de tous devant la loi) et un déséquilibre croissant entre villes, « métropoles » et autres euro-régions ? Pas de réponse à la hauteur non plus sur le RIC, Macron disant craindre l’affaiblissement de la « démocratie représentative », alors que le vrai problème est que cette dernière ne l’est plus du tout au niveau national !
Enfin, le pouvoir essaie d’exploiter la fronde populaire pour précipiter la mise en œuvre des mesures dictées par l’UE et par le MEDEF. Concernant les retraites, Macron va de fait repousser encore l’âge de départ réel et/ou la baisse des pensions en alourdissant les très injustes décotes qui frappent ceux, et surtout celles, qui n’ont pas toutes leurs annuités. Quant à la retraite à points annoncée, elle est d’une extrême dangerosité : non seulement le niveau des pensions serait encore moins bien garanti qu’aujourd’hui, mais le projet macroniste détruira le mieux-disant social des régimes spéciaux existant (sans bénéficier aux autres travailleurs) et mettra fin aux « retraites par répartition » créées à la Libération par Ambroise Croizat. Propos menaçants également du chef de l’Etat à l’encontre des chômeurs de plus en plus contraints de travailler au rabais, hors de leur qualification et loin de leur domicile, tout cela au nom du « refus de l’assistanat » : colossale injustice quand on voit que chaque année, ces super-assistés que sont les riches envoient des milliards dans les paradis fiscaux au titre de la fraude et/ou de l’ « optimisation fiscale » !
Et bien sûr, même si un bémol est mis verbalement au plan de suppression de 120 000 postes de fonctionnaires (en termes de réduction de l’impôt sur le revenu, cela se paiera cher en qualité du service public et en dégradation du service rendu !), le pouvoir refuse de remettre en place l’ISF, de mettre fin au CICE (des milliards d’agent public versés sans contrôle au patronat), de rétablir le Code du travail national, d’en finir avec l’affaiblissement des statuts publics, de stopper la très inégalitaire fiscalité indirecte frappant les produits de base, de privilégier le remboursement de la dette « due » par la France aux financiers internationaux suite à la quasi mise en sommeil de la Banque de France, etc.
En un mot, Macron a bien plus écouté les financeurs de sa campagne électorale, banques et oligarques, que le cri des classes populaires et des couches moyennes en quête de justice sociale.
La seule attitude juste est donc d’amplifier le combat « jusqu’à la victoire toujours » comme disait le Che. Les grands rendez-vous sociaux d’avril, du 1er et du 9 mai, syndicalistes de lutte et gilets jaunes unis, sont là pour le rappeler : les militants du PRCF et des JRCF y seront bien entendu, présents, actifs et déterminés.
Par Georges Gastaud, Jo Hernandez (PRCF) et Gilliatt de Staërck (JRCF) – 26 avril 2019