- Contre l’euro-décomposition de la France et de la République,
- Contre l’euro-destruction des conquêtes sociales et démocratiques,
- Contre l’euro-fascisation qui arase nos libertés publiques
Dialoguons sur des bases franchement communistes
Cher Fabien Roussel, cher camarade,
Depuis quelques mois, vous avez adopté des positions et tenu des propos marquant une certaine inflexion avec ceux de votre prédécesseur. Ainsi avez-vous, pêle-mêle, affirmé la volonté de défendre la « souveraineté économique » de la France et de « voir flotter ensemble le drapeau bleu blanc rouge de la France au côté du drapeau rouge du mouvement ouvrier » le 3 septembre 2019 en conclusion du colloque Jean Jaurès à Toulouse, ou encore condamné les manigances de l’impérialisme états-unien à l’égard des régimes progressistes, autant de positions proches de celles portées avec constance par le PRCF depuis sa création en 2004. Ces positions sont d’autant plus importantes qu’elles interviennent dans un climat d’une triple euro-casse qui frappe la France, la République, les conquêtes sociales et démocratiques, et par là-même la souveraineté nationale et populaire et les intérêts des travailleurs en lutte.
En effet, l’euro-décomposition de la France et de la République s’accélère, ce que vous aviez d’ailleurs relevé en condamnant l’arrêt de la diversification des turbines de General Electric. Cette euro-décomposition, pilotée par Bruxelles, Washington et Berlin dans le cadre de la « construction européenne », des « accords de libre-échange » (ALE) du style TAFTA ou CETA, ainsi que de la « mondialisation heureuse » chère à l’oligarchie politique, économique et médiatique (OPEM) corrompue, etc., représente une menace mortelle pour la souveraineté nationale et populaire, la langue et l’histoire de la France, ainsi que la République sociale et démocratique, une et indivisible, laïque et fraternelle issue de la Révolution française de 1789 et de 1793 et des luttes de 1848, de la Commune, du Front populaire et de la Résistance.
Pour preuve : les députés LREM ont adopté en juillet 2018 un amendement introduisant le « droit à la différenciation » des « territoires » de la France, conformément au « pacte girondin » (dont le titre indique déjà clairement l’orientation antijacobine du projet) cher au monarque réactionnaire Macron, l’homme qui affirme que « fondamentalement [que] le peuple français n’a pas voulu la mort » du roi. Chaque jour, le « tout-globish » envahit davantage les écrans, les publicités, les librairies, les salles de cinéma, les stations télévisées et radiophoniques, les grands centres commerciaux, les banques et entreprises, et désormais l’enseignement supérieur et l’Education nationale entre autres, jusqu’à la « communication » de Macron tout heureux de proclamer « Make our Planet great again » ou d’organiser le « One Planet Summit » à la fin de l’année 2017. Comment ne pas s’offusquer du « Black Friday », de la transformation de la Banque postale en « Ma French Bank » ou du développement du « Ouigo » de la part de la SNCF ? Ce projet selon lequel l’anglais doit « devenir la langue de l’entreprise et des affaires » (comme le proclama l’ancien patron du MEDEF, le baron Sellières, en 2004) détruit la langue française et soumet les travailleurs à la domination du capitalisme euro-atlantique et de la mondialisation néolibérale qui visent à assurer l’emprise totalitaire de l’impérialisme juridique, linguistique et culturel du « tout-globish » sur le monde du travail.
Au-delà, c’est l’histoire de la France qui est progressivement dévoyée, à l’image de la Révolution française criminalisée par le biais de la caricature grossière et mensongère de Robespierre, au profit d’une « histoire des Européens ». C’est ainsi que le ministre de « l’Education nationale » considère qu’« il est totalement prioritaire d’ancrer l’idée européenne chez les jeunes, en leur faisant comprendre que c’est leur avenir » ; un avenir qui passe par la création des établissements public locaux d’enseignement international, les fameux EPLEI financés notamment par les dons de l’UE et qui offrent la possibilité de préparer un « baccalauréat européen » tout en suivant une instruction en anglais depuis la maternelle. A quoi s’ajoute la mise en pièce des bases administratives de la République une et indivisible, à travers la substitution des communes, des départements et de l’Etat par les « euro-métropoles », les « euro-départements » (comme la Moselle depuis juin 2019), les « euro-régions » et le « saut fédéral européen » cher à Macron.
Cette euro-décomposition de la France et de la République s’accompagne de l’euro-destruction accrue des conquêtes sociales et démocratiques arrachés par un puissant parti communiste et par un syndicalisme de classe et de masse. L’actuelle contre-réforme (car il s’agit bel et bien d’une contre-réforme réactionnaire, et certainement pas d’une « réforme » !) des retraites, totalement soutenue par la Commission européenne, n’est que le dernier avatar du projet européiste visant à mettre en place une « nouvelle raison du monde », celle d’un capitalisme supranational à l’échelle européenne, qui consacre les « critères de stabilité et de convergence » de Maastricht, la « totale liberté de circulation » des services, des marchandises, des hommes et – surtout – des capitaux, et la « concurrence libre et non faussée ».
L’UE, vectrice de la « mondialisation heureuse » et pilier majeur du capitalisme néolibéral, détruit de surcroît la « souveraineté économique » à laquelle vous êtes justement attaché cher Fabien Roussel, violant délibérément l’article 3 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) du 26 août 1789, affirmant que « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. ». L’UE ouvre la voie à la soumission des Etats au bon-vouloir des grandes multinationales, conformément aux dispositions du TAFTA qui consacre la suprématie des tribunaux d’arbitrage privés sur les législations nationales. Elle est un dispositif central de l’OPEM euro-atlantique pour revenir sur l’ensemble des conquêtes sociales et démocratiques arrachées de haute lutte.
Comme ces politiques d’arasement de toutes les conquêtes sociales et démocratiques suscitent des résistances de plus en plus vives, le pouvoir macronien, dans la continuité de la répression initiée sous les mandatures précédentes, accélère enfin la fascisation de la France, à travers la répression sauvage et totalement assumée des syndicalistes, des gilets jaunes, des mouvements sociaux, et parfois même des députés vent debout contre la politique du pouvoir macronien. Car contrairement à ce qui était proclamé au soir du premier tour de l’élection présidentielle où Macron était présenté comme un « rempart contre le fascisme », Macron est l’un des plus dangereux carburants de ce dernier, déroulant un véritable « tapis brun » au pseudo « Rassemblement national » xénophobe et fascisant pour tenter d’être de nouveau élu en 2022.
Cette fascisation s’inscrit dans le cadre d’une euro-fascisation accélérée, dont l’exemple le plus sinistre reste l’adoption d’une résolution ouvertement anticommuniste de la part du Parlement européen le 19 septembre dernier, mettant sur un même (et infâme) pied d’égalité l’Allemagne nazie et l’URSS, qui paya au prix de plus de 25 millions de morts la victoire contre le nazisme et réalisa d’immenses sacrifices décisifs comme à Stalingrad. Si l’UE affiche un anticommunisme viscéral et exprime un négationnisme historique à l’encontre du communisme, elle ne condamne pas en revanche les propos du ministre letton de la Défense qui peut affirmer sans problème que « la Waffen SS est la fierté de la Lettonie », ni ne s’offusque de la présence au pouvoir des néonazis ukrainiens ou de la tentative de délégalisation du Parti communiste polonais, ni ne s’émeut du refus des nostalgiques du franquisme que la dépouille du sanguinaire caudillo soit exhumée.
Cette fascisation frappe de surcroît le reste du monde, et notamment le continent latino-américain à l’image du récent coup d’Etat survenu en Bolivie et appuyé par… Macron et l’UE. Comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement pour une France et une UE totalement inféodées à l’OTAN, véritable bras armé de l’impérialisme états-unien ?
Derrière ce sombre tableau, les événements s’accélèrent et démontrent la persistance d’un « noyau révolutionnaire » et de résistances souveraines et populaires comme au Liban, au Chili, en Colombie, en Equateur, en Algérie, et bien entendu en France où la mobilisation massive pour rejeter la contre-réforme des retraites fait vaciller le pouvoir en place. Il n’en reste pas moins que le risque d’un scénario cataclysmique « Macron-Le Pen » en 2022 existe et nécessite donc, plus que jamais, un rassemblement des forces de progrès, MAIS avec un projet clair, orienté vers le socialisme et en franche rupture avec l’UE, l’euro, l’OTAN et le capitalisme. Un nouveau projet de « big bang » de la « gauche » qui rassemblerait des « socialistes », des « écologistes » et d’autres formations politiques et syndicales ayant trahi les aspirations populaires depuis des décennies au nom de la sacro-sainte « construction européenne » et ayant soutenu l’infâme résolution euro-maccarthyste du Parlement européen (à l’image de Raphaël Glucksmann), serait condamné à l’échec, et cela ferait même le jeu du lepénisme en milieu populaire tant les gouvernements européistes de « gauche plurielle » ont laissé, à juste titre, un mauvais souvenir aux travailleurs. Tout au contraire, le mouvement des gilets jaunes et les nombreuses luttes sociales montrent l’urgence de constituer une Alliance de la gauche antifasciste, patriotique, populaire et écologiste, une « AGAPPE » en mesure de structurer un rassemblement populaire majoritaire sur des bases de franche rupture avec l’ordre capitaliste euro-atlantique porté par Macron, le MEDEF, l’UE, Berlin et Washington (un ordre qui se sert du RN pour se perpétuer) pour rendre la victoire possible en 2022. Sur de telles bases 100% anti-Maastricht et 100% antifascistes, les communistes de France, et à travers eux, le mouvement ouvrier et populaire, pourraient, nous en sommes convaincus, redevenir la force motrice du changement comme ils l’étaient avant que les funestes dérives « eurocommunistes », anti-léninistes et social-démocrates de la fin des années 1970 ne viennent totalement dénaturer leur engagement révolutionnaire.
C’est pourquoi nous, PRCF, vous proposons d’échanger dès que possible sur la situation actuelle, mais aussi de nous retrouver autour d’initiatives communes pour défendre la langue française contre le « tout-globish », pour lutter contre l’euro-fascisation criminalisant le communisme et assimilant odieusement ce dernier au nazisme, pour lutter contre l’euro-décomposition de la France et de la République, pour lutter contre l’euro-destruction des conquêtes sociales et démocratiques et contre l’euro-fascisation qui arase nos libertés publiques, et éviter ainsi un cataclysmique scénario en 2022. Nous sommes persuadés que seule une AGAPPE, matrice d’un nouveau Conseil national de la Résistance (CNR) en plaçant les travailleurs au cœur du projet, est en mesure de conduire la République sociale et démocratique, souveraine et laïque, une et indivisible, la France et tous les travailleurs vers de nouveaux « Jours heureux » !
Salutations fraternelles,
Pour le PRCF,
- Léon Landini, président, ancien FTP-MOI,
- Georges Gastaud, secrétaire national
- Fadi Kassem, secrétaire national adjoint et secrétaire de la Commission des relations politiques du PRCF
- Jo Hernandez, secrétaire de la commission Luttes du PRCF