L’histoire ne repasse pas les plats
Karl Marx
Déclaration du secrétariat national du Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF) – 8 septembre 2019
Pressés par le MEDEF et par le CAC-40, tancés par les prescripteurs impériaux (et impérieux !) de Bruxelles et de Berlin, stimulés par une large partie de la droite, Macron et son équipe néo-thatchérienne, ultra-atlantique et hyper-répressive assaillent sur tous les fronts ce qui subsiste de la France indépendante, de la République une et indivisible héritée de la Révolution française, de ses services publics et de sa protection sociale issue de 1936, 1945 et 1968.
Qu’il s’agisse du projet dévastateur de « retraite à points », de la contre-réforme du lycée, de la mise en extinction des statuts publics, de la privatisation d’AdP, d’EDF et de la SNCF, de la vente à la découpe du « produire en France » industriel (Alsthom, Airbus…), de la destruction du Code du travail et des conventions collectives, l’ensemble du système social résultant de deux siècles de luttes peut rapidement basculer dans le néant si la riposte du monde du travail n’est pas à la hauteur des attaques patronales, gouvernementales et européennes.
Pour éradiquer les conquêtes du monde du travail, ce pouvoir de plus en plus minoritaire et policier strangule les libertés syndicales, flique la Toile et les médias, harcèle les résistants sociaux d’une manière de plus en plus fascisante ; tout en pratiquant la xénophobie d’Etat, les prédations néocoloniales et la chasse aux migrants, ce régime antinational sape délibérément les fondements de l’Etat-nation : délitement organisé du territoire national (création de l’euro-département de Moselle, de la communauté unique d’Alsace insérée dans l’Axe rhénan, satellisation des Savoie par le « Grand Genève », etc.), subordination des communes et des départements aux « euro-métropoles », politique linguistique d’anglicisation forcenée, substitution aux principes de « souveraineté nationale » et de « défense nationale » d’une « souveraineté européenne » et d’une « armée européenne » arrimée à l’OTAN, c’est un démantèlement rapide et profondément mortifère de la Nation qu’organise ce pouvoir au service des trusts et de l’impérialisme « français », lequel cherche à étendre leur quête du profit maximal à l’échelle continentale (UE) et « transatlantique » (« CETA », en attendant le retour du « TAFTA »…).
Ajoutons que sur le plan environnemental, sociétal et diplomatique, l’équipe macroniste contribue au saccage de la planète en signant tous les accords transcontinentaux de libre-échange ; elle se montre incapable d’endiguer les féminicides et alimente – par sa servilité à l’égard de Washington et par sa participation ruineuse à la nouvelle course aux armements enclenchée par l’OTAN – les tendances aux guerres impérialistes mondialisées que nourrit l’impérialisme étasunien à l’heure du « America first ! » cher au fascisant Trump.
En même temps, Macron fait montre – dans les formes et les méthodes plus que dans les rythmes et les contenus – d’une certaine prudence tactique : il sait qu’en 2017, sa victoire fut obtenue dans des conditions de légitimité très suspectes (soutenu par 11% des inscrits du 1er tour Macron n’a été élu que par défaut au second tour face au repoussoir Le Pen) ; surtout, en 2019, les Gilets jaunes, les syndicalistes de lutte refusant les orientations réformistes de la CGT et divers secteurs du mouvement social (profs, hospitaliers…) ont révélé l’exaspération d’une large partie du monde du travail et des couches moyennes paupérisées par la politique oligarchique actuellement incarnée par Macron. N’oublions pas que, refusant d’écouter les appareils politiques et syndicaux euro-formatés qui ont légitimé Macron en appelant à voter pour lui en mai 2017, les Gilets jaunes réclament toujours à juste titre la démission de Macron, que leurs chants de lutte se proposent même d’ « aller le chercher chez lui » et que, bravant la sanglante répression qu’ils ont endurée, ces combattants populaires veulent à nouveau manifester le plus près possible des « lieux de pouvoir » en faisant revivre la symbolique insurrectionnelle de la Révolution française… Même si la conscience de classe a sensiblement reculé en France du fait des politiques de désindustrialisation combinées aux capitulations idéologiques consenties par la gauche politico-syndicale établie, les conditions objectives de la situation prérévolutionnaire et potentiellement explosive qu’a révélée la crise des Gilets jaunes n’ont pas pour autant disparu : des millions de travailleurs ne veulent plus, quoi qu’il leur en coûte, « rentrer à la maison » et être « gouvernés comme avant ».
<< La France populaire atteint le point de bascule, nécessitant un immense sursaut de lutte, tous ensemble, en même temps >>
C’est pourquoi, à l’heure où notre pays atteint le dangereux « point de bascule » au-delà duquel la France sociale et républicaine deviendra très difficile à reconstruire (tant auront été cassés le cadre et les outils de la lutte), le PRCF appelle les militants syndicaux de lutte, les travailleurs enclins à remettre le gilet jaune, les militants communistes et tous les progressistes, mais aussi tous les patriotes républicains qui ne veulent pas assister impuissants à l’euro-dissolution réactionnaire de notre pays, à un immense sursaut de lutte. Refusons qu’en notre nom, des états-majors syndicaux discrédités « accompagnent » la casse au nom du prétendu « moindre mal ». On ne négocie pas la honteuse retraite à points assortie de « décotes », d’alignement général vers le bas et d’« âge-pivot » sans cesse relevé, car elle enverra à coup sûr de nouveaux millions de compatriotes, notamment des travailleuses, rejoindre les rangs des miséreux. On ne négocie pas la casse de l’Education nationale, du CNRS, des statuts et de l’Université. On ne négocie pas le démantèlement d’Alsthom au nom d’on ne sait quelle « reconversion » industrielle de la Franche-Comté. Dans ces conditions, il faut plus que jamais…
- développer les résistances tous azimuts, cultiver les convergences interprofessionnelles et la démocratie ouvrière dans les luttes, exiger le retrait des contre-réformes passées, présentes et à venir, construire les conditions d’une grande manifestation nationale de combat « tous ensemble en même temps » pour appeler d’une seule voix à la contre-offensive populaire sans crainte d’exiger la démission de Macron, de débattre franchement du Frexit progressiste, de revendiquer l’élection d’une Constituante mettant fin au régime néo-monarchique de la 5ème République arrimée à Maastricht ; le grand capital casse notre pays et ses acquis, bloquons ses profits ; appelons-en aussi à l’Europe des luttes, à laquelle le blocage de la logistique hexagonale pourrait donner un puissant élan. Dans cet esprit unitaire et combatif, les militants franchement communistes du PRCF iront sans relâche avec leurs propositions sociales, revendicatives et politiques dans les manifs populaires et à la porte des entreprises, des lycées et des facs diffuser des centaines de milliers de tracts ; ils dialogueront fraternellement avec les gilets jaunes ainsi qu’avec les syndicalistes de lutte de la CGT, de la FSU, de SUD, de Force ouvrière, qui refusent frontalement les contre-réformes ;
- réfléchir concrètement à l’urgente reconstruction d’un parti communiste de combat auquel continue de tourner le dos la direction « euro-constructive » du PCF-PGE arrimée au PS dans la perspective des municipales ; camarades communistes, alors que notre pays se meurt en tant que tel, il ne faut pas que le 100ème anniversaire du Congrès de Tours, qui enclencha la séparation organisationnelle des communistes français d’avec les réformistes d’alors, soit une simple commémoration ; décembre 2020 doit être une étape importante vers la reconstruction du parti franchement communiste dont le peuple travailleur a besoin pour résister, contre-attaquer et gagner !
- faire en sorte que les patriotes progressistes, antifascistes et antiracistes engagent un grand dialogue républicain qui permettra d’ancrer dans le débat national l’idée du Frexit progressiste ; sans poser la révolution socialiste en préalable à l’union combative de ceux qui veulent reconstruire une France sociale et souveraine, les marxistes que nous sommes versent au débat l’idée que, plus que jamais auparavant, la lutte pour l’indépendance nationale est devenue inséparable de la mise hors d’état de nuire du grand capital qui détruit notre pays : si bien que chaque patriote conséquent devra tôt ou tard se prononcer pour le socialisme et contre le capitalisme. Loin de nous éloigner de la construction d’un large Front antifasciste, patriotique, populaire et écologiste, le dialogue politique entre communistes, le débat courtois entre forces progressistes anti-Maastricht, l’alliance renouée du drapeau rouge et du drapeau tricolore sont donc indispensables à l’émergence d’un tel front, aux antipodes de tout repli politique comme de toute tentation d’importer en France la néfaste alliance « à l’italienne » entre l’extrême droite et certains eurosceptiques issus de la gauche.
- implanter et construire partout le PRCF sur la base de la ligne arrêtée par la conférence nationale de juin dernier en le tournant principalement vers les luttes et vers le dialogue à la porte des entreprises, des quartiers populaires, des lycées et des facs.
Notre pays est parvenu au « point de bascule » entre euro-dissolution définitive et sursaut populaire pouvant conduire à une nouvelle révolution française de caractère socialiste et centrée sur le monde du travail, comme y invitait déjà d’ailleurs le programme du CNR : encore une fois, les acquis sociaux et démocratiques, l’emploi productif, les services publics, le maillage territorial républicain, l’indépendance nationale et la langue de notre pays risquent fort de sombrer rapidement si la riposte à Macron est insuffisante dans les quelques mois et années à venir… Ce serait encore plus le cas si les vrais communistes, les syndicalistes de lutte, les vrais progressistes manquaient de l’audace nécessaire pour forger ensemble et à temps une alternative populaire 100% antifasciste, anti-Maastricht et anti-oligarchique.
A l’inverse, l’ampleur de l’offensive patronale et euro-macroniste, l’exaspération sociale profonde à laquelle elle se heurte déjà, l’héritage historique de cette France frondeuse que Marx définissait déjà comme « le pays des luttes de classes menées jusqu’au bout », permettent d’espérer que les forces populaires sauront s’unir à temps dans un grand sursaut salvateur tel que notre pays en a déjà connus plusieurs durant son histoire multiséculaire. Encore faut-il qu’à l’approche de cette épreuve décisive, les forces progressistes, dont le PRCF s’efforce d’être un élément modeste, mais d’avant-garde, se portent à la hauteur de la situation historique comme sut le faire le PCF quand, le 10 juillet 1940, clandestin et pourchassé, il déclara dans un appel signé de Maurice Thorez et de Jacques Duclos : « Jamais, non jamais, un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d’esclaves ! ».