Déclaration à l’occasion des présidentielles et législatives du
- Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF)
- Coordination Communiste (CC59/62 – RCC)
- Cercle Communiste d’Alsace (RCC)
- Cercle Ouvrier du Bassin Minier Ouest
- Cercle Henri Barbusse (RCC)
- Réveil communiste
PROTÉGER ET ÉLARGIR UN ESPACE POLITIQUE ET SOCIAL FRANCHEMENT PROGRESSISTE
Même s’il est clair que la lutte anti-impérialiste, la résistance à l’offensive antisociale et le travail de reconstruction communiste conservent leur primat politique en toutes circonstances, les militants communistes et le mouvement ouvrier ne peuvent regarder avec indifférence les élections présidentielles et législatives qui, tous les cinq ans, re-déploient le rapport des forces entre les classes sociales dans notre pays. Et c’est encore plus vrai dans une situation où le FN et la droite versaillaise la plus ultra, celle qu’incarne Fillon, abordent l’élection présidentielle de manière extrêmement agressive.
1 – La « France insoumise » et nous.
Les analyses respectives du PRCF et de la Coordination Communiste C59/62 (RCC) ont conduit nos deux organisations à constater que, dans les conditions actuelles, et malgré les insuffisances objectives de la « France insoumise », la candidature Mélenchon pouvait être un point d’appui appréciable pour préserver et élargir l’espace politique indispensable au mouvement social, pour faire face à la fois d’une manière crédible au FN fascisant, au parti LR thatchérien et au PS maastrichtien et esquisser avec des centaines de milliers de citoyens mobilisés les prémisses du Front antifasciste, antilibéral, patriotique, populaire et écologique qui est indispensable pour résister à l’offensive du MEDEF, contrer la fascisation galopante et l’État policier, sortir la France de l’euro et de l’UE/OTAN, relancer la dynamique populaire indispensable pour que soit reposée sur des bases larges la question du socialisme pour la France.
Bien entendu, cela ne signifie en rien que nous, militants communistes 100% anti-UE qui voulons clairement reconstruire un Parti communiste en France, nous entendrions nous rallier à ou nous dissoudre dans un « mouvement » : pour nous la construction du front populaire antimonopoliste et antifasciste nécessite plus que jamais l’intervention unie et convergente des vrais communistes, jusques et y compris la reconstruction du vrai parti communiste français aujourd’hui dénaturé par des décennies de mutation révisionniste social-démocrate. Il n’y a pas opposition en effet, mais au contraire interaction dynamique, entre la reconstruction du parti, l’engagement communiste dans les luttes sociales et l’intervention ici et maintenant pour construire le front populaire antimonopoliste et antifasciste avec les militants progressistes, républicains, les syndicalistes de lutte, etc. qui s’engagent dans, autour, avec la « France insoumise », y compris des milliers de communistes las d’attendre que le PCF officiel, désormais confondu avec le Parti de la Gauche Européenne, adopte une position claire, indépendante du Parti socialiste au lieu de « lire » la conjoncture politique à partir d’une grille purement politicienne dictée de A à Z par des questions d’appareil et de places. La rupture avec le PS est la question posée et à résoudre.
Cela n’interdit nullement, bien au contraire, d’exprimer nos positions indépendantes, critiques et constructives tout à la fois, pour que la dynamique autour de la candidature Mélenchon, qui est aujourd’hui centrée plutôt sur la partie progressiste et résistante des classes moyennes, opère une critique beaucoup plus franche et centrale de la funeste « construction » européenne. La formule de JLM « l’UE, on la change ou on la quitte ! », marque en effet une avancée intéressante dans l’idée d’une rupture franche avec l’UE puis, implicitement, elle pose enfin la question, d’un « FREXIT » progressiste ouvrant la voie à un affrontement de classes et de masse avec l’oligarchie dans les directions conjointes de l’indépendance nationale, des nationalisations démocratiques, du progrès social, de la coopération internationale et, in fine, de la rupture révolutionnaire avec le grand capital et son système. En même temps, cette formule « reste au milieu du gué » en laissant entendre qu’une « négociation » pourrait arracher à l’impérialisme allemand des concessions permettant à la France de demeurer dans l’UE, alors que l’UE-OTAN a été conçue pour détruire les acquis sociaux, menacer la paix derrière l’impérialisme US, écraser les souverainetés nationales, dominer l’Europe de l’Est et du Sud, recycler l’impérialisme allemand, maintenir la domination néocoloniale sur l’Afrique, imposer un modèle culturel et sociolinguistique régressif aux peuples d’Europe et du monde.
Face à cette contradiction de classe que comporte la formule « en mouvement » de JLM sur l’UE, deux attitudes sont possibles : soit considérer statiquement qu’il s’agit d’un point d’arrivée et, dans cette hypothèse, soit rallier les conceptions « alter-européistes » de la petite bourgeoisie et rallier le réformisme, soit considérer qu’il s’agit d’un point d’appui à développer et à travailler pour que, expérience de l’UE et explications des communistes aidant, une majorité d’insoumis deviennent à 100% insoumis à l’UE et comprennent qu’il n’y a rien à négocier avec l’UE, que la souveraineté des peuples ne se négocie pas et que la sortie unilatérale de l’UE-OTAN est la condition incontournable du changement progressiste en France.
De même, les communistes ne doivent-il ni adhérer passivement à la « révolution citoyenne et pacifique » que propose JLM, ni la refuser avec dédain, mais expliquer patiemment que la conquête d’une véritable démocratie populaire passe par l’expropriation complète du capital, par le pouvoir du peuple, en un mot par la révolution socialiste dans laquelle la classe ouvrière et son parti reconstruit joueront un rôle central et moteur. Et dire cela ne serait pas « plomber » ou « gêner » le regroupement des « insoumis », mais bien au contraire leur permettre, en ouvrant en grand le débat sur le Frexit progressiste et sur le socialisme, d’intéresser enfin des millions d’ouvriers et d’employés qui se détournent des élections ou qui lorgnent du côté du FN parce qu’ils se laissent prendre à sa fausse radicalité patriotique et sociale.
2 – La « candidature communiste » et nous.
Nous, communistes, le plus souvent issus du PCF, mais organisés hors de ses structures, savons ce que nous devons à ce parti et son histoire, et ne souhaitons en rien « accélérer » la disparition du PCF en soutenant JLM. C’est au contraire une candidature PCF séparée et inaudible pour les larges masses, qui accélérerait ce processus, autant par l’image de ce parti qui a animé tant de fronts victorieux sans sectarisme que suite aux résultats qu’il obtiendrait au soir du premier tour.
Un front est toujours par définition hétéroclite, et il ne peut qu’évoluer d’une façon ou d’une autre, selon que le peuple y trouve sa place ou non. Seule l’action organisée et collective des communistes peut l’orienter dans un sens révolutionnaire, pourvu que leur poids politique soit suffisant et que leur analyse soit juste et lisible. Et parlant de communistes militant aux côtés de la « France insoumise », nous n’avons nullement à l’esprit Pierre Laurent ou M.-G. Buffet, dont il faut précisément contrer l’influence délétère sur ce rassemblement politique, mais tous les militants de terrain, y compris des structures de base du PCF, qui ont déjà rejoint ce front ou qui sont en passe de le rejoindre, et auxquels précisément, il faut fournir des éléments d’orientation proprement communiste.
Ainsi la question de l’identité communiste (centrale pour nous comme pour certains camarades du PCF attachés au marxisme), ne peut être instrumentalisée par une direction nationale social-démocrate en fonction de questions de places qui sont totalement déconnectées des revendications immédiates des travailleurs et de la nécessité de tout tenter pour conjurer le second tour cauchemardesque qui s’annonce entre Le Pen et Fillon. S’opposer à une direction sociale-démocrate, fut-elle celle du PCF, au moyen du soutien au front d’abord anti-PS que constitue la France Insoumise, ce n’est pas être « anticommuniste », au contraire, c’est faire échec à l’anticommunisme qui monterait en flèche si les communistes se présentaient dans ces élections comme uniquement soucieux de l’avenir d’un appareil discrédité plutôt que de l’avenir même de la classe ouvrière et de la nation. Et la réduction du débat à une superficielle concurrence entre « communistes du PCF » et « sociaux-démocrates de la France Insoumise » ne peut que nuire à la clarté de cette évidence: dans les rapports de forces actuels et prévisibles, aucun autre candidat que JLM ne peut espérer dépasser et frapper plus fort le PS sur sa gauche.
Cela étant, la direction du PCF-PGE s’est prononcée – de manière extrêmement ambiguë d’ailleurs – pour une « candidature communiste ». Nous pourrions apprécier cette orientation d’apparence identitaire si elle s’enracinait dans un vrai programme communiste comportant notamment la rupture totale avec l’UE et remettant en discussion la question du socialisme pour la France. Mais pour le moment, ce n’est pas du tout vers cela qu’on s’oriente : l’annonce d’une candidature ou d’une pré-candidature provisoire du PCF n’est absolument pas claire sur le contenu et André Chassaigne, dont le nom est souvent cité à ce sujet, a d’emblée prévenu qu’il ne se présenterait pas dans l’esprit de défendre l’identité communiste, encore moins de rompre avec l’UE, ni même, comme fait au moins JLM, de poser la question d’un possible « Frexit » progressiste, mais pour « rassembler la gauche », y compris les socialistes et les euros-écologistes. C’est si vrai que la commission économique du PCF vient de faire une critique de droite du programme de la « France insoumise » en lui reprochant de se référer à un « indépendantisme français » et d’évoquer la perspective d’une possible sortie de l’UE en qualifiant ces positions de « nationalistes » et de « populistes ». C’est mot pour mot la critique que le PS pro-Maastricht adresse lui aussi à JLM. Rien n’est clair non plus sur un éventuel désistement du PCF au 1er tour en faveur du revenant politique Montebourg ou d’un autre candidat PS dans le cas où celui-ci gagnerait la « primaire » socialiste et qu’aussitôt, dans cette éventualité, l’aile droite de la social-démocratie rallierait très vraisemblablement la candidature néolibérale avouée de Macron.
Malgré les espoirs subjectifs démesurés que certains camarades marxistes du PCF placent sur elle, il semble en réalité qu’en l’état, cette éventuelle candidature PCF qui n’aurait rien de communiste en l’état, ne tend qu’à briser la dynamique créée autour de JLM, qu’à empêcher qu’au 1er tour, JLM ne dépasse le PS en plongeant ce parti malfaisant dans une crise réjouissante, qu’à empêcher l’émergence d’un espace politique « indépendantiste », sociale, euro-critique, laïque, antifasciste et antiraciste, qu’à permettre au PS de conserver à l’issue de la présidentielle l’hégémonie qu’il avait conquise à gauche pour illusoirement sauver quelques sièges PCF aux législatives.
C’est pourquoi nous demandons aux camarades du PCF qui se réclament du marxisme de clarifier le contenu de cette éventuelle candidature, de ne pas en faire un enjeu « en soi », indépendamment de la clarification préalable dudit candidat sur l’UE et le socialisme, mais aussi l’attitude du PCF au 1er tour et de son candidat envers le PS aux présidentielles et aux législatives : sans cela, en fait de candidature « identitaire » communiste, le peuple et les communistes eux-mêmes perdraient sur tous les terrains : la dynamique populaire à la gauche du PCF étant divisée, elle aurait bien du mal à déborder le PS sur sa gauche et à maintenir ouvert l’espace politique nécessaire à la poursuite des luttes si la droite ultra et/ou le FN s’emparent de l’Élysée avec leur programme de cauchemar.
Et en même temps, la clarification sur l’identité communiste, qui est si nécessaire à la reconstruction d’un vrai parti communiste, reculerait elle aussi puisqu’il s’agirait pour nos excellents camarades de faire bloc sur une étiquette avec leurs actuels dirigeants socialo- et euro-dépendants, plutôt que de reconstruire ensemble, en rompant avec l’influence délétère de leur direction identifiée au PGE (dont P. Laurent est le président !), l’action commune des communistes pour les quatre sorties (euro, UE, OTAN dans la perspective d’une rupture révolutionnaire avec le capitalisme), socle de l’urgente reconstruction d’un parti d’avant-garde des travailleurs. D’une manière générale, il faut se rappeler de la définition que Marx et Engels donnent du Parti communiste dans le « Manifeste » :
Quelle est la position des communistes par rapport à l’ensemble des prolétaires ?
Ils n’ont point d’intérêts qui les séparent de l’ensemble du prolétariat.
Ils n’établissent pas de principes particuliers sur lesquels ils voudraient modeler le mouvement ouvrier.
Dans les différentes phases que traverse la lutte entre prolétaires et bourgeois, ils représentent toujours les intérêts du mouvement dans sa totalité.
Pratiquement, les communistes sont donc la fraction la plus résolue des partis ouvriers de tous les pays, la fraction qui stimule toutes les autres; théoriquement, ils ont sur le reste du prolétariat l’avantage d’une intelligence claire des conditions, de la marche et des fins générales du mouvement prolétarien.
Conclusion
Continuant de débattre sur leurs différences de vue à propos de certains sujets, le Rassemblement des Cercles Communistes (RCC) et le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF) continueront de s’adresser fraternellement à tous les camarades désireux de préserver l’identité communiste, par essence dynamique, ouvrière et populaire, à tous les militant de la « France insoumise », à tout le mouvement syndical et social de classe, à tous les progressistes, pour que se développe au plus vite en France un large mouvement pluriel, intégrant les communistes comme une partie indépendante et incontournable, capable de faire barrage à la fois à la fascisation et à l’euro-désintégration de la France, de combattre les guerres impérialistes, le fascisme et le thatchérisme menaçants et d’ouvrir à notre pays une alternative progressiste vitale pour l’avenir du monde du travail.
25/11/2016
Vieux matérialiste marxisant, mais pas léniniste pur-jus (nul n’est parfait), l’ensemble de l’analyse proposée me paraît assez juste. Dans ce type particulier d’élection présidentielle, seule la candidature de Mélenchon pourrait offrir un petit souffle à une mobilisation transformatrice et progressiste. Je n’oublie pas d’où vient Mélenchon: pas seulement du PS, mais surtout de son soutien et de sa participation (politique, intellectuelle, gouvernementale) à la construction de Cette Europe. Comme vous le signalez, son discours s’est infléchi vers un début de mise en cause de l’appartenance à l’UE, même s’il se limite au terme « indépendantisme » (pourquoi pas « indépendance »?). Peut mieux faire sans doute. Pour cela, il faudrait qu’il puisse ressentir un mouvement de fond le poussant à aller plus loin. C’est en ce sens que cette élection est susceptible d’amorcer un rassemblement plus massif visant à se débarrasser du carcan du totalitarisme de l’UE (ce qui ne supprimerait pas pour autant la domination capitaliste…). Encore faudrait-il que le candidat, bien que son programme soit ambitieux, puisse être davantage le représentant des travailleurs et des chômeurs dont le premier souci –et on peut légitimement le regretter– n’est pas la rédaction d’une nouvelle constitution: d’où la nécessité de l’articuler avec des mesures concrètes. Ce qui nous amène à évoquer vos 4 sorties: l’UE, l’euro, l’OTAN…et le capitalisme? Sans voir trop rapidement aussi loin, des sorties élaborées en commun avec les vilains pays du sud, pour commencer –Grèce, Italie, Espagne, Portugal– rendraient l’avenir plus supportable…et l’espoir encore plus crédible.
Méc-créant.
Rappel de mon blog: Immondialisation:peuples en solde!