Quatre « sorties » et dix « entrées »pour une perspective révolutionnaire
Par Georges Gastaud, secrétaire national du PRCF – juillet 2016
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Alors que Valls-MEDEF impose sa « Loi Travail » à coups de 49/3, que l’OTAN réunie à Varsovie planifie sa future guerre d’agression contre la Russie, que les LR et le FN rivalisent de démagogie fascisante pour exploiter l’odieux attentat de Nice, il peut sembler audacieux de mettre en débat un programme de transition révolutionnaire, comme nous osons le faire ici.
Et pourtant, c’est le devoir de toute organisation communiste véritable que de mettre en cohérence ses propositions alternatives ; pas seulement pour préparer le changement de société, mais pour résister et contre-attaquer ici et maintenant. Car si nécessaires qu’ils soient, les combats revendicatifs n’ont jamais suffi pour faire plier le capital : il ne cède – et ce fut vrai aussi en 36, en 45, voire en 68 – que lorsqu’il craint de voir la classe travailleuse accéder au pouvoir pour appliquer un projet global de transformation sociale. C’est ce qu’expliquait Lénine qui n’avait rien contre les réformes sociales mais qui n’en faisait pas moins observer qu’ « on ne peut avancer d’un pas si l’on craint d’aller au socialisme » et que « les réformes sont la retombée de la lutte révolutionnaire ».
Car le socialisme, première phase de la société communiste, reste la solution de fond à la crise systémique du capitalisme : ce n’est pas par dogmatisme que nous disons qu’il faut « socialiser les grands moyens de production et d’échange » : c’est parce qu’une société dans laquelle une étroite oligarchie monopolise les secteurs-clés de l’économie, devient forcément de plus en plus injuste, dictatoriale et invivable. Et ce n’est pas par passéisme que nous disons qu’il faut mettre en place un pouvoir populaire « centré sur le monde du travail», comme le stipulait le programme du CNR intitulé Les Jours heureux : c’est parce qu’il faut être du dernier aveuglement pour ne pas voir que l’actuelle « démocratie » bourgeoise pilotée par le Parti Maastrichtien Unique (PS et LR) n’est plus qu’un théâtre d’ombres derrière lequel on ne sait qui a le plus d’influence : s’agit-il du MEDEF qui rêve de dissoudre la CGT, de M. Juncker, le patron de l’UE qui organisa le plus grand paradis fiscal d’Europe, d’A. Merkel, qui « dikte » sa loi d’airain à l’Europe du Sud, ou de Barroso qui, après avoir servi la finance à Bruxelles, s’en va cyniquement palper ses dividendes à la tête de Goldman-Sachs !
Mais pour retrouver la voie du socialisme, le mouvement ouvrier a besoin d’une stratégie. Pour cela, il faut se défier à la fois du gauchisme, qui promet la révolution sans donner l’itinéraire qui y mène, et de l’ « union de la gauche » en faillite qui revient en fait, pour le PCF officiel, à se soumettre au PS, lui-même inféodé à l’UE, à l’OTAN et à l’ « ordre » néolibéral. Le PRCF propose au contraire un FRont Antifasciste, Patriotique, Populaire et Ecologique (FR.A.P.P.E. !), il met l’accent sur le rôle dirigeant de la classe ouvrière dans le rassemblement populaire contre l’oligarchie (ce sont les ouvriers des transports et des raffineries qui ont mené l’offensive anti-loi Travail) ; et dans le droit fil du Front populaire et de la Résistance, le PRCF unit le drapeau tricolore au drapeau rouge pour appeler notre peuple à combattre la « construction européenne » et le « Pacte transatlantique » qui sont au cœur de la stratégie antinationale du MEDEF. Alors, cessons de languir après l’introuvable « Europe sociale » et appelons la France à sortir de l’euro, de l’UE, de l’OTAN et du capitalisme dans une seule et même dynamique populaire débouchant sur la révolution socialiste.
Mais on ne peut sortir de quelque chose sans entrer dans autre chose : et c’est là qu’un programme de transition permettant au peuple de satisfaire des revendications vitales et de conquérir des positions de lutte dans la société, devient incontournable. Si, comme le disait encore Lénine, « le socialisme est l’œuvre vivante des masses » – il faut que le chemin qui y mène « parle » à toutes les couches populaires et moyennes qui étouffent sous le capitalisme, mais qui doivent se convaincre de la nécessité du socialisme à partir de leur propre expérience. Et c’est à quoi peut servir le présent programme qui est soumis aux critiques et aux contre-propositions. Il se veut un outil pour fédérer les luttes, non seulement autour des quatre sorties rappelées ci-dessus, mais autour de dix entrées à activer solidairement :
- Indépendance nationale, et pour cela en effet, sortie la plus rapide possible de l’euro, de l’UE, de l’OTAN. Ce qui implique la reconstitution de tous les attributs monétaire, budgétaire, économique, militaire et diplomatique, de la souveraineté nationale ;
- Démocratie et souveraineté populaires, centralité du monde du travail ! Assez de cette Vème République reformatée par Maastricht ! La parole au peuple pour une nouvelle constitution élargissant la démocratie et permettant aux travailleurs de peser à tous niveaux (gouvernement mais aussi entreprise, quartier, commune rurale ou campus…). Pour que cette démocratie ne soit pas balayée par la contre-révolution, il faudra rétablir l’armée de conscription avec de larges droits pour les appelés et créer les conditions pour que le peuple dispose des armes dans un cadre démocratique : l’Etat sera placé sous le contrôle du peuple et non l’inverse ! La Marseillaise de 1793 ne clame-t-elle pas : Aux armes citoyens !
- Nationalisation démocratique – sans indemnités pour les gros actionnaires – des banques et des secteurs-clés de l’économie, notamment du CAC-40, mais aussi de l’énergie, des autoroutes, des aéroports et de la grande distribution ; contrôle strict des flux de capitaux aux frontières. Les travailleurs et les usagers seront largement associés à la gestion par l’Etat démocratique.
- Reconstruction du « produire en France » industriel, agricole et halieutique avec l’objectif de rééquilibrer le commerce extérieur, de satisfaire les besoins avec des productions nationales s’articulant aux coopérations internationales. A partir du nouveau secteur public industriel, une planification démocratique adossée à l’intervention des travailleurs déploiera l’innovation et mettra la grande distribution nationalisée au service de l’agriculture paysanne ; les banques aideront les PME, l’artisanat, le commerce de proximité, l’installation des jeunes ménages ; la taxation du fret autoroutier européen transitant par la France servira à la ré-industrialisation du pays.
- Reprendre le chemin du progrès social, de la réduction des inégalités sociales et de la lutte contre les discriminations en augmentant fortement les salaires et les pensions petits et moyens, en allant vers le remboursement à 100% des soins médicaux et vers la gratuité totale de l’Université, vers le retour du livret A pour financer le logement social, en stabilisant l’ensemble des emplois précaires (CDI, statuts publics, conventions de branche, Code du travail protecteur…), en taxant fortement le grand capital et les grandes fortunes, voire en confisquant les capitaux placés dans les paradis fiscaux, en combattant dans un esprit républicain le racisme, le sexisme, l’homophobie.
- Reconstituer les grands services publics : santé, éducation, transports, équipement et aménagement du territoire… Pour une Education nationale de qualité pour tous, pour une Université démocratisée et une grande Recherche scientifique publique.
- Reconstituer la République une, laïque et indivisible en abolissant les baronnies régionales (contre-réformes territoriales), en faisant renaître la démocratie communale, en séparant effectivement l’Etat de tous les cultes, en combattant les replis communautaires et le séparatisme régionaliste, en développant les langues régionales dans le cadre républicain ;
- Pour une politique internationale défendant la paix mondiale et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ; pour une politique de coopération économique et culturelle tous azimuts, remplaçant la ruineuse « concurrence libre et non faussée » chère à l’UE par des échanges équilibrés et mutuellement avantageux d’Etat à Etat.
- Pour une Renaissance culturelle de la France, de la langue française, de la Francophonie internationale, contre le tout-anglais destructeur, pour des échanges équilibrés avec tous les pays, y compris les pays progressistes de l’ALBA, mais aussi avec la Chine, la Russie, le Brésil, l’Afrique, le monde arabo-musulman qui doit redevenir notre ami.
- Pour défendre l’environnement et la santé publique contre le tout-profit par ex. en favorisant systématiquement le développement du rail contre le camionnage, en développant l’emploi cheminot y compris en direction des salariés du camionnage.
Ce n’est là qu’un aperçu du programme que vous allez lire, qui a coûté des mois de travail à chaque militant bénévole du PRCF et qui ne prendra tout son sens qu’en étant étroitement associé aux luttes sociales avec l’objectif de dessiner des solidarités entre les secteurs très divers en mouvement : ouvriers, enseignants, étudiants, paysans, etc.
La période électorale arrive et certains vont mettre en valeur leur brillante personnalité en cachant que dans le cadre hyper-contraint du capitalisme et de son UE/OTAN, les intérêts du peuple n’ont aucun poids. Raison de plus pour revenir aux idées, aux luttes et à un vrai programme d’action progressiste pour vivre mieux et « changer la vie ».