CONTRE LA MARCHE A LA GUERRE EN SYRIE
La grande salle de l’Agéca était presque pleine: près de cent personnes s’étaient déplacées, ce 7 janvier, à l’invitation conjointe du Comité Valmy et du Pôle de Renaissance Communiste en France, pour discuter de la situation en Syrie et des actions à mener pour enrayer l’intervention armée impérialiste en préparation contre le peuple syrien.
Claude Beaulieu, du Comité Valmy, rendit compte en détails d’un voyage sur place à l’automne dernier, où il a rencontré notamment des militaires syriens et des journalistes français. A cette occasion, il a pu mesurer l’ampleur de la manipulation médiatique : tous les morts civils des affrontements sont présupposés « victimes du régime ». Pourtant, l’opposition armée fait des dégâts considérables – comme en témoignent les soldats amputés vus à l’hôpital, survivants de traquenards où on les a appelés pour protéger des civils en danger, et où ils se sont retrouvés abattus par des tireurs embusqués.
Côté médias, silence radio là-dessus, tout comme sur les libérationsde prisonniers consenties par Damas. Silence aussi sur un sondage publié par la chaîne qatari Al Jazira (pourtant anti-Assad), selon lequel 55% des Syriens soutiennent leur régime. Quant aux manifestations pro-Assad, une étrange alchimie les transforme en immanquablement en rassemblements d’opposants sur les chaînes de télévision françaises…
Bruno Drewski, de l’Appel Franco-Arabe, rappela clairement que les guerres menées au nom de la « Démocratie » sont en fait toujours des agressions du fort contre le faible, et que quoi qu’on pense par ailleurs du pays agressé, c’est à son peuple et à lui seul de décider de changer ou non de régime. C’est pourquoi les appels aux sanctions contre Damas – préparatifs évidents à une intervention armée – et l’inquiétante facilité avec laquelle l’opposition dure se procure des armes – preuve d’ingérences étrangères dans le conflit intérieur syrien – doivent décider les progressistes à prendre parti pour Damas contre le « Conseil National Syrien » qui, comme le rappela au passage Claude Beaulieu, a réclamé une intervention armée des puissances impérialistes, alors que de son côté, Sarkozy, dans ses vœux à l’armée à Brest, disant la France prête à intervenir…
Prenant la parole pour le P. R. C. F. , Vincent Flament commença par comparer les communiqués du Parti Communiste Syrien (pour qui « tout changement interne doit être considéré comme partie intégrante de la souveraineté nationale de n’importe quel pays »), et du P. C. F., qui, dans un communiqué du 30 décembre, appelle carrément la France et l’Union Européenne à renforcer les sanctions pour « isoler le régime de Damas ». Le P. C. S. ne dispense pas de critiquer Bachar el Assad, dont il était un opposant résolu jusqu’à ce que les événements de ces derniers mois l’amènent à une politique d’unité nationale, et il se félicite des résultats obtenus par les manifestations pacifiques réclamant la démocratisation du régime. Mais il réfuse à juste titre l’ingérence étrangère, tandis que le P. C. F. réclame son amplification ! Tous les vrais progressistes de France doivent se mobiliser et se préparer à des manifestations publiques pour éviter la réédition de l’opération contre la Libye.
Enfin, le Colonel Corvez, de Résistance et Renouveau Gaulliste, organisation membre de l’Arc Républicain de Progrès comme le Pôle et Valmy, revenu lui aussi de Syrie, fit état de la présence de forces spéciales françaises et turques au Qatar pour entraîner l’« Armée Libre de Syrie », de provocations armées lors de manifestations, et de l’action de tireurs isolés pour faire dégénérer la situation. Il rappela que Damas avait consenti de nombreuses réformes – censurées par nos médias – dont la suppression de l’article 8 de la Constitution, qui assurait la prééminence du parti Baath, et la libération de la presse. Il montra aussi le risque grave d’une escalade et d’une internationalisation du conflit, car la Chine et la Russie étaient cette fois décidées à faire obstacle aux U. S. A.
Le débat avec la salle, riche et animé, montra une réelle volonté des participants d’agir pour éviter la guerre. Des Syriens vivant en France informèrent l’assemblée de la tenue de manifestations régulières à Paris dans ce sens – et des nombreuses menaces et agressions dont elles étaient l’objet. Il se trouva bien quelqu’un pour oser proposer de contacter le Front National afin de rassembler largement en faveur du régime syrien, mais il se fit séchement contrer, notamment par des militants du P. R. C. F., et son discours ne rencontra aucun écho. Après quatre heures d’échanges, la tenue d’une nouvelle réunion davantage tournée vers l’action pratique fut décidé pour la mi-février.