7 AOÛT 2018
C’est l’été et il fait chaud. Certains coulent des jours paisibles sur les plages, à bronzer, ou bien se baladent en montagne. Pourtant tout n’est pas rose pendant ces périodes estivales, la preuve en est de l’affaire BENALLA qui touche aux plus hautes sphères de l’État, affaire qui connaît des rebondissements de jour en jour et laisse pointer le risque d’apparition d’une milice privée « En Marche ». Cependant, ce n’est pas tout ! Il y a pire ! Pour les divers groupes d’extrême-droite c’est la saison des camps d’été…
Le Bastion social, groupe qui fait polémique et qui se veut l’incarnation française du mouvement italien Casapound (de francs fascistes, ceux-là), faisait son camp d’été du 29 juin au 1er juillet de cette année dans l’Yonne. Le camp Edelweiss porté par le racialiste communautariste blanc Daniel Conversano se déroulait quant à lui du 14 au 19 juillet. Celui de Jeune Nation se déroulait du 9 au 15 juillet au nord de Toulouse : ce groupe est issu de la dissolution de l’Œuvre Française après la mort de Clément Méric. Il reste à venir le camp d’été des royalistes de l’Action française au Château d’Ailly (département de la Loire) dés le 21 août prochain.
Qu’est-ce qu’on y fait dans ces camps d’été ? Cela va des conférences aux exercices pratiques, des exercices de sport de combat à la prise de parole en public. Certaines personnes (des journalistes) ont pu constater que certains participants avaient une bonne connaissance des chants racistes (le cas des anciens camps de l’AF), et qu’on avait une peur bleue des journalistes (comme chez Jeune Nation).
Les organisateurs ? Cela va d’une bande de communicants (AF), à des illuminés racistes (Daniel Conversano, visiblement remis des cours de MMA de Soral) à des petites racailles (Yvan Benedetti de Jeune Nation, qui a déjà déclaré être « antisioniste, antisémite, anti-juif » (1)).
Pourquoi ces camps sont-ils inquiétants ?
Même si parfois leur nombre est faible comme pour le camp de Jeune Nation, ces camps d’été et leur potentiel succès démontre une montée des mouvements fascistes, ce qui est plus effrayant, au sein de la jeunesse (2).
De plus, loin de représenter un contre-pouvoir crédible à LaREM, nous avons bien vu une alliance tacite entre le parti du gouvernement et des groupuscules nationalistes et fascistes, comme en démontre le laxisme envers les actions de Defend Europe, ou encore l’aide apportée par l’extrême-droite au gouvernement pour débloquer les facs tandis que les militants de gauche et les syndicalistes sont poursuivis.
D’autre part, nous assistons de plus en plus à des attaques racistes en France à l’instar de ces sept jeunes visés par des tirs à Beaune, pendant que les attaquants leur lançaient des paroles racistes (3). Des attaques qui touchent même le sport amateur (4).
Pourquoi séduisent-ils ?
Sans doute à cause de l’accent mis sur la « communauté », même si celle-ci est très réduite, aux blancs particulièrement. Dans un monde où la société n’existe pas, pour paraphraser Thatcher, où l’on apprend en école de commerce à ne surtout pas s’attacher aux hommes, où l’on prône l’individualisme le plus bête, il est normal que certains cherchent à retrouver un sens du commun. Au demeurant, cela n’est pas propre à l’extrême-droite. Si on est un peu observateur, la même mécanique est à l’œuvre chez nombres de gauchistes partant faire du bio-local loin de Paris et qui veulent vivre en-dehors du système (plutôt en avoir l’illusion). La différence primordiale avec nos racialistes blancs, c’est que ce genre de communauté n’est pas exclusif et ne débouche pas forcément sur un rejet de l’autre (voire à la haine pure et simple), alors qu’il est le point de départ pour les groupes d’extrême-droite auquel s’ajoute bien souvent un sentiment (faux) de supériorité sur les autres. N’omettons pas non plus l’esthétique militaire et para-militaire, soi-disant « ordonnée », des groupuscules se préparant méticuleusement au « choc des civilisations », qui peut séduire et rassurer dans une période de capitalisme sauvage et exterministe.
Posons une question qui fâche : sont-ils vraiment patriotes tous ces fachos ?
La réponse est non, ce sont des « nationalistes », au sens le plus éloigné qui soit du nationalisme comme ont pu l’entendre SANKARA ou CHÁVEZ, c’est-à-dire au sens anti-impérialiste.
Le patriotisme c’est le fait d’aimer son pays et de vouloir le défendre. Il n’implique aucune supériorité d’un peuple sur un autre !
Le nationalisme c’est l’inverse ! Francis Arzalier, docteur en histoire moderne et contemporaine le définit comme « une idéologie qui sacralise la nation, se la représente comme un ensemble d’individus qui ont les mêmes intérêts, au sein desquels les oppositions de classe entre exploiteurs et exploités n’existent pas. Tout nationalisme nie cette découverte scientifique de Marx, la lutte de classes, et est donc totalement inconciliable avec l’idéal révolutionnaire, même s’il peut y avoir à certaines occasions alliance pour un objectif commun » (5). Le nationalisme n’est qu’une idéologie creuse, sur laquelle on peut rajouter ce que l’on veut.
Ils ne représentent pas même la Nation française ! Outre que la plupart des gens dont ils se revendiquent (Maurras et Pétain par exemple) ont été les premiers à vendre la France pour sauvegarder les privilèges des classes aisées, la Nation française issue de la Révolution française, c’est classiquement (même bourgeoise) celle de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, celle de Robespierre et de Saint-Just, de la laïcité (pas celle travestie par Caroline Fourest et compagnie), ou encore celle du CNR pour lequel se sont battus nos ancêtres ! Tout cet héritage que cette extrême-droite aimerait bien faire disparaître !
Les fachos utilisent souvent l’image d’un croisé et d’un viking (représentant du paganisme) s’alliant face à la horde « cosmopolite mondialiste ». Renversons cette image : prônons celle d’un ouvrier et d’un fonctionnaire main dans la main contre la catastrophe En Marche, l’UE, l’OTAN et toute la clique fasciste à leurs bottes !
(1)↑ Un très proche de Gollnisch exclu du FN pour deux ans [archive], Libération, 10 juillet 2011
(2) Nous incluons dans les groupements fascistes l’Action Française car, comme le rappelle notre camarade Annie Lacroix Riz dans son article « Quand Olivier Dard fait preuve d’un dangereux laxisme envers Maurras, antisémite notoire », l’AF a été historiquement le fer de lance du fascisme français.
(4) « En Alsace, le football amateur en flagrant déni », Noémie Rousseau, Libération, 27 juillet 2018.
(5) Les nations nécessaires, 2015, Francis Arzalier, éditions Delga, p. 9.