Alors que les Etats-Unis n’ont eu de cesse que d’empêcher le Conseil de Sécurité de l’ONU de prendre une résolution ordonnant le cessez le feu à Gaza, alors que c’est par dizaines de milliers que les civils palestiniens sont tués sous les bombes occidentales jetées par l’armée israélienne sur l’ensemble de l’enclave, alors que plus de la moitié des habitations y sont désormais réduites à l’état de ruines, que l’eau et la nouriture manquent et que les hopitaux et batiments de l’ONU sont également ciblés, alors qu’un large collectif de juristes avait dès la mi octobre alerté contre le risque génocidaire de l’offensive israélienne à Gaza, l’Afrique du Sud a porté plainte le 29 décembre 2023 pcontre Israël pour « génocide » à Gaza auprès de la cour internationale de justice (CIJ). L’instance a tenu une audience publique le 11 et le 12 janvier et doit se prononcer sur les mesures consevatoires demandées par l’Afrique du Sud. De part sa douloureuse mémoire de l’apartheid, l’Afrique du Sud a d’évidence l’autorité morale pour déposer cette requête. Cependant, compte tenu à la fois de l’absence de capacité à produire des décisions contraignantes mais aussi et surtout de la composition du jury de cette cours présidée par les USA et composée d’une large majorité de représentant des pays de l’Axe impérialiste euro atlantique dirigée par les USA et soutenant le régime de Tel-Aviv, il n’y a que peu à attendre de cette audience. Si ce n’est une prise à témoin de l’Humanité, qui nous engage tous à réagir. Les manifestations massives qui se sont à nouveau tenues ce samedi et dimanche partout dans le monde de Londres à New York ou Berlin en passant par Paris démontrent que les peuples occidentaux ne veulent pas être complice actifs ou passifs de la commission d’un tel génocide. En France, les communistes à l’image du PRCF, continuent d’appeler à la mobilisation.
La plainte sud-africaine accuse Israël de génocide à Gaza et produit des preuves convaincantes
Les juristes sud-africains ont présenté un dossier minutieux et rigoureusement documenté qui dénonce le massacre délibéré de civils à Gaza. L’équipe de juriste de Pretoria demande à la CIJ d’ordonner à Israël de cesser de tuer et de causer de graves atteintes mentales et physiques au peuple palestinien à Gaza, de cesser de lui imposer délibérément des conditions de vie destinées à entraîner sa destruction physique en tant que groupe, et de permettre l’accès à l’aide humanitaire. La requête est fondé en droit et en fait sur la convention internationale de 1948 sur le génocide. Dans sa requête, l’Afrique du Sud souligne qu’« Israël s’est livré, se livre et risque de continuer à se livrer à des actes génocidaires contre le peuple palestinien à Gaza ». Elle demande à la CIJ de rendre une décision provisoire « d’extrême urgence » afin de protéger les Palestiniens d’un « préjudice supplémentaire, grave et irréparable ». Elle fait obligation aux États parties de la Convention de prendre des mesures pour prévenir et réprimer le crime de génocide. Cette obligation, ainsi que l’interdiction de commettre un génocide, sont considérées comme des normes du droit international coutumier et s’imposent donc à tous les États, qu’ils fassent ou non partie des 153 pays – dont Israël fait partie – à avoir ratifié la Convention. Il faut rappeler qu’à l’initiative de l’ONU, suite à une décision de l’assemblée générale de l’ONU du 30 décembre 2022, Israël fait déjà l’objet d’un procès en raison de ses agissements dans les territoires palestiniens occupés de Cisjordanie et de Jérusalem Est.
Il y a cependant peut de probabilité que la CIJ, instance de l’ONU certes mais sous domination américaine au regard de la composition de ses membres, aillent à l’encontre du régime israélien (lire à la fin de l’article nos explications)
Le mémoire en accusation déposé par les juristes sud africain pointe, de manière détaillée et convaincante, qu’Israël est responsable à la fois de commettre un génocide à Gaza et de ne pas l’avoir empêché, en portant une accusation d’incitation directe et publique au génocide « qui est restée incontrôlée et impunie ». Ces actes et omissions israéliens ont un caractère génocidaire dès lors qu’ils ont été commis dans l’intention de « détruire les Palestiniens de Gaza en tant que partie du groupe national, racial et ethnique palestinien plus large ».
Quatre des cinq actes de génocide possibles énumérés dans la Convention sur le génocide, sont documentés à Gaza par l’Afrique du Sud :
– Tuer des Palestiniens, « à un rythme d’environ une personne toutes les six minutes » ; plus de 21 110 Palestiniens tués au moment où la plainte a été déposée ; 7 780 autres disparus et présumés morts sous les décombres.
– Causer des dommages corporels ou mentaux graves aux Palestiniens : plus de 55 243 Palestiniens blessés ; un « traumatisme mental grave » causé par les bombardements extrêmes et l’absence de zones sûres.
– Imposer délibérément des conditions de vie conçues pour entraîner la destruction physique totale ou partielle du groupe palestinien : déplacement forcé de 85 % de la population « dans des zones de plus en plus réduites de Gaza, où elle continue d’être bombardée par Israël ; la faim généralisée, la déshydratation et la « famine de masse imminente » des Palestiniens assiégés ; les attaques systématiques contre les hôpitaux et la privation d’accès aux soins de santé, à l’électricité, au logement, à l’hygiène, à l’assainissement, aux moyens de subsistance, à l’éducation, à la vie culturelle ; en bref, la « destruction de l’infrastructure nécessaire à la vie ».
– Imposer de mesures destinées à empêcher les naissances palestiniennes « par la violence reproductive infligée aux femmes, aux nouveau-nés, aux nourrissons et aux enfants palestiniens ».
De fait, il a été souligné devant la Cour qu’avec la documentation produite – tant par les déclarations des officiels israéliens que les éléments diffusés sur les réseaux sociaux par les soldats de l’armée israélienne, ainsi que par les images satellites, mais aussi les reportages que les journalistes arrivent à faire sortir de Gaza avec les plus grandes difficultés puisque ciblés par l’armée israélienne des dizaines sont déjà tombés sous leurs missiles et leurs balles – c’est en direct que l’Humanité est témoin des éléments relevant du génocide.
Il faut rappeler que le régime de Tel-Aviv pour justifier le massacre commis par son armée à Gaza ne peut pas s’appuyer sur le concept de droit à se défendre consacré par le droit international. En-effet, il est établi, par un jugement même de la CIJ rendu dans un avis de 2004 concernant le tracé du mur de ségrégation en Cisjordanie que Israël n’a pas le droit à se défendre sur le territoire qu’il occupe.
Il est bien établi qu’Israël n’a pas le droit de se défendre sur le territoire qu’il occupe, un principe qui a été affirmé par la CIJ elle-même dans son avis consultatif de 2004 sur le tracé du mur en Cisjordanie. Rappelons également, en ce 14 janvier qui est la date anniversaire de la résolution de l’ONU de 1988, que le droit internationale consacre l’interdiction à Israël d’expulser des civils palestiniens et son obligation d’assurer leur droit au retour. Cela alors que ces derniers mois Israël a provoqué à Gaza mais aussi en Cisjordanie le déplacement forcé de plus d’un million de palestinien.
Un large soutien international, en particulier en Amérique Latine
De nombreux États soutiennent les accusations sud-africaines contre Israël devant la CIJ. Notamment parmi les pays d’Amérique Latine dirigés par la gauche. De Cuba Socialiste à la Bolivie, du Nicaragua Sandiniste au Brésil, en passant par la Colombie de Gustavo Petro. En Afrique, l’Afrique du Sud n’est pas seule, avec l’engagement également de la Namibie, peuple qui sait parfaitement ce qu’est l’horreur génocidaire, qui a officiellement pris position contre les déclarations de l’Allemagne, cette puissance coloniale qui a commis un génocide en Namibie.
Israël incapable de produire des éléments probants pour invalider l’accusation de génocide à Gaza
A l’issue des plaidoiries de l’accusation et de la défense, le ministre de la justice sud-africain a souligné combien le régime israélien n’a pas réussie à justifier devant la CI sa position, alors qu’Israël est accusé de génocide à l’encontre du peuple palestinien à Gaza.
En prenant la parole devant l’institution de la Haye, le ministre Ronald Lamola a souligné que l’Afrique du Sud, à l’issue des déclarations du régime de Tel-Aviv devant la CIJ est pleinement convaincue d’avoir présenté un dossier probant contre Israël
« Aujourd’hui, nous avons entendu la prétendue justification d’Israël devant la CIJ. Certains des arguments avancés sont étonnants et ne sont pas étayés par les faits et la situation sur le terrain. Israël suggère que la Convention sur le génocide est primordiale pour leur protection et que, de ce fait, il n’est pas possible de violer ses propres dispositions. Aujourd’hui, l’État d’Israël n’a pas réussi à réfuter les arguments convaincants de l’Afrique du Sud qui ont été présentés à la Cour hier. »
Notamment, il est de notoriété publique que 85 % des habitants de Gaza ont été chassés de leurs maisons, un quart des résidents de l’enclave sont directement menacés de famine et une grande partie du nord de la bande de Gaza a été réduite à l’état de ruines.
L’Afrique du Sud estime qu’il s’agit d’un génocide qui s’inscrit dans le cadre de décennies d’oppression des Palestiniens par Israël et non d’une quelconque vengeance envers ce dernier.
« Il ne s’agit pas d’une vengeance de l’Afrique du Sud contre Israël. Nous partons du principe que tout État pratiquant l’apartheid, où que ce soit dans le monde, a été déclaré comme un crime contre l’humanité, et qu’il ne devrait donc jamais être autorisé à se reproduire. Il s’agit d’une convention des Nations unies. Nous sommes donc ici pour protéger les droits du peuple palestinien à Gaza, » ajoute le ministre sud-africain de la Justice.
La défense des juristes israéliens reposent sur trois axes qui visent à faire écran aux actes même commis par Israël et son armée. Diffamer l’Afrique du Sud, rappeler les violences du 7 octobre lors de l’attaque lancée par le Hamas et blamer le Hamas comme seul responsable de la destruction générale de la bande de Gaza en se retranchant derrière des actes d’autodéfenses relevant d’un droit « inhérent » à Israël.. A l’inverse, les réfutations des accusations documentées par les juristes sud-africains n’ont été que très marginalement évoquées et encore plus marginalement réfutées. De façon indigne, le gouvernement israélien prétend présenter le gouvernement d’Afrique du Sud comme « le bras légal de l’organisation terroriste Hamas ». Aussi ridicule que scandaleux. Il est à noter que l’Allemagne s’est positionne pour intervenir en tant que tiers lors de l’audience principale en appui à Israël. A l’ONU l’ambassadeur de Palestine soulignait que les mêmes pays qui refusent d’agir avec urgence pour sauver la vie des enfants palestiniens, sont ceux qui se précipitent pour lancer, sans aucun mandat de l’ONU une guerre d’agression contre le Yemen soit disant au motif de la sécurité du transit maritime.
S’agissant des attaques systématiques de l’armée israélienne contre les infrastructures civiles comme les hôpitaux de Gaza n’a pas réussi à produire des éléments probant. Brandissant tel Colin Powell au conseil de sécurité de l’ONU des photos peu convaincante, telle une arme de poing sensée avoir été découverte dans un incubateur avant de se discréditer en affirmant que « les hôpitaux n’ont pas été bombardésé en contradiction direct avec les démonstrations d’ores et déjà apporté jusque dans les reportages de la presse occidentale pro israélienne. CNN avait ainsi titré « le 2e plus grand hôpital de Gaza s’effondre après les bombardements israéliens ».
De fait, le régime israélien par la voix de son premier ministre a indiqué vouloir poursuivre sa guerre d’élimination des palestiniens, dans des déclarations d’un fanatisme religieux absolu terrifiants.
Censure dans les médias en France
Sans surprise, alors que le régime Macron continue d’afficher en réalité son soutien complice avec le régime Netanyahu, en application des ordres donnés par Washington, les principaux médias en France n’ont pas rendu compte de la plaidoirie sud-africaine. A l’image de France Info, la radio télévision d’Etat ne la difusant pas alors qu’elle a fait une large place à la défense israëlienne.
La Cour internationale de justice
La Cour internationale de justice est le principal organe judiciaire du système des Nations unies . Elle n’a rien à voir avec la Cour pénale internationale (CPI), organe à la main des pays occidentaux, particulièrement contestée par les pays du Sud global. La CIJ demeure cependant une instance politique, ces juges étant issus des candidatures déposées par les états. La Russie s’est ainsi récemment vu privé du renouvellement de son représentant (Kirikk Gevorgian), et ce alors qu’elle se voyait condamner par la CIJ par 13 voix contre 2 après une accusation déposée par l’Ukraine et soutenu par le bloc impérialiste conduit par les USA. La composition actuelle de la cour est la suivante :
- présidente Joan E Donoghue (USA), vice président Kirill Gevorgian (Russie)
- Peter Tomka (slovaquie), Ronny Abraham (France), Mohamed Bennouna (Maroc), Abdulqawi Ahmed Yusuf (Somalie), Hanqin Xue (Chine), Julia Sebutinde (Ouganda), Dalveer Bhandari (Inde), Patrick Lipton Robinson ( Jamaïque), Nawaf Salam (Liban), Iwasawa yuji (Japon), Georg Nolte (Allemagne), Hilary Charlewsorth (Australie), Leonardo Nemer Caldeira Brand (Brésil)
Il en résulte que les pays soutien d’Israël sont largement majoritaires dans l’instance, avec au moins 10 représentants, les pays soutenant la Palestine ne disposant au mieux que de quatre représentants.
En dehors du retentissement médiatique, et de la prise à témoin devant l’histoire de l’Humanité, il n’y a donc que très peu à attendre de cette audience et de la CIJ, et ce même si par le passé, la CIJ a pu condamner l’intervention des USA au Nicaragua dans les années 1980 ou sanctionner le maintien de la colonisation britannique sur les iles Chagos. Par ailleurs la porté de décisions de la CIJ est peu contraignante, relevant -en l’absence de disposition contraignante qui sont portées par le Conseil de Sécurité de l’ONU où les USA exercent leur sanglant véto – d’une expression symbolique.
JBC pour www.initiative-communiste.fr
Le résumé de la plainte déposée par l’Afrique du Sud contre le génocide à Gaza
Introduction
1. Cette demande concerne les actions menacées et tolérées prises par le gouvernement et l’armée de l’État d’Israël contre le peuple palestinien, un groupe national et ethnique distinct, à la suite des attaques du 7 octobre 2023. L’Afrique du Sud condamne sans équivoque toutes les violations du droit international commises par toutes les parties, y compris les attaques directes contre des civils israéliens et d’autres ressortissants et les prises d’otages par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens. Cependant, aucune attaque armée sur le territoire d’un État, aussi grave soit-elle – même une attaque au cours de laquelle des atrocités sont commises – ne peut constituer une justification ou un moyen de défense possible pour des violations de la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide (« Génocide Convention ». « ) être; que ce soit pour des raisons juridiques ou morales. Les actions et omissions d’Israël dénoncées par l’Afrique du Sud sont de nature génocidaire parce qu’elles visent l’anéantissement d’une partie importante du groupe national et ethnique palestinien, c’est-à-dire H. la partie du groupe palestinien dans la bande de Gaza (« Palestiniens à Gaza »). (…)
L’Afrique du Sud reconnaît le poids particulier de sa responsabilité lorsqu’elle engage des poursuites contre Israël pour violations de la convention sur le génocide. Cependant, en tant qu’État partie à la Convention sur le génocide, l’Afrique du Sud est également consciente de sa propre obligation de prévenir le génocide. Les actions et omissions d’Israël à l’égard des Palestiniens violent la Convention sur le génocide. C’est également le point de vue de nombreux autres États parties à la Convention, y compris l’État de Palestine lui-même, qui a appelé les « dirigeants du monde » à « prendre la responsabilité (…) de mettre fin au génocide contre notre peuple ». Les experts des Nations Unies ont à plusieurs reprises « tiré la sonnette d’alarme » depuis plus de dix semaines : « face aux déclarations des hommes politiques israéliens et de leurs alliés, accompagnées d’une action militaire à Gaza et d’une escalade des arrestations et des meurtres en Cisjordanie », le « risque de génocide » sur le peuple palestinien ». (…)
Les déclarations répétées des représentants de l’État israélien, y compris aux plus hauts niveaux, tels que le président israélien, le Premier ministre et le ministre de la Défense, ont exprimé une intention génocidaire. Cette intention ressort pleinement de la nature et de la conduite de l’opération militaire israélienne à Gaza. En raison, entre autres choses, de l’incapacité d’Israël à fournir ou à assurer la nourriture, l’eau, les médicaments, le carburant, les abris et toute autre aide humanitaire nécessaire au peuple palestinien assiégé et pris au piège, ce qui l’a poussé au bord de la famine. (…)
Israël a désormais tué plus de 21 110 Palestiniens nommément nommés, dont 7 729 enfants – plus de 7 780 autres sont portés disparus, présumés morts parmi les ruines – et a blessé plus de 55 243 autres, leur infligeant d’énormes dommages physiques et psychologiques. Israël a également dévasté de grandes parties de Gaza, y compris des quartiers entiers, détruisant plus de 355 000 bâtiments palestiniens, boulangeries, écoles, universités, magasins, lieux de culte, cimetières, sites culturels et archéologiques, bâtiments municipaux et judiciaires, infrastructures critiques, notamment l’eau et les systèmes d’égouts et les réseaux électriques, ainsi que de vastes zones agricoles, et mène une attaque implacable contre le système de santé palestinien. Israël a déjà réduit Gaza en ruines et continue de le faire, tuant la population, lui infligeant des souffrances, la détruisant et cherchant à imposer des conditions de vie qui équivalent à l’anéantissement physique du groupe. (…)
Compte tenu de l’urgence exceptionnelle de la situation, l’Afrique du Sud demande une audience accélérée sur sa demande et l’émission de mesures provisoires. En outre, conformément à l’article 74 (4) de la Cour, l’Afrique du Sud demande au Président de la Cour de protéger la population palestinienne à Gaza en appelant Israël à cesser immédiatement toutes les attaques militaires qui constituent ou entraînent une violation de la Convention sur le génocide. . (…)
III. Les faits
A. Introduction
Depuis le 7 octobre 2023, Israël mène une attaque militaire à grande échelle par voie terrestre, aérienne et maritime contre la bande de Gaza (« Gaza »), une étroite bande de terre mesurant environ 365 kilomètres carrés – l’une des zones les plus densément peuplées. dans le monde. La bande de Gaza, qui abrite quelque 2,3 millions d’habitants – dont près de la moitié sont des enfants – a été soumise par Israël à ce qui a été décrit comme la « campagne de bombardements conventionnels la plus intense » de l’histoire de la guerre moderne. Jusqu’au 29 octobre 2023 seulement, environ 6 000 bombes étaient larguées chaque semaine sur la petite enclave. En un peu plus de deux mois, les attaques militaires israéliennes ont « causé plus de destructions que celles d’Alep en Syrie entre 2012 et 2016, que celles de Marioupol en Ukraine, ou, relativement parlant, que les bombardements alliés sur l’Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale ». La destruction provoquée par Israël est si extrême que « Gaza a désormais une couleur différente vue de l’espace ». (…)
B. Contexte
(…)
3. Les attentats en Israël du 7 octobre 2023
L’offensive militaire israélienne à Gaza et sa campagne militaire intensifiée en Cisjordanie ont été lancées en réponse à une attaque en Israël le 7 octobre 2023 (surnommée « Opération Al-Aqsa Flood ») par deux groupes armés palestiniens – la branche militaire du Hamas ( les « Brigades Essedin-al-Kassam ») et le Jihad islamique palestinien. Les deux groupes ont tiré de larges volées de roquettes sur Israël, franchi la barrière israélienne séparant la bande de Gaza et attaqué des bases militaires israéliennes, des villes civiles et un festival de musique auquel assistaient des milliers de jeunes, dans des circonstances qui font l’objet d’une enquête de la part du procureur de la Cour pénale internationale. L’Afrique du Sud condamne sans équivoque les attaques contre des civils israéliens et étrangers par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens ainsi que la prise d’otages du 7 octobre 2023, comme l’a expressément indiqué dans sa note verbale à Israël du 21 décembre 2023. (…)
En réponse aux attentats du 7 octobre 2023, Israël s’est engagé à « démanteler et éliminer le Hamas » et à « éliminer les forces hostiles qui ont envahi notre territoire et rétablir la sécurité ». Le 7 octobre 2023, le Premier ministre israélien a déclaré que « Tsahal (Forces de défense israéliennes ; jW ) utilisera immédiatement toutes ses forces pour détruire les capacités du Hamas. Nous les détruirons et vengerons de toutes nos forces ce jour sombre qu’ils ont imposé à l’État d’Israël et à son peuple. » (…)
C. Actes génocidaires contre le peuple palestinien
(…)
Le nombre de journalistes palestiniens tués est nettement plus élevé que dans tout autre conflit des 100 dernières années. Au cours des deux mois écoulés depuis le 7 octobre 2023, le nombre de journalistes tués a déjà dépassé celui de toute la Seconde Guerre mondiale. (…)
Les dirigeants des Nations Unies et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), habitués aux situations de conflit, ont qualifié ce qui se déroule à Gaza de « crise de l’humanité ». « Les anciens combattants de l’aide humanitaire qui ont servi dans des zones de guerre et lors de catastrophes à travers le monde – des gens qui ont tout vu – (disent) qu’ils n’ont rien vu de comparable à ce qu’ils voient à Gaza aujourd’hui. » (…)
1. Le meurtre de Palestiniens à Gaza
(…)
« Nulle part il n’y a de sécurité à Gaza », ont clairement déclaré le secrétaire général de l’ONU et de nombreux autres experts des Nations Unies à la communauté internationale. Les Palestiniens de Gaza ont été tués chez eux, dans les endroits où ils cherchaient refuge, dans les hôpitaux, dans les écoles de l’UNWRA, dans les églises, dans les mosquées et alors qu’ils essayaient de trouver de la nourriture et de l’eau pour leurs familles. Ils ont été tués en tentant de s’échapper, dans les endroits où ils s’étaient enfuis, et même en tentant de s’enfuir par des itinéraires déclarés « sûrs » par Israël. Les rapports faisant état d’exécutions massives par des soldats israéliens se multiplient, notamment de plusieurs membres d’une même famille – hommes, femmes et personnes âgées. (…)
On rapporte également que des personnes non armées – y compris des otages israéliens – ont été abattues sur place, alors qu’elles ne représentaient aucune menace et même si elles brandissaient des drapeaux blancs. Les attaques contre des maisons et des immeubles d’habitation palestiniens sont responsables de la majorité des décès, Israël utilisant apparemment l’intelligence artificielle (« IA ») pour trouver jusqu’à 100 cibles de bombes par jour. (…)
On estime que le nombre d’enfants palestiniens tués à Gaza au cours des trois premières semaines seulement est plus élevé (3 195 au total) que le nombre total d’enfants tués dans les zones de conflit du monde chaque année depuis 2019. L’ampleur des massacres d’enfants palestiniens à Gaza est si grande que les Nations Unies l’ont surnommé « cimetière pour enfants ». En effet, le nombre sans précédent d’enfants palestiniens tués a conduit le porte-parole de l’UNICEF à qualifier les attaques israéliennes contre Gaza de « guerre contre les enfants ». (…)
Des médecins, des journalistes, des enseignants, des universitaires et d’autres groupes professionnels sont également tués à une échelle sans précédent. À ce jour, Israël a tué plus de 311 médecins, infirmières et autres agents de santé, dont des médecins et des chauffeurs d’ambulance morts dans l’exercice de leurs fonctions ; 103 journalistes ont été tués, soit H. plus d’un journaliste par jour et plus de 73 pour cent du nombre total de journalistes et de professionnels des médias tués dans le monde en 2023. 40 membres du personnel de la protection civile qui aidaient à sauver les victimes des décombres ont été tués dans l’exercice de leurs fonctions, et plus de 209 enseignants et éducateurs . 144 membres du personnel des Nations Unies ont également été tués. Il s’agit du « plus grand nombre de travailleurs humanitaires tués dans l’histoire de l’ONU en si peu de temps ». (…)
Les Palestiniens de Gaza ne sont pas seulement tués par les armes israéliennes. Ils risquent également de mourir de faim, de déshydratation et de maladie à mesure que le siège israélien se poursuit, que l’aide humanitaire est insuffisante pour la population palestinienne et que la distribution des fournitures limitées autorisées sur le territoire en raison de la décimation par Israël des infrastructures de la bande de Gaza. Les attaques militaires sont extrêmement difficiles. .
2. Causer de graves dommages physiques et psychologiques aux Palestiniens de Gaza
Plus de 55 243 Palestiniens ont été blessés depuis le 7 octobre 2023 suite aux attaques militaires israéliennes contre la bande de Gaza, pour la plupart des femmes et des enfants. Les brûlures et les amputations sont des blessures courantes, et on estime qu’environ 1 000 enfants ont perdu une ou les deux jambes. (…)
Dans le nord de la bande de Gaza en particulier, il n’y a plus d’hôpitaux fonctionnels, de sorte que les blessés se limitent à « attendre la mort ». Incapables de recevoir une intervention chirurgicale ou un traitement médical au-delà des premiers soins, ils meurent lentement et douloureusement des suites de leurs blessures ou des infections qui en résultent. (…)
3. Expulsion massive des Palestiniens de leurs foyers
On estime que sur les 2,3 millions d’habitants de Gaza, plus de 1,9 million – soit environ 85 pour cent de la population – ont été déplacés de leurs foyers. Il n’y a pas de refuge sûr. Ceux qui ne peuvent pas partir ou refusent d’être expulsés ont été tués ou courent un risque extrême de l’être dans leur maison. (…)
4. Refus d’accès à une nourriture et à une eau adéquates
Le 9 octobre 2023, Israël a imposé un « siège complet » à la bande de Gaza, empêchant l’électricité, la nourriture, l’eau et le carburant d’entrer dans la bande. Bien que le siège ait été partiellement assoupli depuis, certains camions humanitaires étant autorisés à entrer dans la bande de Gaza depuis le 21 octobre 2023, ce siège reste malheureusement insuffisant et bien inférieur à la moyenne d’avant octobre 2023, qui était d’environ 500 camions par jour. De plus, les importations de carburant autorisées depuis le 21 novembre 2023 sont « bien inférieures aux exigences minimales pour les opérations humanitaires essentielles », ce qui signifie que l’aide humanitaire limitée autorisée ne peut pas être facilement transportée des postes frontaliers vers la bande de Gaza. (…)
Israël a poussé la population palestinienne de la bande de Gaza au bord de la famine. Les organisations internationales préviennent que « le danger de famine est réel » (Programme alimentaire mondial, PAM) et qu’il « continue d’augmenter chaque jour » (IPC). La plupart des Palestiniens de Gaza meurent désormais de faim, et les niveaux de faim augmentent chaque jour. L’Organisation mondiale de la santé prévient que « la faim ravage Gaza ». Le secrétaire général des Nations Unies a déclaré que « quatre des cinq personnes les plus affamées au monde se trouvent à Gaza ». (…)
« Oxfam et Human Rights Watch sont même allés jusqu’à accuser explicitement Israël d’utiliser la faim ‘comme arme de guerre’ contre la population palestinienne de Gaza. »
(…)
7. Destruction de la vie palestinienne à Gaza
Le 16 novembre 2023, 15 rapporteurs spéciaux des Nations Unies et 21 membres de groupes de travail de l’ONU ont mis en garde contre un « génocide imminent » à Gaza. Ils ont observé que l’ampleur de la destruction des « unités d’habitation, des hôpitaux, des écoles, des mosquées, des boulangeries, des conduites d’eau, des égouts et des réseaux électriques… menace de rendre impossible la poursuite de la vie des Palestiniens à Gaza ». (…)
Israël a attaqué le Palais de Justice – le principal palais de justice palestinien à Gaza, qui abrite la Cour suprême palestinienne, la Cour constitutionnelle, la Cour d’appel, la Cour d’appel, le tribunal de première instance, le tribunal administratif et le tribunal de district, ainsi que ainsi qu’une archive de dossiers judiciaires et d’autres dossiers historiques. (…)
Israël a pris pour cible les quatre universités de Gaza – y compris l’Université islamique de Gaza, le plus ancien établissement d’enseignement supérieur du territoire, qui a formé des générations de médecins et d’ingénieurs – détruisant les campus destinés à former les futures générations de Palestiniens. (…)
Tout comme Israël efface la mémoire et les archives officielles des Palestiniens à Gaza en détruisant les archives et les monuments de Gaza, il efface également la vie personnelle et les souvenirs privés, l’histoire et l’avenir des Palestiniens en bombardant et en rasant au bulldozer les cimetières, les archives familiales et les photos détruites, entières. des familles anéanties sur plusieurs générations et une génération entière d’enfants tués, mutilés et traumatisés. (…)
8. Imposer des mesures pour empêcher les naissances palestiniennes
Les actions d’Israël ont frappé particulièrement durement les femmes et les enfants palestiniens dans la bande de Gaza : on estime que 70 pour cent des personnes tuées sont des femmes et des enfants. On estime que deux mères sont tuées chaque heure à Gaza. Au 11 décembre 2023 seulement, environ 7 729 enfants ont été tués et au moins 4 700 femmes et enfants supplémentaires sont portés disparus, soupçonnés d’être sous les décombres. Il existe plusieurs témoignages oculaires de femmes enceintes assassinées par des soldats israéliens, alors même qu’elles tentaient de recevoir des soins médicaux. (…)
De plus en plus de bébés palestiniens à Gaza mourraient de causes entièrement évitables causées par les actions d’Israël : les nouveau-nés âgés de moins de trois mois meurent de diarrhée, d’hypothermie et d’autres causes évitables. Sans équipement essentiel ni soutien médical, les bébés prématurés et présentant une insuffisance pondérale ont peu, voire aucune chance de survie. (…)
D. Expressions d’intentions génocidaires contre le peuple palestinien par des responsables de l’État israélien et d’autres
La preuve de l’intention particulière (« dolus specialis ») des responsables de l’État israélien de commettre un génocide et de persister à commettre ou à ne pas empêcher des actes de génocide est claire et évidente depuis octobre 2023. Ces déclarations d’intention – associées à l’ampleur des meurtres, des mutilations, des déplacements et des destructions sur le terrain, ainsi qu’au siège – démontrent un génocide en cours et en cours. Cela inclut les déclarations des personnes suivantes qui ont la plus haute responsabilité :
Premier ministre d’Israël : Le 16 octobre 2023, dans un discours à la Knesset israélienne, (Benjamin Netanyahu) a décrit la situation comme « une bataille entre les enfants de la lumière et les enfants des ténèbres, entre l’humanité et la loi de la jungle ». (…)
Le 28 octobre 2023, alors que les forces israéliennes préparaient leur invasion terrestre de la bande de Gaza, le Premier ministre a invoqué le récit biblique de l’anéantissement total d’Amalek par les Israélites, déclarant : « Vous devez vous rappeler ce qu’Amalek vous a fait, dit notre Sainte Bible. . Et nous nous souvenons. » (…) Le passage biblique pertinent se lit comme suit : « Maintenant, allez attaquer Amalek et bannissez tout ce qui lui appartient. N’épargnez personne, mais tuez les hommes et les femmes, les nourrissons et les petits enfants, les bovins et les moutons, les chameaux et les ânes. »
Président d’Israël : Le 12 octobre 2023, le président Isaac Herzog a clairement indiqué qu’Israël ne fait pas de distinction entre les combattants et les civils (…) : « Une nation entière est responsable de cela. Ce n’est pas vrai que les civils ne sont pas au courant et ne sont pas impliqués. Ce n’est absolument pas vrai. … et nous nous battrons jusqu’à leur briser le dos. » (…) Le président israélien est l’un des nombreux Israéliens qui ont écrit à la main des « messages » sur les bombes larguées sur Gaza.
Ministre israélien de la Défense : Le 9 octobre 2023, le ministre de la Défense Joaw Gallant a annoncé dans un « rapport de situation » de l’armée israélienne qu’Israël « avait imposé un siège complet à la bande de Gaza. Pas d’électricité, pas de nourriture, pas d’eau, pas de carburant. Tout sera fermé. Nous luttons contre les animaux humains et agissons en conséquence. » Il a également informé les troupes à la frontière de Gaza qu’il avait « desserré toutes les chaînes », affirmant que « Gaza ne sera plus la même qu’avant. Nous éliminerons tout. Si cela ne prend pas un jour, cela prendra une semaine. Cela prendra des semaines voire des mois, nous atteindrons tous les lieux.« (…)
Ministre israélien de l’Énergie et des Infrastructures : « Tweet » du 13 octobre 2023, Israel
Katz a déclaré : « L’ensemble de la population civile de Gaza reçoit l’ordre de quitter immédiatement la bande de Gaza. Nous allons gagner. Ils ne recevront pas une seule goutte d’eau ni une seule batterie jusqu’à ce qu’ils quittent le monde.« (…)
Ministre israélien du Patrimoine culturel : Le 1er novembre 2023, Amichai Elijahu a posté sur Facebook : « Le nord de la bande de Gaza, plus beau que jamais. Tout est gonflé et aplati, juste un bonheur pour les yeux (…)«. Il a également menacé d’une attaque nucléaire sur la bande de Gaza. (…)
Soldats de l’armée israélienne : des soldats israéliens en uniforme ont été filmés dansant et chantant « Que leur village brûle, que Gaza soit anéantie » le 5 décembre 2023 ; et deux jours plus tard, le 7 décembre 2023, à Gaza, ils ont dansé, chanté et scandé : « Nous connaissons notre devise : il n’y a pas de civils innocents » et « effacez les graines d’Amalek ». (…)
Une rhétorique génocidaire similaire est également courante dans la société civile israélienne, avec des messages génocidaires régulièrement diffusés dans les médias israéliens – sans censure ni sanctions. Les médias appellent à ce que Gaza soit « anéantie » et transformée en un « abattoir », que « le Hamas ne devrait pas être éliminé », mais que « Gaza devrait être détruite », avec l’affirmation répétée qu’« il n’y a pas d’innocents… » Là, il n’y a pas de population. Il y a 2,5 millions de terroristes. » (…)
IV. Les exigences de l’Afrique du Sud
Sur la base de ce qui précède et d’autres éléments de preuve qui seront présentés au cours de cette procédure, l’Afrique du Sud est d’avis que le comportement d’Israël – par l’intermédiaire de ses organes d’État, de ses agents et d’autres personnes et entités agissant sur ses instructions ou sous son contrôle direction, contrôle ou influence – viole ses obligations en vertu de la Convention sur le génocide,
y compris les articles I, III, IV, V et VI, en conjonction avec l’article II, en ce qui concerne les Palestiniens de Gaza. Ces violations de la
Convention sur le génocide incluent, mais sont pas limité à:
a) L’incapacité à prévenir le génocide en violation de l’article premier ;
(b) la commission d’un génocide en violation de l’article III(a) ;
(c) complot en vue de commettre un génocide en violation de l’article III (b) ;
(d) incitation directe et publique à commettre le génocide en violation de l’article III(c) ;
(e) tentative de commettre un génocide en violation de l’article III (d) ;
(f) avoir aidé et encouragé le génocide en violation de l’article III(e) ;
g) Non-punition du génocide, complot en vue de commettre le génocide, incitation directe et publique à commettre le génocide, tentative de génocide et complicité dans le génocide en violation des articles I, III, IV et VI ;
h) L’incapacité à adopter la législation nécessaire pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention sur le génocide et prévoir des sanctions efficaces pour les personnes coupables de génocide, de complot en vue de commettre le génocide, d’incitation à commettre le génocide, de tentative de génocide et de complicité dans le génocide, en violation de l’article V ; et
(i) en tant qu’obligation nécessaire et complémentaire en vertu des articles I, III, IV, V et VI, de ne pas permettre et/ou entraver directement ou indirectement l’enquête menée par les organismes internationaux compétents ou les missions d’établissement des faits sur les actes de génocide commis contre le Palestiniens à Gaza (…)