« L’envoyé spécial du Monde, Paulo Paranagua, a été refoulé par les autorités vénézuéliennes dès son arrivée à l’aéroport de Caracas, mercredi soir 28 juin, s’indigne en page 5 de son édition du 30 juin 2017, le directeur du quotidien Jérôme Fenoglio.
Deux journalistes français, dont l’un se trouve en permanence décodent les raisons du refus bien légitime de recevoir sur le sol venezuelien le petit télégraphiste du Monde :
- Comment « Le Monde » invente la « répression » au Venezuela ! – Thierry Deronne
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Le chef d’un réseau de « pressetitution » expulsé du Venezuela – Maurice LEMOINE
Comment « Le Monde » invente la « répression » au Venezuela !
Mettons-nous dans la peau d’un habitant de la planète qui n’aurait que les médias pour s’informer sur le Venezuela et à qui jour après jour, on parlerait de « manifestants » et de « répression ». Comment ne pas comprendre que cette personne croie que la population est dans la rue et que le gouvernement la réprime ?
Mais il n’y a pas de révolte populaire au Venezuela. Malgré la guerre économique la grande majorité de la population vaque à ses occupations, travaille, étudie, survit. C’est pourquoi la droite organise ses marches au départ des quartiers riches. C’est pourquoi elle recourt à la violence et au terrorisme, dont les foyers sont localisés dans les municipalités de droite. ll y a 90 pour cent de quartiers populaires au Venezuela. On comprend l’énorme hiatus : les médias transforment les îles sociologiques des couches aisées (quelques % du territoire) en « Venezuela ». Et 2% de la population en « population ». (1)
Le 12 mai l’ex-présidente argentine Cristina Fernández, après Evo Morales, a dénoncé « la violence utilisée au Venezuela comme méthodologie pour arriver au pouvoir, pour renverser un gouvernement » (2). Depuis l’Équateur, l’ex-président Rafael Correa a rappelé que « le Venezuela est une démocratie. C’est par le dialogue, avec les élections, que doivent se régler les divergences. De nombreux cas de violences viennent clairement des partis d’opposition » (3). C’est aussi la position du Caricom, qui regroupe les pays des Caraïbes (4). Le Pape François a dû pousser les évêques du Venezuela qui comme dans le Chili de 1973 traînaient les pieds face au dialogue national proposé par le président Maduro (5). Ce dernier a par ailleurs lancé le processus participatif de l’Assemblée Constituante, avec vote à la clef, et confirmé la tenue du scrutin présidentiel légalement prévu en 2018.
Assemblée populaire et d’enseignants pour faire des propositions dans le cadre de l’Assemblée Nationale Constituante, dans l’état d’Apure le 20 mai 2017. Ce processus doit être ouvert et participatif. Une image qu’on ne risque pas de voir dans les médias… Photo de Marco Teruggi
Depuis la disparition d’Hugo Chavez en 2013, le Venezuela est victime d’une guerre économique qui vise à priver la population des biens essentiels, principalement les aliments et les médicaments. La droite locale renoue avec certains éléments de la stratégie mise en place jadis au Chili par le tandem Nixon-Pinochet, en clair provoquer l’exaspération des secteurs populaires jusqu’au débordement de rage et légitimer la violence. Selon le rapport budgétaire 2017 mis en ligne sur le site du Département d’Etat (6), 5,5 millions de dollars ont été versés aux “sociétés civiles” du Venezuela. Le journaliste vénézuélien Eleazar Diaz Rangel, directeur du quotidien Ultimas Noticias (centre-droit) a révélé des extraits du rapport que l’amiral Kurt Tidd, chef du Southern Command, a envoyé au Sénat US : « avec les facteurs politiques de la MUD (coalition vénézuélienne de l’opposition) nous avons mis au point un agenda commun qui comprend un scénario abrupt combinant des actions de rue et l’emploi dosifié de la violence armée sous l’angle de l’encerclement et de l’asphyxie« . (7)
La phase insurrectionnelle implique d’attaquer des services publics, des écoles, des maternités (El Valle, El Carrizal) et des établissements de santé, barrer les rues et les principales artères routières pour bloquer la distribution des aliments et paralyser l’économie. A travers les médias privés, majoritaires au Venezuela, la droite appelle ouvertement les militaires a mener un coup d’État contre le président élu (8). Plus récemment les bandes paramilitaires colombiennes passent du rôle de formatrices a un rôle plus actif : le corps sans vie de Pedro Josué Carrillo, militant chaviste, vient d’être retrouvé dans l’État de Lara, portant les marques de torture typiques au pays d’Uribe (9).
Malgré les mortiers, armes à feu, grenades ou cocktails Molotov utilisés par les manifestants « pacifiques » (sans oublier les mannequins de chavistes pendus aux ponts, signature du paramilitarisme colombien), la loi interdit à la Police ou la Garde Nationale d’user de leurs armes à feu. Les manifestants de droite en profitent pour pousser leur avantage, déverser leur racisme sur les gardes ou policiers, les provoquer à coups de jets d’urine, d’excréments et de tirs à balles réelles, guettant la réaction pour les caméras de CNN. Les fonctionnaires des forces de l’ordre qui ont désobéi et qui se sont rendus coupables de blessures ou de morts de manifestants ont été arrêtés et poursuivis en justice (10). Le fait est que la grande majorité des victimes sont des travailleurs qui allaient au boulot ou en revenaient, des militants chavistes ou des membres des forces de l’ordre (11). C’est pourquoi le « Monde » parle de morts en général – pour que l’on croie qu’il s’agit de « morts du régime ». Allonger la liste des « morts » sert à augmenter l’appui planétaire a la déstabilisation : il y a dans ces meurtres, il est terrible de le constater, un effet de commande médiatique.
Tout manifestant qui tue, détruit, agresse, torture, sabote sait qu’il sera sanctifié par les médias internationaux. Ceux-ci sont devenus un encouragement à poursuivre le terrorisme. Toute mort, tout sabotage économique seront attribués au « régime » y compris à l’intérieur du Venezuela où les médias, comme l’économie elle-même, sont majoritairement privés. Que la démocratie participative qu’est le Venezuela tente de se défendre comme doit le faire tout État de Droit, et elle sera aussitôt dénoncée comme « répressive ». Qu’elle ose punir un terroriste, et celui-ci deviendra ipso facto un « prisonnier politique ». Pour le journaliste et sociologue argentin Marco Teruggi « pour une intervention au Venezuela, le Gouvernement des États-Unis a des conditions plus favorables que celle qu’il avait pour bombarder la Libye si on tient compte du fait que l’Union Africaine avait condamné cette intervention presque à l’unanimité. (..) Tout dépend de la capacité de la droite à soutenir longtemps un bras de fer dans la rue en tant qu’espace politique. D’où l’importance de maintenir la caisse de résonance médiatique internationale » (12).
Exemple sordide de cette alliance : le 5 mai 2017, à l’aide d’une photo digne d’un ralenti hollywoodien (mais qui n’est pas celle de la victime) « Le Monde » dénonce « la mort d’un leader étudiant tué lors des protestations contre le projet du président Maduro de convoquer une assemblée constituante ». Or la victime, Juan (et non José comme l’écrit « le Monde ») Bautista Lopez Manjarres est un jeune dirigeant étudiant révolutionnaire assassiné par un commando de droite alors qu’il participait a une réunion de soutien au processus d’assemblée constituante.
« Le Monde » mentionne aussi la réaction du chef d’orchestre Gustavo Dudamel, en tournée à l’étranger, qui demande que « cesse la répression » à la suite de la mort du jeune joueur de violon alto Armando Cañizales. Or ce musicien n’a pas été victime de la répression mais, lui aussi, d’un projectile tiré des rangs de la droite.
Le journal espagnol La Vanguardia, bien que virulent opposant a la révolution bolivarienne, l’admet exceptionnellement sous la plume de son envoyé spécial Andy Robinson : « De même qu’à d’autres moments de cette crise, le storytelling d’une jeunesse héroïque massacrée par la dictature bolivarienne ne colle pas dans le cas d’Armando Cañizales. (..) Il est pratiquement sûr que le projectile n’a pas été tiré par la police mais par les manifestants eux-mêmes. Il est notoire que certains d’entre eux ont fabriqué des armes artisanales pour les affrontements quotidiens avec la police » (13).
La réaction rapide de Mr. Dudamel est représentative des personnalités artistiques – nombreuses, on peut mentionner Ruben Blades ou René du groupe Calle 13 – subissant la forte pression du dispositif médiatique de leurs pays, contraintes de faire des déclarations pour satisfaire l’opinion publique convaincue à 99 % par les médias qu’il faut dénoncer la « répression au Venezuela ».
Le 16 mai, « Le Monde » dénonce « la mort d’un jeune de 17 ans, blessé par balle lors d’un rassemblement contre le président Maduro » (article ci-dessus). C’est faux. L’enquête montre que Yeison Natanael Mora Castillo a été tué par un projectile identique à celui utilisé pour assassiner le jouer de violon alto Cañizales. Il ne participait pas davantage à un rassemblement anti-Maduro. Ses parents sont membres d’une coopérative en lutte pour récupérer un latifundio de sept mille hectares, subissant depuis longtemps les attaques du grand propriétaire. Ils ont porté plainte contre les organisateurs de la marche de l’opposition et dans une interview au journal local Ciudad Barinas ont dénoncé la manipulation internationale de l’assassinat de leur fils, imputé faussement au gouvernement Maduro. (14)
Imputer systématiquement au gouvernement bolivarien les assassinats commis par la droite, c’est tout le « journalisme » de Paulo Paranagua. Le 21 avril déjà, il impute aux collectifs chavistes la mort d’un étudiant de 17 ans, Carlos Moreno, tué d’une balle dans la tête, tout comme celle de Paola Ramirez Gomez, 23 ans. Double mensonge. Selon la famille de Carlos Moreno, l’adolescent ne participait à aucune manifestation et se rendait a un tournoi sportif. Son assassin vient d’être arrêté : il s’agit d’un membre de la police d’Oscar Oscariz, maire de droite de la municipalité de Sucre. Le journal d’opposition Tal Cual en a rendu compte (15). Quant à la deuxième victime mentionnée par Paranagua, Paola Rodríguez, son assassin a été arrêté également par les autorités : il s’agit d’Iván Aleisis Pernía, un militant de droite.
Certes le « quotidien vespéral des marchés » n’est pas seul à mentir de manière aussi sordide dans ce « combat pour la liberté ». La Libre Belgique, le New York Times, France-Culture, El Pais, Le Figaro ou même Mediapart sont autant de robots de la vulgate mondiale. Cette invention de « la répression » est d’autant plus facile que l’image archétypale du manifestant matraqué par un garde national est gagnante d’avance lorsqu’on est privé d’accès au hors-champ de l’image. Loin du Venezuela, seuls les happy few flaireront la mise en scène où des jeunes sont entraînés, armés, payés pour provoquer les forces de l’ordre et produire « l’image » nécessaire. La concentration planétaire des médias et la convergence croissante des réseaux sociaux avec les médias dominants fait le reste, fixant l’imaginaire de la gauche comme de la droite. On voit ainsi des « insoumis » politiquement se soumettre médiatiquement et ajouter sans le savoir leur petite pierre à la campagne mondiale :
Et ci-dessous le retweeteur de cette belle affiche n’imagine sans doute pas la supercherie qui se cache derrière l’Anonymous vénézuélien. Cette capacité de l’extrême droite d’emprunter au mouvement alternatif mondial certains de ses symboles pour capitaliser un appui est décryptée ici : « Quand tombe le masque de Guy Fawkes de l’opposition vénézuélienne » (16)
Bref, comme si l’histoire de la propagande et des guerres ne nous avait rien appris, nous retombons sans cesse dans la nasse. Malcolm X avait prévenu : « si vous n’y prenez garde, les médias vous feront prendre les victimes pour les bourreaux et les bourreaux pour les victimes ». En transformant les violences de l’extrême droite en « révolte populaire », en rhabillant en « combattants de la liberté » des assassins nostalgiques de l’apartheid des années 90, c’est d’abord contre les citoyens européens que l’uniformisation médiatique sévit : la majorité des auditeurs, lecteurs et téléspectateurs appuient sans le savoir une agression visant à renverser un gouvernement démocratiquement élu. Sans démocratisation en profondeur de la propriété des médias, la prophétie orwellienne se fait timide. Le Venezuela est assez fort pour empêcher un coup d’État comme celui qui mit fin à l’Unité Populaire de Salvador Allende mais la coupure croissante de la population occidentale avec le monde se retournera contre elle-même.
Micro-manuel d’auto-défense face à la déferlante médiatique.
« Le Venezuela est un « régime dictatorial ». Faux. Depuis 1999, le Venezuela bolivarien a organisé un nombre record de scrutins (25), reconnus comme transparents par les observateurs internationaux. Selon l’ex-président du Brésil Lula da Silva, il s’agit d’un “excès de démocratie”. Pour Jimmy Carter qui a observé 98 élections dans le monde, le Venezuela possède le meilleur système électoral du monde. En mai 2011 le rapport de la canadienne Fondation pour l’Avancée de la Démocratie (FDA) a placé le système électoral du Venezuela à la première place mondiale pour le respect des normes fondamentales de démocratie. L’ONG chilienne LatinoBarometro a établi dans son rapport 2013 que le Venezuela bat les records de confiance citoyenne dans la démocratie en Amérique Latine (87 %) suivi de l’Équateur (62 %) et du Mexique (21 %). Le président Nicolás Maduro vient de lancer un processus constituant participatif qui permet à tous les secteurs sociaux de faire leurs propositions, ce qui donnera un nouveau scrutin, et a réaffirmé que des élections présidentielles auront lieu en 2018 comme le stipule la loi.
« Il n’y pas de liberté d’expression au Venezuela ». Faux. Sur les plus de 1000 stations de radio et chaînes de télévision auxquelles l’État a accordé l’autorisation d’émettre, 67% sont privées (la grande majorité opposées à la révolution bolivarienne), 28% sont aux mains des communautés mais ne transmettant que sur une échelle strictement locale et 5% sont propriété de l’État. Sur les 108 journaux qui existent, 97 sont privés et 11 publics. 67% de la population vénézuélienne a accès à internet. Cette plate-forme dominante des médias privés renforcée par le réseau des transnationales joue un rôle crucial dans la désinformation au service de la déstabilisation. Pour un dossier détaillé et chiffré de ce paysage médiatique, voir Thomas Cluzel ou l’interdiction d’informer sur France-Culture » (17)
« Il y a des prisonniers politiques au Venezuela ». Faux. A moins de considérer comme « prisonniers politiques » les assassins du parti d’extrême droite Aube Dorée emprisonnés en Grèce. Dans un État de Droit, qu’il s’appelle France ou Venezuela, être de droite ne signifie pas être au-dessus des lois ni pouvoir commettre impunément des délits tels qu’assassinats, attentats à la bombe ou corruption. Ce n’est pas pour leurs opinions politiques mais pour ce type de délits que des personnes ont été jugées et emprisonnées (18). Dans la pratique on observe d’ailleurs un certain laxisme de la justice. Selon la firme privée de sondages Hinterlaces, 61 % des vénézuéliens considèrent que les promoteurs des violences et des actes de terrorisme devraient répondre de leurs actes devant un tribunal (19).
Rappelons que les leaders actuels de la droite n’ont jamais respecté les institutions démocratiques : ce sont les mêmes qui en avril 2002 avaient mené un coup d’État sanglant contre le président Chavez, avec l’aide du MEDEF local et de militaires formés à la School of Americas. Ce sont les mêmes qui ont organisé les violences de 2013 à 2016. Notons l’identité d’un de leurs mentors : Alvaro Uribe, un des plus grands criminels contre l’humanité de l’Amérique Latine, ex-président d’un pays gouverné par le paramilitarisme et les cartels de la drogue, qui possède les plus grandes fosses communes du monde, qui compte 9500 prisonniers politiques, 60.630 personnes disparues au cours des 45 dernières années et qui depuis la signature des accords de paix a repris une politique sélective d’assassinat de leaders sociaux et de défenseurs des droits de l’homme. Pour une information complète et en photos sur ces liens des héros du « Monde » avec le paramilitarisme colombien, lire « Venezuela : la presse française lâchée par sa source ? », https://venezuelainfos.wordpress.com/2015/08/04/venezuela-la-presse-francaise-lachee-par-sa-source/
Thierry Deronne, Venezuela, 20 mai 2017.
Notes
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Lire https://venezuelainfos.wordpress.com/2014/02/22/brevissime-cours-de-journalisme-pour-ceux-qui-croient-encore-a-linformation/
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Entretien intégral de Cristina Kirschner avec Jorge Gestoso https://www.youtube.com/watch?v=-WM6nD6hPu0
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http://ambito.com/883274-tras-reunirse-con-michetti-correa-defendio-a-venezuela . Voir aussi http://www.telesurtv.net/news/Long-rechaza-injerencia-de-EE.UU.-en-asuntos-internos-de-Venezuela-20170518-0039.html
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http://correodelorinoco.gob.ve/cancilleres-de-caricom-resaltan-solucion-pacifica-para-situacion-de-violencia-en-venezuela
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http://www.ultimasnoticias.com.ve/noticias/politica/papa-francisco-dialogo-venezuela-afectado-la-division-la-oposicion/
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https://www.state.gov/documents/organization/252179.pdf (voir page 96)
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http://www.southcom.mil/Portals/7/Documents/Posture%20Statements/SOUTHCOM_2017_posture_statement_FINAL.pdf?ver=2017-04-06-105819-923
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Comme le reconnaît Julio Borges, leader du parti d’extrême droite Primero Justicia et actuel président de l’Assemblée Nationale, dans l’interview non complaisante que lui fait le journaliste de la BBC Stephen Sackur, le 19 mai 2017 : http://bbc.co.uk/programmes/p052nsxd
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http://tatuytv.org/index.php/noticias/duelo/3680-terrorismo-hallan-sin-vida-y-con-signos-de-tortura-a-militante-del-psuv-secuestrado-en-zona-opositora
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Détails de plusieurs cas sur le site du Parquet : http://bit.ly/2ro4iXE ; http://bit.ly/2qE9MNb ; http://bit.ly/2q5RsbU ; http://bit.ly/2rnNT5s
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http://albaciudad.org/2017/05/lista-fallecidos-protestas-venezuela-abril-2017/
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http://hastaelnocau.wordpress.com/2017/05/09/radiografia-de-la-violencia
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http://www.lavanguardia.com/internacional/20170507/422343873153/violinista-muerto-venezuela-manifestaciones.html
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http://www.desdelaplaza.com/poder/yeison-lo-mataron-manifestantes-la-mud-destacado/
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http://www.talcualdigital.com/Nota/142708/detenido-polisucre-por-asesinato-de-estudiante-de-la-ucv-carlos-jose-moreno
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https://venezuelainfos.wordpress.com/2014/03/15/fauxccupy-sous-les-masques-de-guy-fawkes-de-lopposition-venezuelienne
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https://venezuelainfos.wordpress.com/2015/03/12/thomas-cluzel-ou-linterdiction-dinformer-sur-france-culture
- https://venezuelainfos.wordpress.com/2015/08/04/venezuela-la-presse-francaise-lachee-par-sa-source/
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http://hinterlaces.com/61-afirma-que-responsables-de-manifestaciones-violentas-deberian-ir-presos/
source de cet article : http://wp.me/p2ahp2-2zk
Le chef d’un réseau de « pressetitution » expulsé du Venezuela
« L’envoyé spécial du Monde, Paulo Paranagua, a été refoulé par les autorités vénézuéliennes dès son arrivée à l’aéroport de Caracas, mercredi soir 28 juin, s’indigne en page 5 de son édition du 30 juin 2017, le directeur du quotidien Jérôme Fenoglio.
Le but de son déplacement était de rendre compte de la poursuite des manifestations de l’opposition et de l’intensification de la répression par le pouvoir, qui a déjà causé près de 80 morts depuis début avril. (…) Le Monde proteste contre cette entrave caractérisée à la liberté d’informer. »
Informer ? Vous avez dit informer ? Commencez, Monsieur, par vous mettre d’accord avec votre employé qui, dans la même livraison, quelques pages plus loin, ment un peu plus que vous en rajoutant dix unités au massacre imputé au président Nicolás Maduro : « La garde nationale (gendarmerie), la police et les groupes paramilitaires, dits “collectifs”, ont fait 90 morts et 1 400 blessés. »
Et si l’on plongeait un instant dans la réalité ? Paranagua a déjà été pris la main dans le pot d’excréments le 21 avril – « Deux manifestants ont été tués par balles, mercredi, lors de la “mère de toutes les manifestations” » – alors qu’il trompait les lecteurs en inventant de toutes pièces : « Un étudiant de 17 ans, Carlos Moreno [a été] tué d’une balle dans la tête » lorsque les opposants « ont été attaqués par des motards [les fameux “collectifs” inféodés au pouvoir] qui ont tiré et lancé des gaz lacrymogènes », tout comme « Paola Ramírez Gomez, à San Cristobal, dans des circonstances similaires ». Moreno, qui était sorti pour jouer au football avec quelques amis et non pour manifester, a en réalité été tué par Jonathan Ramón Camacho Delgado, dit « Jhonathan 38 », policier municipal du municipio Sucre (dirigé par un maire d’opposition) qui, en civil, s’est infiltré au cœur des manifestants et a tiré sur plusieurs personnes. Quant à Paola Ramírez Gomez, elle a été victime d’un des vingt-sept coups de feu tirés sur un groupe de motards depuis le troisième étage d’un immeuble par Iván Alexis Pernía Ávila, sympathisant de l’opposition.
Quelques poignées de délinquants manipulés (et pour certains payés) peuvent facilement provoquer des désastres irréparables. Depuis maintenant trois mois, chaque manifestation est suivie d’une phase insurrectionnelle au cours de laquelle des groupes de choc fascisants sèment le chaos, équipés de casques et de masques à gaz, utilisant cocktails Molotov, explosifs, armes létales et mortiers artisanaux [1]. Des victimes tombent dans tous les camps (six policiers et gardes nationaux ont été tués), et même souvent n’appartenant à aucun camp : civils assassinés parce qu’ils tentent de dégager ou contourner une barricade, jeunes hommes brûlés vif (deux morts et deux blessés dans un état très grave à Caracas et Barquisimeto) parce que les « opposants pacifiques » les ont pris pour des « chavistes ». Personne n’aurait donc mis Paranagua au courant ?
Pour Le Monde, « Henrique Capriles Radonski – ex-candidat à la présidence contre Hugo Chávez, puis Nicolas Maduro – a fait campagne au centre gauche, invoquant l’exemple de l’ancien président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva (20-21 décembre 2015) ». A quand « Jean-Luc Mélenchon, homme politique français de centre droit » ? Lula a toujours affirmé haut et fort son appui total au « bolivarien » Maduro. Chargée du maintien de l’ordre face à la violence extrême des commandos de l’opposition, la Garde nationale devient, dans un sous-titre affiché à la « une », le 16 juin dernier : « La guardia, bras armé du régime de Maduro. » Le vocabulaire n’est jamais neutre. Lira-t-on demain, si des protestataires contestent en France la réforme par ordonnance du code du travail : « Les CRS, bras armé du régime de Macron » ? Sachant par ailleurs que nos « casseurs », si d’aventure il y en avait, sont des enfants de chœur comparés aux nervis politiques vénézuéliens… A-t-on déjà vu des policiers tués par balles entre La République et la Nation ?
« De nombreux élus et journalistes ont été agressés par les forces de sécurité. » Il est avéré que, dans un tel climat, un certain nombre d’incidents de ce type ont eu lieu. Condamnables. Mais encore faudrait-il que le quotidien vespéral des marchés ne charge pas la barque que d’un seul côté [2]. Journaliste de Televen, chaîne privée d’opposition, Yasmín Velasco, alors qu’elle se trouvait à Altamira pour couvrir les manifestations contre le pouvoir, a été molestée par un groupe violent… parce qu’elle portait un chemisier rouge. La professionnelle de TeleSur Adriana Sivori, touchée par un coup de feu à l’épaule, ne doit d’être encore en vie qu’à son gilet pare-balles : le 5 juin, dans le secteur d’El Paraíso (ouest de Caracas), clairement identifiée sur son casque et le gilet en question par un très visible « Prensa », elle a été la cible, ainsi que plusieurs confrères, de francs-tireurs de l’opposition embusqués dans un immeuble. Le 8 mai, une équipe de la chaîne télévisée Globovisión a été arrosée d’essence à El Rosal (est de Caracas). Le lendemain, après plusieurs jours d’insultes et de menaces sur les réseaux sociaux, Ricardo González, présentateur du programme « Zurda Konducta » sur la chaîne publique Venezolana de Televisión, a été l’objet d’un attentat alors qu’il se trouvait dans son auto [3].
« La procureure générale de la République Luisa Ortega, partisane de l’ex-président Hugo Chávez (1999-2013) a été la première figure du régime à dénoncer [les] exactions [des forces de l’ordre], rapporte Paranagua. Elle a critiqué l’usage excessif de la force contre des manifestants pacifiques. » En tant que telle, l’information rapportant la déclaration de la procureure est juste. Mais elle mérite interprétation. Depuis peu en rupture avec le pouvoir chaviste qu’elle va jusqu’à accuser de pratiquer « un terrorisme d’Etat », Luisa Ortega occupait la même fonction en 2014 lorsque, dans le cadre de l’opération « La Salida » (la sortie), destinée, aux marges de la loi, à renverser le président Maduro, une première vague de violence, similaire à l’actuel chaos, a secoué le pays (43 morts et plus de 800 blessés). L’opposition, l’insultait alors pour son « laxisme » à l’égard des forces de l’ordre et son « excès de rigueur » envers les manifestants.
Interrogée par le journaliste de la BBC Daniel Pardo sur la détention du maire d’opposition de San Cristóbal, Daniel Ceballos, elle répondait alors ainsi : le problème n’est pas « d’appeler à faire telle ou telle chose, mais d’appeler à prendre la rue. C’est d’occuper la rue, exerçant la violence, obstruant les voies, mettant le feu à des barricades, avec des objets dangereux, des armes et des substances incendiaires. Ceci est se soulever dans une attitude hostile que sanctionne notre code pénal. (…) Cette violence est le fait d’un groupe minoritaire, dans quelques municipios. Ce groupe minoritaire, en réalité, a réussi à dépasser les frontières du pays et à provoquer un impact au niveau médiatique, en particulier à travers les réseaux sociaux [4]. »
A situation similaire et également séditieuse, deux réponses diamétralement opposées : l’une lorsqu’on se considère partie prenante du pouvoir, l’autre quand, pour des raisons très mystérieuses compte tenu de la rapidité de la conversion, on a rejoint l’opposition. Il n’empêche… Paranagua qui, le 26 octobre 2016 – « Coup d’Etat chaviste au Venezuela » – la clouait au piloris – « les “populistes” (…) ont commencé par mettre au pas la justice » – adore désormais Luisa Ortega.
- Manifestation pacifique dénonçant l’Assemblée nationale constituante
- Partisans violents de la dictature appuyant l’Assemblée nationale constituante.
Une parenthèse au passage. Depuis le 20 avril, et dans le cadre d’une stratégie de la tension, la base militaire de La Carlota (Caracas) a subi dix attaques extrêmement déterminées, impliquant l’utilisation d’armes létales [5]. Le 21 juin, ce qu’on pouvait redouter a fini par arriver. Malgré l’ordre express donné aux forces de l’ordre de faire un usage contrôlé de la force – grenades lacrymogènes, canons à eau – , et alors que deux soldats avaient été blessés par explosifs, Arli Cleiwi Mñendez Terán, un sergent de la police aérienne, sous pression, a tué d’un tir d’« arme non autorisée » le jeune David Vallenilla (22 ans), qui le menaçait (ou non, l’enquête le déterminera) directement. Bien que le responsable ait immédiatement été mis entre les mains de la justice, le drame a permis un redoublement de la salve féroce des accusations contre la puissance publique et, bien sûr, le président Maduro.
En comparaison, quelle mesure, quelle absence de commentaires à charge et de réquisitoire furibond lorsque Le Monde (23 juin), à propos de la mort de Rémi Fraisse, décédé à l’âge de 21 ans sur le site de Sivens (Tarn), commente sobrement l’enquête qui s’achemine sur un non-lieu : « L’opération s’est déroulée dans un climat “quasi insurrectionnel”, rappelle le parquet, qui évoque des gendarmes “harcelés”, notamment par des tirs de projectiles, et des ripostes incluant l’usage de grenades lacrymogènes et de lanceurs de balles de défense. Une opération de maintien de l’ordre “extrêmement difficile”, résume le procureur Pierre-Yves Couilleau qui revient, en 137 pages de réquisitions, sur les nombreuses auditions de témoins et les rapports rédigés sur la “tragédie”. (…) Quant au gendarme J., le parquet estime qu’il ne peut lui être reproché un “mésusage” de la grenade. Malgré les nombreux témoins qui ont remis en cause la proportionnalité de l’action des forces de l’ordre, le procureur considère que les militaires ont agi de façon réglementaire et justifiée, faisant face à des violences et ne pouvant défendre autrement le terrain qu’il leur avait été ordonné de tenir. »
Disons pour expliquer la différence de traitement que Fraisse ne participait pas à une « révolution de couleur » alors que n’importe quel opposant, factieux ou assassin, de l’autre côté de l’Atlantique, est partie prenante (Paranagua, 28 avril) du « printemps vénézuélien ».
« Depuis le 6 décembre 2015, lorsque l’opposition a remporté les législatives, le président Nicolas Maduro refuse de reconnaître sa défaite, affirme le député [Julio] Borges [président de l’Assemblée nationale]. » Nous ne donnerions pas ce conseil à tout le monde, mais, avant de livrer sans recul à ses lecteurs n’importe quelle foutaise pourvu qu’elle provienne de l’opposition, Paranagua devrait lire… Le Monde ! Même Marie Delcas, pourtant membre de son réseau, y rapportait le 8 décembre 2015 : « Immédiatement après la proclamation officielle du score, tard dans la nuit, le président Maduro est apparu à la télévision pour reconnaître la victoire de ses adversaires et appeler ses compatriotes à accepter “les règles du jeu et de la démocratie en paix et dans le calme”. »
En annonçant dès sa prise de fonction l’approbation d’une loi d’auto-amnistie pour tous les crimes et délits commis par des factions de l’opposition depuis le coup d’Etat contre Hugo Chávez (avril 2002) et l’objectif de « sortir du pouvoir » Maduro en six mois, c’est le premier président de l’Assemblée nationale, Henry Ramos Allup, qui a déclenché le bras de fer entre législatif et exécutif. Depuis, celui-ci n’a pas cessé, amplifié par une déstabilisation économique similaire à celle du Chili des années 1970 – niée d’ailleurs par la quasi-totalité des médias. Ce qui permet à Paranagua d’asséner des chiffres aussi absurdes que (20 avril 2017) : « Une enquête des trois meilleures universités de Caracas (Centrale, catholique et Simon-Bolivar) estime que la pauvreté touche 82 % des foyers ».
D’après la Commission pour l’Amérique latine et les Caraïbes (Cepal), la pauvreté, passée de 48.6 % en 2002 a 32.1 % en 2013, augmente depuis à un rythme annuel de 2 % à 5 % en raison de la crise économique et politique [6].
Nouvelle venue dans ce lupanar médiatique, Mélina Monferrat signe dans la livraison datée 25 et 26 juin 2017 un « Au Venezuela, le combat de San Cristobal contre Nicolas Maduro ». « Les manifestations du 22 juin, écrit-elle, avaient pour but de soutenir Luisa Ortega, la procureure générale, menacée d’un procès pour “traîtrise” (sic !) après avoir notamment critiqué ce projet [d’Assemblée nationale constituante convoquée par le chef de l’Etat], qu’elle juge dangereux pour la démocratie. » Cette initiative fait effectivement débat, y compris au sein du « chavisme » (où elle provoque aussi intérêt et enthousiasme), et, tout comme le reste de l’opposition, la procureure générale peut, à titre individuel, y être opposée. On rappellera néanmoins à nos supposés « confrères (et sœurs) » que, en juillet 2014, depuis la prison de Ramo Verde où il est incarcéré pour sa responsabilité dans la convocation de « La salida » et les conséquences (43 morts) qui en ont résulté, Leopoldo López rejetait tout « dialogue » et, soutenant qu’elle pourrait permettre la réconciliation du pays, réclamait… une Constituante : « C’est le mécanisme le plus idoine pour changer le schéma et les dirigeants des pouvoirs publics de l’Etat et, éventuellement, convoquer des élections pour légitimer les fonctions des élus populaires [7]. » On rappellera également qu’à son terme, les travaux de l’ANC devront être approuvés par référendum – ce qui laisse tout le loisir à l’opposition, à défaut d’y participer, de la sanctionner (si elle a la majorité).
Dans sa haine de la gauche latino-américaine en général et vénézuélienne en particulier, Paranagua tombe souvent au niveau des « SAS » de feu Gérard de Villiers. Sans jamais étayer sa thèse d’un quelconque fait précis, daté, documenté, il peut ainsi affirmer (28 avril) : « Le danger principal pour les manifestants comme pour les habitants des quartiers populaires vient néanmoins des collectifs, des groupes paramilitaires qui se déplacent à moto et tirent dans le tas ou visent carrément la tête pour terroriser la population. » Il est vrai que s’ils tiraient dans la poitrine, la population serait beaucoup moins terrorisée !
A bonne école, ou sachant ce qu’on attend d’elle, Monferrat, après son passage à San Cristobal, près de la frontière colombienne, reprend donc à son compte la manipulation habituelle : « Les résistants, comme ils se dénomment eux-mêmes (…) comptent leurs morts aussi. Soixante-quinze officiellement (sic !) dans tout le pays (…) » Comme son chef, elle voit des « colectivos » partout, mais n’a en revanche jamais entendu parler de la présence des paramilitaires colombiens. Pas plus que des « chopos », armes artisanales utilisées par les nervis de l’opposition pour projeter des billes de verre ou d’acier – qu’elle attribue sans hésitation aucune aux forces de sécurité.
« Ce que les opposants à Maduro craignent vraiment, continue-t-elle, c’est de finir dans les geôles du Sebin, police politique que tout le monde accuse – rumeur invérifiable mais répandue – de nombreuses disparitions ». Que chacun relise lentement cette phrase (et la complète) : rumeur « invérifiable » (et donc invérifiée) « mais répandue » (et que nous contribuons à répandre). Et qui imprégnera le cerveau des lecteurs, du moins nous l’espérons…
Il n’y a pas si longtemps, le candidat à l’Elysée Emmanuel Macron devait démentir qu’il était homosexuel et en couple avec le directeur de Radio France Mathieu Gallet, rumeur ayant connu ses premières occurrences sur Twitter avant de tourner en boucle sur les réseaux sociaux. Aujourd’hui c’est Le Monde, pourfendeur des « fake news » qui, utilisant des méthodes ignobles, dignes de la « fachosphère », répand ses propres faux grossiers dans un but partisan. Pauvre Hubert Beuve-Méry [8]…
Correspondante du quotidien à Bogotá, Marie Delcas, le 3 décembre 2015, avait déjà fait « presque aussi bien » : « Selon le quotidien espagnol ABC et le Wall Street Journal [quelle enquête digne d’une journaliste d’investigation !], M. [Diosdado] Cabello [alors président de l’Assemblée nationale], serait [serait !] sur la sellette de la justice américaine pour trafic de drogue et blanchiment d’argent. » « La rumeur lui prête une immense fortune », pouvait-on lire quelques lignes auparavant.
Dénonçant ces jours-ci l’expulsion de Paranagua, Jérôme Fenoglio précise : « Marie Delcas, avait déjà fait l’objet d’une mesure similaire le 31 août. » Disons que cette mesure aura au moins un avantage : vivant en Colombie, Delcas aura désormais plus de temps pour s’intéresser aux exécutions par les paramilitaires des paysans et militants de gauche (plus, récemment, de guérilleros des FARC démobilisés) – 45 victimes depuis le début de l’année, plus de 150 depuis 2012 –, dont ses lecteurs ne savent quasiment rien.
Comme il se doit, une forte visibilité a été offerte à la pétition lancée début juin par un groupe d’« intellectuels de gauche », altermondialistes ou écologistes d’Amérique latine, d’Europe et des Etats-Unis dénonçant la « dérive » de Maduro. Le soutien au gouvernement vénézuélien, accuse ce texte, « relève non seulement d’un aveuglement idéologique néfaste, mais il contribue malheureusement à la consolidation d’un régime autoritaire ». Toutefois, a regretté Paranagua, ce pamphlet « a été signée par peu de Français », signe de « l’indifférence d’une gauche hantée par les vieux rêves de révolution par procuration ». C’est peut-être aussi le signe que les progressistes sont de moins en moins nombreux à se laisser manipuler par le quotidien du soir. Celui-ci n’a-t-il pas oublié d’informer ses lecteurs qu’un autre groupe de personnalités intellectuelles, universitaires et politiques de gauche du monde entier a répondu au premier pamphlet ? Regroupés au sein du Réseau des intellectuels, artistes et mouvements sociaux en défense de l’Humanité, et sous le titre « Qui accusera les accusateurs ? », les auteurs considèrent que le Venezuela est victime d’une « guerre de quatrième génération ou d’une guerre de basse intensité » menée par les Etats-Unis et que « ignorer [cette] dimension conduit à développer des analyses superficielles ». Trop compliqué pour Paranagua !
Expulser Paranagua du Venezuela bafoue, on ne le contestera pas, la « liberté d’expression ». Mais sûrement pas son pendant : le droit du citoyen à « être informé » ?
Nul doute que le « dévoyé spécial » du Monde aurait rapporté, comme nous le faisons ici, la mise en examen, le 30 juin, au terme de l’enquête diligentée comme dans tout Etat de droit, de deux officiers de la Police nationale bolivarienne (PNB), Wilfredo Casanova et Carla Sayago, pour l’assassinat du jeune Luis José Alviarez Chacón (18 ans), le 15 mai, à Palmira, municipio Guásimo de l’Etat du Táchira.
Mais, selon une méthode éprouvée, il aurait aussi transformé en victimes du pouvoir – « lors de la répression des manifestations »… :
– Les trois gardes nationaux blessés par armes à feu lors d’un affrontement dans l’ « urbanisation Miranda » du municipio Sucre (Caracas), le 26 juin.
– Le sergent de la Garde nationale Ronny Alberto Parra Araujo, tué le 27 juin dans le secteur El Castaño de la ville de Maracay, alors qu’il tentait de contrôler une situation de violence.
– Giovanny González (24 ans), poignardé et brûlé vif le 27 juin par un groupe de fascistes « encapuchados » (masqués), parce qu’il avait l’air d’un « chaviste ».
– La femme attaquée et molestée dans le Centre commercial Ciudad Tamanaco (Caracas) par un groupe de partisans de l’opposition qui l’avaient prise pour Marlene de Andrade, présentatrice sur la chaîne de télévision publique Tves et épouse de Winston Vallenilla, son président.
– José Bravo, conducteur de camion, brûlé à 95 % par un jet de cocktail Molotov alors qu’il tentait d’éviter une barricade et d’échapper à la séquestration de son véhicule, et le motard qu’il a accidentellement tué – mort carbonisé – en reculant précipitamment (29 juin)…
Compte tenu de l’escalade en cours, la liste ne s’arrêtera malheureusement pas là.
Que Fenoglio, donc, cesse de pleurnicher. La mobilisation hautement proclamée contre la montée du Front national en France – si utile, entre parenthèses, au second tour d’une élection – n’est en aucun cas compatible avec la complaisance à l’égard, non de la droite lorsqu’elle agit démocratiquement, mais de l’extrême droite et des fascistoïdes vénézuéliens.
Maurice Lemoine
[1] Lire « Au Venezuela, la fable des manifestations pacifiques », Mémoire des luttes, 15 juin 2017 – www.medelu.org
[2] Présent pendant vingt jours, appareils de photos au poing, au cœur des manifestations et des affrontements fin mai et début juin, l’auteur de cet article, plusieurs fois au contact impromptu des forces de l’ordre, n’a eu aucun problème et n’a constaté aucun débordement de ce type. Ce qui n’empêche évidemment pas qu’en d’autres circonstances ils puissent exister. Disons simplement qu’ils n’ont absolument rien de systématiques.
[3] D’après le Syndicat national des travailleurs de la presse (SNTP), cité par Reporters sans frontières (RSF) le 27 juin, sur les 376 cas d’agressions ciblant des journalistes entre le 31 mars et le 24 juin 2017, 170 sont attribués aux agents des forces de l’ordre. Si l’on se réfère à ces chiffres, on en déduira donc (ce que ne fait évidemment pas RSF !) que plus de la moitié des exactions sont imputables à des membres, sympathisants ou manifestants de l’opposition.
[4] BBC Mundo, 7 avril 2014.
[5] Voir les photos accompagnant l’article « Au Venezuela, la fable des manifestations pacifiques » (Mémoire des luttes, op.cit.).
[6] « Panorama Social de América Latina 2015 », Santiago du Chili, 2016.
[7] El Universal, Caracas, 15 juillet 2014.
[8] Gérant et directeur du Monde de sa création en décembre 1944 à décembre 1969, Hubert Beuve-Méry en fit un organe de presse de grande qualité, devenu au fil des années le « quotidien de référence ».
source de cet article 32064
https://www.legrandsoir.info/le-chef-d-un-reseau-de-pressetitution-expulse-du-venezuela.html